...à Nevers, le mardi 8 novembre 2022.

Au lendemain d’une journée bien remplie (lundi 7 novembre 2022, lire ici...), nous avons pu écouter le duo Louis Sclavis - Bruno Ducret face à des collégiens de cinquième. De bonne heure, de bonne humeur ? À vérifier...

  Louis Sclavis & Bruno Ducret

mardi 8 novembre, 10 heures - La Maison, petite salle.
Concert à destination de collégiens de 5ème.

Louis Sclavis & Bruno Ducret à Nevers
© Maxim François

Puisque nous avons été invités à nous joindre à un jeune public, nous n’avons pas résisté ! C’est si rare de ne pas voir une dominante de têtes grises dans un concert de jazz... (Merci Marie-Claude !).
Nous voilà donc installés tout en haut des gradins pour écouter Louis Sclavis et ses clarinettes dans un rôle de transmission qu’il affectionne (et maîtrise grâce à une longue pratique) et son jeune complice Bruno Ducret avec son violoncelle qui devient vite, lui aussi, un passeur de savoirs musicaux. On ne va pas discourir sur les qualités d’instrumentistes des deux compères, sur leur approche très ouverte et experte des équilibres entre composition et improvisation, ce n’était pas l’objet de cette séance.
Devant plusieurs dizaines de jeunes auditeurs, il fallait capter leur écoute et les embarquer dans un univers musical qui ne leur était pas (ou peu ?) familier, on peut le parier sans risques. Le violoncelle et la clarinette ne dominent pas les playlists de Spotify ou Deezer !

  Jouer

Deux compositions de Bruno pour s’échauffer, entrée en matière en noir et blanc (écriture/impro), des titres poétiques pour ouvrir la porte de l’imaginaire et très vite un axe fort et fondamental mis en avant par Louis : le jeu ! On ne fait pas de la musique, on joue. Jouer avec l’instrument (un aperçu de tout ce qu’on peut faire de/avec une clarinette et ses composants), avec le violoncelle, jouer avec la partition (l’interprétation, la prise de distance, l’improvisation à partir de..., en opposition, en contraste). Et surtout, jouer avec l’autre ou les autres, l’un et l’autre compositeurs et évidemment, improvisateurs.
Dialogue avec les collégiens, et LA question : "Comment on improvise ?". Explication succincte du professeur Sclavis et démonstration. L’action vaut mieux que les longs discours.

Apprendre que Bruno Ducret est aussi guitariste et chanteur dans des groupes de rock métal, interpella sans doute les jeunes esprits. Et pour montrer sa belle voix, Maître Ducret leur chanta... un traditionnel nivernais du fond des âges (à l’échelle du public du jour) avec, en plus, un message sur la condition féminine qui n’était pas dû au hasard.

Voilà donc une heure de musique qui devait contribuer à ouvrir les esprits et éveiller la curiosité artistique si...

  Avec des si...

Si le relais était pris par les enseignants et ça, permettez-moi d’en douter ! Aucun des adultes accompagnant les jeunes (oserais-je dire des enseignants ?) n’a fait un pas vers les deux artistes restés sur le plateau au contact du public. Pas un regard, pas un mot, pas même un "merci" en passant devant la scène. On devine que rien n’avait été amorcé en amont (pas une question préparée) et on peut craindre que rien (?) ne sera fait ensuite dans ce cas.
Non, l’école n’est pas un lieu de consommation de savoirs avec quelques sorties pour divertir (?) et amadouer les élèves. C’est un lieu d’apprentissages (pluriels) pour former les citoyens spectateurs-auditeurs-acteurs d’aujourd’hui et demain. La séance de ce mardi 8 novembre était pourtant un magnifique support pour des apprentissages fructueux. On peut faire interagir plusieurs disciplines à partir d’une telle situation et pas seulement parler de musique. Cela suppose de considérer autrement les élèves et de travailler en équipe. Il sera toujours temps de revenir aux programmes scolaires qui sont souvent une excuse trop facile pour ne pas chercher autre chose.
J’ai connu (avec mon passé d’enseignant-formateur) bien des instituteurs et professeurs militants dans la vraie vie qui étaient réactionnaires dans leur pratique pédagogique... Ça n’a pas l’air de s’être amélioré [1].

Heureusement, quelques élèves se sont avancés sur scène pour échanger quelques mots avec Louis et Marc... Notre espoir est en eux.

On (re)lira avec intérêt les articles publiés sur CultureJazz.fr à propos du projet "Jazz au Collège" mené au début des années 2000 par notre ami (et co-équipier de CultureJazz !) Yves Dorison à Lyon. Si seulement ça pouvait donner de (bonnes) idées à des équipes enseignantes... :

Merci à Maxim François pour la photo !

[1Bien que je connaisse une jeune collégienne de 6ème qui s’éclate en cours de musique en pratiquant les percussions corporelles, une des spécialités de l’ARFI lyonnaise à l’époque où Louis Sclavis en était un membre actif. On peut garder le sourire !