Le festival vu et écouté par Michel Delorme...

Second point de vue, seconde écoute du festival "Jazz à Vienne" 2012.
Après Yves Dorison, c’est au tour de Michel Delorme. Il nous présente, en quelque sorte, le blog de son séjour dans cette antique cité iséroise.

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Vienne, lundi 2 juillet

  Le lion n’est pas mort ce soir.

C’est une véritable résurrection à laquelle nous avons assisté avec le quartet de McCoy Tyner. Le jeu puissant de Ravi Coltrane et peut-être aussi la simple évocation du patronyme glorieux, ont fait de ce concert un régal de puissance et de lyrisme. En particulier sur le morceau d’ouverture et sur celui où flottaient les harmonies de A Love Supreme.

Gregory Porter ouvrait le bal.
Même si on peut légitimement se poser la question d’un succès aussi foudroyant, il n’en reste pas moins que l’art du bonhomme est absolument inclassable, ce qui est déjà une grande qualité. Une version tonitruante de Worksong emporta la foule et la ritournelle de clôture la fit fredonner de bonheur.
À noter l’attitude scénique d’une sobriété et d’une quasi-timidité attendrissante de ce colosse à bonnet de motocycliste.

An evening with two pianos, et les huit mains de Kenny Barron, Benny Green, Mulgrew Miller et Eric Reed multiplièrent les combinaisons allant du solo au quartet de pianos, en passant par les duos. Virtuosité, mais néanmoins feeling à fleur de touches. Et un répertoire principalement à la gloire de Thelonious Monk, dont on semble miraculeusement redécouvrir le génie, jusqu’au Blue Monk final. Pour la petite histoire, le banc de touche fit une apparition en la personne d’Hervé Sellin. Dommage que l’on ne soit pas allé tirer McCoy de sa loge ! Mais la prestation des quatre pompiers +1 fut déjà assez longuette comme ça. D’autant que les soirées à trois groupes n’en finissent plus. Mais comme disait l’Ernest d’Oscar Wilde "piano is their forte".

Affiche de Jazz A Vienne 2012 (extrait)
© Jazz à Vienne

Vienne, mardi 3 juillet

  La funkitude des choses.

Tout le monde attendait Earth, Wind & Fire ( Experience feat. Al McKay ) et personne ne fut déçu. Encore une résurrection avec ce groupe phare des années 70, que le film Intouchables boosta si besoin était. On y voit Omar Sy danser sur Boogie wonderland, peut-être le plus gros tube du groupe. Et des tubes, Dieu sait ( pour peu qu’il soit funky ) qu’ils en ont égrainé d’autres ( d’aucuns disent égrener, moi je dis égrainer, disperser la graine ) : September, Serpentine fire, Let’s groove, Reasons, Fantasy... Évidemment, il fallut attendre un bon moment avant d’écouter ces perles disco-funk, mais le préambule passa bien. Alors que les chorégraphies frisent souvent le ridicule (en quoi aident-elles la musique anyway ? ), les tenues vestimentaires étaient sobres, contrairement à ce que j’avais vu à Carthage.

Avant eux se produisait Fred Wesley & The New JBs, et force est de reconnaître que ce fut le moment de la soirée le plus satisfaisant sur le plan musical pur, et le plus proche du jazz.

Le George Clinton Parliament Funkadelic fut en clôture tout ce que ce nom implique. Sono d’enfer, folie, effet scéniques déments. Dantesque !

À noter au CLUB de MINUIT le bon passage d’Issam Krimi, avec le grand batteur Julien Charlet, une autre pointure dans ce genre de musique qu’un certain adulé médiatico-blingprout .


Vienne, mercredi 4 juillet

  Erevan-Jefferson City Express

Même si Tigran Hamasyan n’est pas natif de l’antique cité de Tigranakert, cité qui n’a toujours pas pu être localisée, même si Pat Metheny a plutôt vu le jour à Lee’s Summit, les capitales respectives de l’Arménie et du Missouri sont plus parlantes.

La première fois que j’ai entendu Tigran Hamasyan, c’était à Montreux en 2004 avec Carlos Santana. Il venait tout juste de remporter le Prix Thelonious Monk. Depuis, les choses ont bien évolué, pour lui et pour nous, auditeurs. À la tête de son trio, il fit preuve ici d’une richesse d’invention époustouflante qui se teinta souvent de racines culturelles musicales. Bon, ça commence à chanter, à psalmodier, un peu trop peut-être. Avishai Cohen est-il passé par là ?
Mais que c’était beau.
Beau et un brin surjoué.

