Un concert exceptionnel en cette fin d’année au Chorus de Lausanne avec le Bill Carrothers Trio.
Nous n’avions à ce jour jamais écouté Bill Carrothers en concert. Non pas que nous ne voulions pas, mais simplement que nous n’étions jamais là où il était. On peut de la sorte manquer d’éminents artistes et le regretter après coup. Ce ne sera pas le cas avec lui car il était, en trio, là où nous étions vendredi dernier : au Chorus de Lausanne avec à ses côtés le contrebassiste Nic Thys et le batteur Dré Pallemaerts.
Bill Carrothers est un musicien original, de ceux dont le parcours musical compte en ce début de XXIème siècle. Ces disques, très personnels (nous vous rappelons au passage qu’il a obtenu le prix de l’Académie Charles Cros pour "Armistice 1918"), font apparaître un talent insolite qui lui permet, d’enregistrement en enregistrement, d’approfondir ses acquis et de défricher de nouveaux horizons. Les belles idées de ce pianiste du Michigan sont portées par une musicalité ample et souple. Son toucher précis sculpte des univers acoustiques qu’ils partagent avec ses accompagnateurs dans la simplicité. Ce fut le cas au Chorus l’autre soir avec Nic Thys et Dré Pallemaerts. Ils se connaissent depuis douze ans et, même s’ils ont joué ensemble par intermittence durant ce laps de temps, cela se sent et se voit immédiatement. Les oreilles aux aguets, les coup d’œil hilares, accrochent en bandoulière à leur musique la complicité, la fluidité. Qu’il s’attarde sur les compositions des autres ou sur les siennes, Bill Carrothers, lui, promène sur le clavier des mains inspirées. La présence ductile et rugueuse de Nic Thys, les jeux d’équilibre de Dré Pallemaerts, lui offrent, plus qu’un soutien, des chemins de traverses où le trio ne se perd pas, sûr qu’il est de ses déambulations mélodiques. Saisissants à voir et à écouter, ces trois architectes d’un espace sonore intense nous ont donné un moment de jazz authentique.