Claude Tchamitchian quintet

Mardi 26 avril 2022

Claude TCHAMITCHIAN réunit un quintet de taille XXXXL pour son nouveau programme WAYS OUT, quintet qui n’est rien d’autre que le WAYS OUT de 2015, augmenté de Daniel ERDMANN au sax ténor. Pour mémoire, WAYS OUT réunit Rémi CHARMASSON, guitare, Christophe MARGUET à la batterie, Régis HUBY aux violons et bidouilles électroniques et Claude TCHAMITCHIAN, contrebasse et compositions. Du quartet au quintet, juste un lascar de plus mais quel lascar. On fire, incandescent dés le premier solo de la soirée et va pas chercher dans tes exercices de gammes exotiques et d’arpèges étranges un début d’explication à ce qu’il expose à tes oreilles ébahies. Pas de construction genre mollo mollo d’abord avant d’exagérer peu à peu, non, Erdmann ne s’embarrasse de rien : furioso, calmos, secoué, simple, stratosphérique, il mélange tout et ça fait du bien, cette fureur explosive, ça nettoie les orifices, ça raccourcit les distances entre les petits os vibrants et le traitement du signal, la musique sans filtre quasiment, juste décoffrée avec encore ses aspérités naturelles. Cette première pièce, AS LONG AS YOU DREAM, nous cueille à froid et nous coince dans un coin du ring. C’est Marguet qui pose le décor avec ses mailloches méditatives puis pêchues sous les soli de violon puis de guitare sur fond de riffs collectifs. Il met de la couleur partout par l’usage de ses fûts et cymbales, ses frappes précises, son toucher soyeux. Ni trop ni trop peu. Impressionnante sa prestation.
On vit-mais on ne le sait pas encore-comme un pitch de tout ce qui va suivre : thèmes aux phrases simples et répétées, arrangements sophistiqués, nuances frappantes, soli somptueux.
Disposés en arc de cercle, les cinq lascars s’accordent du regard, du geste, de ce petit rien qui manifeste l’intelligence collective. LES VOLCANS DU PARADIS nous vaut un grooos solo du taulier Tchamitchian, avant la transition vers l’éruption sidérante et hénaurme du solo de sax, encore. Ça se joue entre le sax et la contrebasse, le premier enflammé, le second tenant une pulse galopante, rejoints par le batteur qui s’en vient à son tour crâmer ce qui n’a pas encore brûlé. Avant une rupture inattendue toute en douceur de tenues longues et planantes portées par le violon et la contrebasse, histoire de refroidir les braises. HEALTHY RAGE (dédicace à Charles Mingus), sur un tempo bluezy martelé avant de s’emballer quelque peu, sonne comme une joaillerie sophistiquée ( écriture et arrangement chiadés ) avec un solo électro au violon. Huby joue du violon avec ses pieds ( et non comme un pied.... ) et c’est tout un art de ne pas se tromper de pédales tout en tirant l’archer.
THE USELESS FIGHTS OF THE BROKEN POET (dédicace à Jacques Thollot) construit sur une clave portée par la batterie et la contrebasse évoque le célèbre Boléro mais pas plus que ça. Huby soloïse à nouveau en créant entre pieds et mains un fond harmonique et le solo qui va bien par dessus. Ça groove terrible et nous rappelle que ces cinq musiciens sont d’abord des jazzmen. Charmasson, qui a, tout du long du concert, glissé ses interventions dans des interstices du tissu collectif, y va d’un long cri. Mahavishnu Orchestra is back ?
Gros succès : applaudir à tout va vient à point nommé pour dénouer nos petits muscles tétanisés par l’intensité de l’ouvrage.
On les rappelle bien sûr, et ça tombe bien : il restait au répertoire un morceau qui n’attendait que ça.


Studio de l’Ermitage
75020 PARIS