À l’écoute de la balance, on pouvait craindre le pire de la prestation de Pat Metheny. Une bouillie sonore plein pot s’échappait des haut-parleurs. Or ce fut un concert magnifique, beaucoup plus près du jazz que de l’électronique. Le guitariste préféré de Carlos Santana utilisa au moins trois instruments, dont l’invraisemblable guitare baryton, la 175 et la Roland. Il interpréta évidemment la quasi-totalité de son nouvel album Pat Metheny Unity Band , avec Chris Potter – sax ténor, sax soprano, clarinette basse et flute –, Ben Williams – basse –, Antonio Sanchez – batterie. Quand vous aurez confisqué la copie de votre petite sœur, jetez-vous sur la tornade de Leaving town qu’il a composé et qui est dédié à la mémoire de Michael Brecker. Il prononça son nom à la fin du morceau. Je me souviens d’un concert fabuleux en 2000 avec Pat, Michael, Larry Goldings et Bill Stewart. À l’époque, j’avais demandé à Brecker pourquoi Miles Davis ne l’avait jamais engagé. Il m’avait répondu : "le jour où il a appelé, je n’étais pas à la maison !". Il y eut un autre morceau du même genre, le dévastateur Are you going with me. Et aussi une ballade sublime This belongs to you. Nous eûmes également droit à un ahurissant Orchestrion, morceau interprété avec l’aide de l’Axon où des instruments fixes, batterie, accordéon, claviers etc... semblent commandés par le jeu de la guitare. Un concert éblouissant, par un artiste qui est ici dans son jardin et cela se sent.
Metheny est à Vienne ce que Jarrett est à Juan et ce que Zorn est à Marciac.

Plus tôt dans l’après-midi, j’ai eu le plaisir de rencontrer David Wild, pianiste du Temple Jazz Oechestra. David est également un membre éminent du John Coltrane Syndicate qui a récemment publié une Chronologie-discographie du grand saxophoniste.
LA Bible quoi !


Vienne, jeudi 5 juillet

  Il pleure dans mon cœur... Comme il pleut sur la ville.

Qu’elle fut malheureusement triste cette soirée French touch. La musique fut à l’image de ce crachin insidieux qui nous trempait l’âme. Et pourtant la qualité des artistes n’est pas en cause. Nous savons tous quel grand batteur et surtout quel grand compositeur est Aldo Romano mais même le sublime Estate ( il se l’est pour ainsi dire approprié ) nous émut moins qu’à l’habitude. Et je n’aime pas le clairon de Rava. C’est mon avis et je le partage.

Nous savons tous qu’Eddy Louiss est le plus grand organiste de tous les temps, Hammond avis en tous cas (!), mais le répertoire choisi fut morose. Dommage, car l’ajout des cordes apportait un son tout en douceur, ou bien ce fut à cause de cela. Et Dédé Cécarrelli avait manqué la correspondance au métro Châtelet. Seul le big band lyonnais Bigre tonitrua à bon escient.
Ma Zette, comme disait Miles Davis.


Vienne, vendredi 6 juillet

  Il pleut des cordes. Mais cette fois ce sont des cordes de guitare.

La soirée débuta par le brillantissime Larry Carlton, qui se classe dans la catégorie des requins de studio. Mais pas que... son jeu est un régal de technique maîtrisée et de bon goût. Mais c’est justement là que le bât blesse. Nous échangerons sans hésiter toute sa production discographique contre un seul baril de Django Reinhardt. Seul un grain de folie fait accéder au génie. Peut-être pourrait-il créer un groupe avec David Sanborn et Toots Thielemans, le Sweet aspartam trio. Ils joueraient à la manière de Didier Lockwood, période Grappelli.
Beau et con à la fois.

