Côté jardin le trio autour de la contrebasse accolée au piano. Côté cour, un septuor associant cordes et bois : le contrebassiste Diego Imbert a vu les choses en grand pour honorer la mémoire de Charlie Haden. Un disque, le disque "Tribute to Charlie Haden", était paru en octobre (lire ici !), il était temps d’en fêter la sortie en cette fin novembre.
Diego Imbert, Enrico Pieranunzi (piano) et André Ceccarelli font régulièrement et depuis belle lurette "ménage à trois" [1] au point qu’on se sait plus trop qui est à la tête du trio. Ce soir là, c’était au tour du contrebassiste, le lendemain à Lyon, au Musée des Confluences, ce serait au pianiste de prendre les commandes pour un hommage de trois jours aux compositeurs du cinéma italien.

Au Studio de l’Ermitage, allaient se succéder des séquences en trio et une série de thèmes arrangés par Pierre Bertrand pour l’ensemble réuni à cette occasion.
Rendre hommage à Charlie Haden, c’est jouer sa musique, certes et pour commencer (First Song, Nightfall et Silence), mais aussi cultiver le souvenir à travers des pièces composées pour lui (par son ami Pieranunzi) ou en mémoire de lui par Diego Imbert et à nouveau le pianiste romain.
S’il faisait frisquet dehors (on avait vu voler des flocons en journée), l’ambiance était des plus chaleureuses autour des petites tables dans la salle du Studio de l’Ermitage. Un public sans doute acquis et conquis au moins en partie mais qui n’en garde pas moins son esprit critique. Et CultureJazz avait réuni un quatuor de choc pour l’occasion... J’écris là en mon nom, laissant à mes trois camarades la liberté de leurs avis.
Je connaissais le disque et je suis, disons-le, très sensible à l’art du piano d’Enrico Pieranunzi. J’ai retrouvé ce soir-là les qualités de la musique, des fins arrangements que l’on doit à Pierre Bertrand et la constante inventivité du trio "français" du pianiste romain. Dans les pièces d’ensemble, les cordes et les bois habillent la musique d’un velours chaleureux et subtil qui sonne juste, sans prétention ni mièvrerie et s’effacent pour laisser s’envoler les solistes du trio qui savent revenir au swing sans forcer le trait. Les pièces choisies dans le répertoire d’Haden sont magnifiques de simplicité apparente mais difficiles à restituer sans sombrer dans la copie tant elles collent à l’image, à la sonorité et à l’esthétique particulières de leur auteur. En étroite collaboration avec Diego Imbert et investi de sa confiance, Pierre Bertrand a parfaitement relevé le défi par son écriture et le choix de la formule instrumentale (deux violoncelles, un hautbois...), offrant même un solo bienvenu à la clarinette de Stéphane Chausse sur Waltz for Charlie (de D. Imbert) à la fin du concert (c’est aussi le cas sur le disque).
Et puis, il y eut les pièces jouées en trio, savourées apparemment par les autres membres de l’ensemble laissés temporairement au repos. C’est là que s’exprime la verve et la truculence de ce fameux ménage à trois sur le très chaleureux Miranda (de Pieranunzi... qui ne figure pas sur l’album, faute d’espace !) et plus encore dans Lennie’s Pennies de Lenny Tristano où s’engage une joute endiablée et joyeuse entre le piano impertinent d’Enrico Pieranunzi et la batterie d’un André Ceccarelli très en verve et jamais à cours d’effets ! Diego Imbert les laisse jouer avec bienveillance mais garde le contrôle. C’est lui qui, ce soir, aura le dernier mot et chacune de ses interventions solistes mettent en lumière son talent pour faire chanter sa contrebasse avec le cœur.
Le public effectivement conquis en redemande et Diego Imbert sort une ultime pièce de son programme : Faith of The Bass. Une belle conclusion pour l’hommage d’un contrebassiste de grand talent à un musicien admiré et regretté.

Diego Imbert - Tribute to Charlie Haden
Studio de l’Ermitage - Paris 75020
Mercredi 29 novembre 2017
Diego Imbert : contrebasse / Enrico Pieranunzi : piano / André Ceccarelli : batterie / Pierre Bertrand : flûte, arrangements / Johann Renard, Caroline Bugala : violons / Gregoire Korniluk, Paul Colomb : violoncelles / Stéphane Chausse : clarinette / Ariane Bacquet : hautbois.


Le disque  :

Diego IMBERT : "Tribute to Charlie Haden"

À retrouver dans la "Pile de Disques" d’octobre 2017 sur CultureJazz.fr, ICI...

>Trebim Music - TREBMUS054 / L’Autre distribution

Diego Imbert : contrebasse / Enrico Pieranunzi : piano / André Ceccarelli : batterie / Pierre Bertrand : arrangements / Johann Renard, Caroline Bugala : violons / Gregoire Korniluk, Paul Colomb : violoncelles / Stephane Chausse : clarinette / Anne Cecile Cuniot : flûte / Ariane Bacquet : hautbois.

01. First Song (Haden) / 02. Charlie’s Waltz (Imbert) / 03. Charlie Haden (Pieranunzi) / 04. Liberation Suite Part 1 (Imbert) / 05. Liberation Suite Part 2 (Imbert - Pieranunzi - Ceccarelli) / 06. Liberation Suite Part 3 (Imbert) / 07. Nightfall (Haden) / 08. Last Dance In Paris (Imbert) / 09. Lennie’s Pennies (Tristano) / 10. Faith Of The Bass (Imbert) / 11. In The Wee Small Hours Of The Morning (Mann) / 12. Silence (Haden) // Enregistré les 28 février, 1er mars et 26 avril 2017 au Studio de Meudon.


[1Titre d’un album du trio paru en octobre 2016 - Bonsaï Music - OUI ! CultureJazz.