Ambrose Akinmusire est un musicien bien connu des parisiens : il a joué avec son quintet au Festival “Banlieues Bleues”, au Sunside, au Duc des Lombards, au New Morning (extraordinaire concert du 16/07/2014) ; on l’a vu comme sideman à la Villette et très récemment à la Philharmonie de Paris.
Le festival “Sons d’Hiver” 2015 a décidé de le programmer avec deux invités : Theo Bleckman (vocaliste électronique) et Charles Altura (guitariste).

Ambrose Akinmusire (2014)
© Florence Ducommun - 2014

Le concert a débuté par “Rollcall for the Absent”, extrait de son dernier disque “The Imagined Savior is far Easier to Paint ”, une longue litanie de noms de personnes tuées par la police -des jeunes afro-américains-, lue par Bleckman, accompagné du seul Akinmusire. Ce vocaliste qui utilise une boîte d’effets électroniques intervint sans trop de trucage dans les ensembles de l’orchestre et apporta aussi quelques morceaux planants, qui utilisaient les possibilités sonores de polyphonies immédiates crées par un système électronique. Le guitariste joua plus naturellement avec le groupe, parfois en duo avec le pianiste : son rond, style versatile, assez traditionnel, sans blues néanmoins, ou plus anguleux, son premier solo en tempo dédoublé et sur des harmonies peu conventionnelles, mais dans un jeu souple et rythmique, annonçait plus que ce qui a eu lieu par la suite.

Ambrose AKINMUSIRE : "the imagined savior is far easier to paint"
Blue Note / Universal

Les thèmes joués par ce sextet/septet ont été plutôt lents, méditatifs, un peu dans le genre de ceux des disques de Herbie Hancock des années 60 (“Maiden Voyage” et “Empyrean Island”), mais fondée sur des structures rythmiques complexes et difficiles à identifier ; Justin Brown, qui n’a pris de solo qu’au dernier bis, joue comme un autre musicien, pas comme un batteur marquant le rythme. Akinmusire est toujours époustouflant, produisant un son très enveloppé, plutôt de bugle ou de sourdine bol, puis éclatant, perçant. C’est un virtuose et un grand technicien, qui met ses qualités au service de la musique. Il ne fait rien pour épater, mais joue pour émouvoir. Ce fut un concert reposant, une belle musique harmonieuse, avec quelques éclats au début du spectacle, comme ce long solo anguleux de Akinmusire.

Il faudra attendre le deuxième bis donné par le seul quintet -Akinmusire a fait signe au guitariste de partir- pour que nous retrouvions l’urgence de la musique, qui fait de ce quintet l’un des groupes les plus passionnants du moment. Le trompettiste avait encore beaucoup à donner, après avoir joué pendant une bonne heure.

MASSACRE jouait en deuxième partie.
Le son de la basse traverse le corps, celui de la batterie le dérange et la guitare fait vibrer les oreilles. Au bout de 3 minutes, mon oreille gauche un peu plus fragile semble s’ankyloser. Je sors. Je me suis installé dans le hall, très confortablement assis dans un large fauteuil en skaï, et j’ai écouté, les portes de la salle étant restées ouvertes -pour faciliter la sortie de nombreux spectateurs ? C’est une musique très cadrée, répétitive, pas très inventive par conséquence et, pour tout dire ennuyeuse et fortement datée. Ce qui en fait l’attrait, c’est l’expérience sonore. Il s’agit plutôt d’une “performance” que d’un concert. À l’entr’acte, l’organisateur avait fait distribuer des bouchons d’oreille. Avait-il aussi assuré les réservations aux consultations d’ORL pour acouphènes et oreilles cotonneuses ? Il est, du reste, un peu ridicule d’écouter de la musique amplifiée avec des bouchons d’oreille, quand un tout petit mouvement sur le potentiomètre permettrait de la rendre audible sans.

> Ambrose Akinmusire quintet : Ambrose Akinmusire : trompette / Walter Smith III : saxophone ALTO / Sam Harris : piano et piano électrique / Harish Raghavan : contrebasse / Justin Brown : batterie.

> Massacre : Fred Frith : guitare / Bill Laswell : basse électrique / Charles Hayward : batterie.

> Festival Sons d’Hiver. MAC Créteil, le vendredi 13 février 2015 à 20h30.