Al Dl Meola World Sinfonia à Vienne (juillet 2012)

Avec le Al Dl Meola World Sinfonia feat. Gonzalo Rubalcaba with special guest Maraca, on touche au summum de la guitare.
Al Di Meola EST la guitare. Je suis heureux de ne pas avoir appris la guitare, je me serais pendu avec une six cordes après avoir écouté ce concert ! Bien-sûr, il faut aimer cette musique hispanisante mais quelle maestria et quelle leçon de musicalité. Hispanisante et son corollaire argentin. L’accordéon était là pour ça.
En fait, c’est surtout la présence du pianiste Gonzalo Rubalcaba qui fut l’attraction de la soirée. Non pas seulement en lui-même, mais en ce qu’il apporta au son d’ensemble et au phrasé fluide de Di Meola.
À noter la présence d’un second guitariste, le jeune Kevin Seddiki, plus qu’un faire valoir. Un moment de grâce, ce Blackbird , peut-être le plus beau thème de Paul McCartney.
Al Di Meola, quand la technique, immense, s’efface au profit du lyrisme flamboyant.

Fin de soirée avec notre Bireli Lagrene, en quartet "sax, orgue, batterie". Tout le monde connaît son amour pour Jaco Pastorius et je me souviens l’avoir entendu avec Jack Bruce et Ginger Baker. C’est dire à quel point il est ouvert à l’innovation. Je ne suis pas en revanche très favorable au choix de l’orgue, je trouve que cela plombe la rythmique.


Vienne, samedi 7 juillet

  L’Afrique est bonne hôtesse

Dans les thématiques du festival, après le piano, le funk, le cocorico, la guitare, voilà l’Afrique.
N’étant pas un spécialiste de la musique africaine, je laisse le soin à d’autres de vous conter la soirée par le menu. Tout ce que je peux dire, c’est qu’avec Manu Dibango, Cheick Tidiane Seck, Fatouma Diawara, ce fut la fête au village. Et rien ne pouvait mieux confirmer la chose que ce Bal de l’Afrique Enchantée.


Vienne, dimanche 8 juillet

  La carpe et le pipeau

Béni soit le sort qui fit programmer Esperanza Spaulding en ouverture. Elle est très très belle et compte-tenu de la musique qu’elle joue, manquerait plus qu’en prime elle soit moche. Ce fut le pipeau de la soirée. Je rejoins donc ici mon ami Bernard Loupias du Nouvel Obs pour dire que la production de la demoiselle est Dubo, Dubi, Dubidon. Bonne idée quand même de présenter tous ses musiciens dès le 1er titre Us, c’est la première fois que nous entendons cela. Mais pourquoi TANT de musiciens ? Et de 3ème zone qui plus est, à part le vétéran Bob Mover bien evidemment.
Esperanza dit que ses héros sont Milton Nascimento et Wayne Shorter. Wayne dont elle massacra allègrement Endangered species, la version de la balance étant bien plus satisfaisante. On y nota au concert la citation du Jean-Pierre de Miles Davis puis un solo de piano exécrable. Et non contente de jouer de la basse, voilà que la dame chante . Voix haut perchée assez désagréable et scat catégorie souk. Au point que le cadreur prenait un malin ( ? ) plaisir à faire des gros plans de la choriste !

Avishai Cohen et Michel Delorme à Vienne (juillet 2012)

Ce fut heureusement tout autre chose avec le trio d’Avishai Cohen. Enfin de la bonne musique, un bon bassiste et un bon pianiste, le batteur Amir Bresler n’étant pas en reste. Et même quand il chante Avishai se laisse écouter avec délectation. Le jeu d’Avisha est une merveille de lignes mélodiques épurées, de passion sous-tendue et de lyrisme contenu. Force intérieure pudique serait un terme qui lui conviendrait bien. Impression confirmée par les rappels où à contrario il se lâcha complètement. Sur un titre afro-cubain puis sur Besame mucho.
Avec une citation déso-poilante au passage.

... avec le pianiste Omri Mor.
Jazz à Vienne 2012.

Le pianiste Omri Mor n’est pas un inconnu, il avait déjà donné quelques concerts en France. Il fait partie de ces jeunes pianistes israéliens extrêmement doués qui nous arrivent depuis un moment. Il possède un toucher qui va de la délicatesse à la tempête et son phrasé déroule à la perfection. Avec des effluves bienvenues de musique hébraïque. Comme tous ses collègues, il possède une culture classique très solide et ce n’est pas un hasard s’il se lança à mains perdues dans une longue tirade venant tout droit des Arabesques de Claude Debussy. Il apporte également au trio quelques compositions raffinées.
Le peuple élu, je vous dis.

