Chambéry - Espace Malraux - 9 janvier 2007
Chambéry fut naguère un fief italien, avant que la Savoie ne soit définitivement -n’en déplaise à certains illusionnistes du néo-régionalisme- rattachée à la France. Il suffit de se promener place Saint-Léger pour s’en convaincre. Et en ce 9 janvier où nous autres skieurs réclamerions une ambiance plutôt scandinave pour danser la cadence 2 temps sur nos fines lattes nordiques, nous voilà transportés en Italie avec le quintet italien « pur jus » d’Enrico Rava. Adieu le jus de myrtilles, goûtons plutôt au Chianti en surfant sur l’air du temps puisqu’il est à la douceur.
Ne nous méprenons pas ; loin de tout folklorisme, l’élégant trompettiste à la moustache savamment négligée s’inscrit d’emblée dans une culture jazz qui ne renie aucun brassage d’influences. Aussi incisifs l’un que l’autre dans les moments forts, le trombone de Gianluigi Petrella et la trompette (exceptionnellement le bugle, malheureusement) d’Enrico Rava savent se mettre en retrait lors des chorus de piano savamment ciselés d’Andrea Pozza, se contentant avec beaucoup de réussite d’imprimer en arrière-plan une patine finement harmonisée, un peu comme le ferait une section de cuivres et de bois d’un big band. A certains moments, on se demande même si d’autres souffleurs ne sont pas cachés derrière les rideaux, tant le son d’ensemble est puissant tout en gardant une parfaite cohérence.
Porté par une solide rythmique où l’on a été particulièrement impressionné par la force tranquille et la finesse du jeu de Roberto Gatto, que Thierry Giard qualifiait à juste titre de « Daniel Humair italien », le quintet d’Enrico Rava nous convainc par l’élégance raffinée de son discours. On s’interrogera juste sur l’opportunité des vocalises de Rosario Bonaccorso lors de ses solos de contrebasse, dont on pourrait sans problème se passer (chacun ses goûts).
On n’attend plus que la sortie du disque de ce remarquable ensemble transalpin chez ECM (The words and the days ECM 170 977-3) pour s’assurer que notre perception d’un doux soir chambérien était la bonne. Ceci dit, à la mi-janvier et en tant que fondeur, je me tournerais volontiers vers des climats plus proches de Jan Garbarek... dans les Dolomites sur la parcours de la Marcialonga avec 5000 autres mordus la semaine prochaine. Curieusement, le parcours passe à Pozza... Les fanfares tyroliennes sont normalement à ce rendez-vous hautement festif.
Si le quintet passe près de chez vous, allez-y, vous n’allez pas le regretter. Ciao !
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