L’Astrada – Marciac, le 8 août 2012

Émile Parisien, à Marciac - août 2012
© Jean-Louis Neveu

Quelle merveilleuse idée que cette carte blanche à Émile Parisien. Il fallait cela pour que l’enfant du cru devienne véritablement prophète en son pays et qu’en même temps s’en affranchisse. Il avait choisi de s’entourer de musiciens hors pair : Manu Codjia, guitare, Vincent Peirani, accordéon, Jean-Paul Celea, contrebasse, et comme on dit last but not least l’immense Daniel Humair, batterie. Dans cette magnifique salle, où l’on est assis comme dans un fauteuil Pullman et où les balances se méritent car il faut franchir le mirador de Tatie Danielle, Émile et ses disciples ont célébré la messe la plus bandante de l’été festivalier. Répertoire de compos alléchantes qui démarra par Ornette Coleman et Joachim Kühn, ce qui dans le cas présent était quasiment la même chose. Mais on ne saurait limiter Joachim à cette allégeance car il est l’un des plus grands pianistes, musiciens et compositeurs au monde. Écoutez seulement le sublime Source Bleue du Meski, une des plus belles choses qui ait jamais été composées avec A Remark You Made de Zawinul ( Weather Report ) et The Wedding d’Abdullah Ibrahim, pour le jazz contemporain s’entend. Et cela m’a fait bougrement plaisir qu’Émile Parisien pense à lui. Le reste étant dû à la plume du récipiendaire, sauf en rappel Le Clown tueur de la fête Foraine qui fut dédié à son auteur Julien Touery présent dans la salle.

Manu Codjia fut étincelant et les lignes mélodiques qu’il improvisa portèrent l’incandescence du propos jusqu’à la fusion.

Vincent Peirani n’est pas qu’un monstrueux soliste, le soutien qu’il apporte à la musique du groupe enfle le discours jusqu’à la plénitude. La valse fut un petit bijou de musicalité, de verve et d’humour.

De Jean-Paul Celea, je ne dirai qu’une chose : c’est une cathédrale.

Je n’avais que rarement vu Daniel Humair se régaler autant en accompagnant quelqu’un. Non seulement il joua comme un dieu, mais vous auriez vu à quel point il couvait "le petit" du regard. Tel Jupiter, le père des dieux, avec cette tête qui fait de plus en plus penser au génial acteur Harry Baur. Il fut la lumière, la foudre et le tonnerre. En retour, Daniel vit sa créativité décuplée au contact de celle des jeunes loups.

Daniel Humair à Marciac - août 2012
© Jean-Louis Neveu

Quant à Émile Parisien, il suffit d’entendre une phrase de son soprano pour savoir qu’elle est de lui. La marque des grands. Il joua du reste presque exclusivement de cet instrument et quand il prit le ténor, on eût plus de points de comparaison pour décider qu’il est l’un des meilleurs saxophonistes du moment.

Émile, tu peux être fier de ta Maman, elle a donné au jazz un grand musicien.

P.S. Je sais qu’il était interdit d’enregistrer mais si par bonheur quelqu’un l’avait fait, ne serait-ce que le tenancier de la console sur demande des artistes, je serais volontaire pour une copie. J’échangerais tous les David Sanborn de ma petite sœur contre ce seul concert ! Ou un inédit de Coltrane, soyons sérieux.


> Liens :

À lire aussi sur CultureJazz.fr :