Toujours est-il que le public leur fit un véritable triomphe, avant et après trois rappels, dont un double.


Vienne, lundi 9 juillet

  Ça vient de là... Ça vient du blues

Le blues n’est pas seulement un air, chanté ou non, triste et sur tempo lent : "ma taupe est partie avec le laitier et tout mon pognon, je chante le bluuuuuues du laitier dans le noir" ou bien la version française mais avec le dentiste. Le blues c’est Robert Johnson, c’est B.B. King, c’est Muddy Waters, c’est John Lee Hooker, mais c’est aussi Charlie Parker, John Coltrane, Carlos Santana, Wayne Shorter, Joni Mitchell. Et un blues peut être joué sur tempo rapide. En fait le blues est une structure musicale. Le blues ne comporte, quelque soit le ton dans lequel il est joué, que trois ou quatre accords dans une séquence de 12 mesures. Les bluesmen le jouent le plus souvent dans les tonalités de Mi ou de La, plus adaptées à la guitare, alors que les jazzmen le jouent plus volontiers en Fa, Si bémol ou Mi bémol, plus faciles pour les trompettes et les saxophones. Dans la grille basique, le Do 7eme correspond à l’introduction du Si bémol, la fameuse « note bleue » qui n’existe pas normalement dans la gamme de Do majeur, et le Fa 7eme correspond à l’arrivée de la note Mi bémol autre « note bleue » qui n’existe pas... mais dans celle de Do mineur. D’où l’ambiguïté produite entre le contact « non occidental » des gammes majeures et mineures qui fait toute l’originalité du blues. Dixit Doctor Jazz.


Vienne, mardi 10 juillet

  Une baguette de fer dans une main de velours.

Soirée extraordinaire.
Et si ce n’est pas celle qui attira le plus de monde, ce fut l’une des plus réussies de ce festival tant sur le plan l’innovation que sur le plan de la qualité artistique. C’est le succès populaire d’autres concerts qui permet de réunir de tels artistes. C’est le cash généré par les ventes de Barbra Streisand par exemple qui permit d’enregistrer Glenn Gould. Messieurs les programmateurs de Jazz à Vienne, chapeau !

Innovation car l’accouplement de The Bad + et de Joshua Redman était une première et le Mosaic Project de Terri Lyne Carrington featuring Dianne Reeves était tout bonnement une exclusivité, tout au moins française. _ Re chapeau.

Si vous me lisez, vous savez que je ne suis pas un inconditionnel de Joshua Redman, loin s’en faut, ni de The Bad +. Mais ce 10 juillet fut une révélation, un miracle. Galvanisé par un trio d’enfer, le saxophoniste repoussa les limites de ses improvisations jusqu’à les faire exploser dans des phrases aux suraigus ravageurs. Il en voulait, le bougre !
Un triomphe lui fut fait.
Dommage que Redman n’ait pas un son à la hauteur, c’est le seul bémou.

Michel Delorme avec Terry Lyne Carrington à Vienne (juillet 2012)

J’ai parlé de qualité artistique, la voici. Terri Lyne Carrington n’a pas besoin d’être présentée. Tous les grands du jazz veulent jouer avec elle : l’immense Wayne Shorter, Herbie Hancock, feu Stan Getz, etc... Stan qui s’y connaissait un peu en batterie et qui avait les moyens de s’offrir Roy Haynes, Elvin Jones, Jack De Johnette ou Tony Williams.

