Ceci n’est pas un concert

Un trio intrumentalo-vocal : Leïla MARTIAL, voix, claviers, effets, Eric PEREZ :batterie, électronique, basse vocale, Pierre TEREYGEOL, guitare, voix.

Les clochettes d’un troupeau de chèvres tintinnabulent et Leïla Martial installe son corps, sa voix, sa présence et son sourire espiègle.
Un thème avec des volutes à la Youn Sun Nah et un solo qui lui fait écarter de son chemin, d’un gracieux déhanchement, André MINVIELLE, Médéric COLLIGNON et Géraldine KELLER, à vrai dire pas les premiers venus genre je fais ce que je veux de ma voix. Que dire d’autre ? Ce qu’elle fait est exceptionnel  : variété, intensité, beauté. Cet OMBILIC, une compo de Téreygeol, nous est offert de manière fulminante, fulgurante, explosive. Comme la poussée nécessaire et suffisante pour nous mettre sur orbite.
OPAPA, compo de Perez, s’ouvre sur les voix des hommes. Thème, solo, impro de Martial, battle batterie-guitare. Pffff, c’est vachement beau On a quitté l’atmosphère.
Martial enchaîne avec un genre de discours à nous adressé, qui part en vrille dans un salmigondis d’onomatopées, de bribes de phrases, de ruptures du discours et d’usage hyper malin des petites machines électroniques. Ce qu’elle fait est simplement hénaurme, le monologue de Monty Brogan vocalisé.
On n’assiste pas à la copulation affligeante et pénible du jazz et de la musique contemporaine. On n’assiste pas à la énième ressucée d’un copié-collé de ce qui fait plaisir aux foules. On n’est pas en train d’assister à un concert. On vit une expérience. UNE EXPÉRIENCE. Qui brasse nos émotions, nos corps, nos idées, nous laisse sans voix, tendus, osant à peine respirer. Elle va le faire ? Elle le fait ? OUI !!! On est en apesanteur. Et, indice notable, ce public composé en majorité de la génération contenue-détenue-tenue par la laisse électronique n’use pas de son phone : personne ne touite, personne n’essaimesse, personne ne vérifie son écran des fois que le monde serait en train de s’auto-détruire concomitamment.
Ensuite, le batteur et le guitariste se montrent un peu plus. Pas la peine de mégoter : ces gars-là ne sont pas des faire-valoir rien qu’au service de la créature vocalisante. Ils donnent à entendre.
Les petites clochettes reviennent, le troupeau de biquettes aussi, le temps d’un texte joliment engagé « Je bêle donc je suis » qui se clôt par un très très gros duo batterie-guitare.
Of course, on les rappelle, avec grand grand grand plaisir, histoire de rejoindre le sol en douceur...

Mercredi 12 octobre 2016
Le studio de l’Ermitage
8, rue de l’Ermitage
75020 Paris