Le Mosaic Project de TLC est une bien belle chose, avec six américain(e)s, dont deux d’origine asiatique, et une hollandaise. Ce qui frappe en premier lieu, si l’on peut dire, c’est l’immense présence de Terri Lyne derrière sa batterie. Son jeu est le plus intelligent qui se puisse entendre aujourd’hui, force percussive et richesse des timbres et du phrasé. Elle n’accompagne pas un soliste, c’est le soliste qui l’accompagne. J’exagère à peine.
Une baguette de fer dans une main de velours. Je n’ai rien entendu de mieux dans ce style depuis Roy Haynes.
Et quelle arrangeuse. Son Michelle des Beatles fut une véritable re-création, voire une ré-création. Et le Sippin’ at Bell’s de Miles Davis, pour une séance de Charlie Parker en 47, fut pris sur un tempo d’enfer qui ravagea tout sur son passage.
On sait quelle grandissime chanteuse est Dianne Reeves. Sa voix caressante passe du médium au grave sans que la phrase mélodique ne soit un seul instant brisée. Du grand art qui renvoie à leurs chères études toutes les roucouleuses actuelles, surtout et y compris Mme Lisa est que dalle.
Il y a eu Ella, Sarah, Billie, Nina, maintenant il y a Dianne .
Je suis en outre resté scotché par le jeu de la saxophoniste alto Tia Fuller. Dans un style ébouriffant qui doit je pense beaucoup à Ornette Coleman. Un Ornette plantureux. Et si elle n’a pas encore de fiancé musical, je suis volontaire ! Mais ce sont bien mes oreilles qui ont entendu ce qu’elle jouait. Tout bonnement ahurissant. Je n’ai pas été foutu de trouver sa date de naissance mais elle ne doit pas être bien vieille et je vous le dis : Messieurs prenez garde


Vienne, mercredi 11 juillet

  Sophisticated Lady

Stéphane Belmondo ouvrait le bal de cette soirée à suspense. À la tête d’un quartet redoutable (Kirk Lightsey - piano -, Sylvain Romano - contrebasse - et Billy Hart - batterie -), il fourbit surtout son bugle. Cet instrument possède un bien plus beau son que la trompette, plus velouté, plus propice au lyrisme. Et Stéphane d’expliquer que son jeu sur le bugle n’est pas une transposition de son jeu de trompette, mais qu’il lui a fallu beaucoup de temps pour arriver à avoir un langage propre sur ce beau machin. La musique fut puissante, comme dans ce United de Wayne Shorter en rappel, ou tendre comme dans ce What’s new en duo avec Lightsey.

Je voudrais ajouter que je suis infiniment reconnaissant à ce Belmondo là d’avoir un jour joué un des plus beaux solos de toute l’histoire du jazz, tous instruments et pays confondus. Cela s’est passé sur le Notre Père de Duruflé en ouverture du sublime album Hymne au soleil. Je ne connais guère que le solo de Lee Konitz sur Lover man en 54 au Haig’s de Los Angeles - avec le quartet de Gerry Mulligan - qui puisse rivaliser. Ou encore cette improvisation de Wayne Shorter entre Masqualero et Aung San Suu Kyi en 2001 au Parc Floral. Ces merveilles devraient être classées au patrimoine mondial de l’humanité et orchestrées, par Lionel évidemment.

Avez-vous remarqué que Melody Gardot porte le même nom, à une lettre près, que notre Brigitte Bardot nationale ? Etonnant, non, Melody serait-elle à la chanson ce que Bardot est au cinéma ?
Deux stars planétaires en tous cas.

Melody Gardot... évocation - Vienne 2012
© Isabelle Delfourne

Elle a du cran, la dame, ou alors elle ne doute de rien. Attaquer le concert par une longue psalmodie à résonnance africaine, genre chant d’esclave, avait de quoi surprendre. Puis, de sa voix secrète et suave, elle nous emmena promener sur les rives du tango, du fado et de la bossa nova, traduction chantée des ses récents voyages. Elle caresse tellement le tango que l’on entend même plus le rythme qu’elle joue au piano. Elle a tout compris de la bossa, c’est doux comme du satin et languissant comme une vierge. Mais au cours de ces différentes interprétations, surgissaient parfois les harmonies de Fever. Chassez le naturel... C’est lors du rappel, au centre du célèbre Summertime de Gershwin qu’éclata enfin la vérité, le fameux Fever, pour de vrai.
Peu de chansons de l’album précédent, dommage oui et non, car si le public aime entendre ce qu’il connaît, un artiste se doit de ne pas se répéter. Et surtout, fait si rare, elle écrit et compose ses chansons au lieu de débiter des standards et des ballades, comme presque toutes les autres.
Sinon, le saxophoniste - un beau mec à lunettes blanches - se lança dans un long solo archi-free qui permit à Melody d’aller se changer. Je me suis demandé si le public allait supporter ça longtemps !
Rayon tenue vestimentaire, justement, on ne peut pas dire que le gros turban qu’elle arborait "crânement" était très glamour.
Mais peu importe, Melody Gardot EST le glamour.


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