| 00- BILLY MOHLER . Anatomy
| 01- JOEY ALEXANDER . Origin
| 02- REMI DUMOULIN . La ligne de démarcation- OUI !
| 03- GRAZZIA GIU . Fragments- OUI !


  BILLY MOHLER . Anatomy

Contagious Music

Billy Mohler : contrebasse
Nate Wood : batterie
Chris Speed : saxophone ténor
Shane Endsley : trompette

Billy Mohler n’est pas si connu que ça par chez nous, contrairement à Chris Speed ou Nate Wood. Allez savoir pourquoi ! Ceci dit, son quartet est tout sauf insignifiant. Pas de piano, deux soufflants et une rythmique, cela laisse les coudées franches, de l’espace à la musique afin d’explorer la rugosité du son. Et bien qu’il y ait des effets (en postproduction), le groupe sonne plutôt naturel. Une chose est certaine, le quartet possède une voix propre qui propulse efficacement sa musique et son originalité. Avec des mélodies identifiables et des improvisations spontanément débridées, Billy Mohler et ses potes avancent plus souvent sur les déviations que sur la route principale, avec une propension marquée pour les rythmiques obsédantes. Remarquez, on ne s’en plaint pas et l’on affectionne de suivre le parcours accidenté qu’il donne à écouter car il demeure d’une parfaite homogénéité en toute occasion. A écouter avec les deux oreilles.


https://www.billymohler.com/


  JOEY ALEXANDER . Origin

Mack Avenue Records

Joey Alexander ; piano, fender Rhodes
Larry Grenadier : contrebasse
Kendrick Scott : batterie
Chris Potter : saxophones soprano et ténor (2, 4 & 9)
Gilad Hekselman : guitare (4, 6 & 9)

Jeune pianiste prodige. C’est le type d’expression qui me rend instantanément méfiant. De quel animal de foire les commerciaux en guise de profit vont-ils nous gratifier ? D’autant que les premiers opus du gamin n’avaient rien de particulier si ce n’est qu’il interprétait avec goût et assurance des standards. A 19 ans, Joey Alexander publie donc son sixième album et le matériau est constitué uniquement de pièces originales. La bonne surprise vient de ce que ces pièces ont des structures assez complexes pour remarquer qu’à 19 ans le musicien a bien grandi à tous les sens du terme. Certaines d’entre elles se permettent quelques embardées sympathiques qui ne nuisent pas à l’ensemble, comme on dit. Sa rythmique favorite est là pour rehausser encore le niveau et les invités sont du même tonneau. C’est donc une affaire musicale entre membres du gratin qui s’entendent bien assez pour donner de la densité et de l’inventivité à une musique plutôt avenante, suffisamment mélodique pour ne rebuter personne, mais pas transcendante pour autant (de notre point de vue). L’utilisation du Fender ici et là est bienvenue et démontre que malgré (ou à cause de) sa jeunesse Joey Alexander dispose d’une liberté créative lui permettant d’explorer de nouvelles pistes, ce qui ne dérangera personne. A suivre.


https://joeyalexandermusic.net/


  REMI DUMOULIN . La ligne de démarcation

Eddie Bongo

Rémi Dumoulin : saxophone
Bruno Ruder : piano
Fred Chiffoleau : contrebasse
Pascal Le Gall : batterie

Il est écrit dans le press kit que les standards dans ce disque interprétés le sont sous les auspices (les bons) de Lennie Tristano, Wayne Marsh et Lee Konitz. Vous savez quoi ? C’est parfaitement exact. Une chose est certaine, le quartet s’en empare brillamment, les travaille au corps et les revisite avec une assurance en tout point pertinente. Pas une seconde d’ennui à l’écoute de ce Cd au sein duquel chaque musicien a l’espace nécessaire à sa créativité sans débordement d’ego surdimensionné. Homogène, le quartet l’est et il sert la musique avec une générosité et un à-propos épatant. Chaque titre est revu et corrigé en s’éloignant de la mélodie originale par un jeu sur les harmonies qui autorise une nouvelle mélodie. C’est bien vu mais surtout, cela est exécuté sans effort, de sorte que tout un chacun peut écouter cet enregistrement sans se torturer les méninges. C’est du jazz et point barre ; et c’est ce jazz-là qui fit pour une grande part son succès en un temps que les moins de 50 ans n’ont pas connu ou oublié. Vivacité, inventivité, audace, spontanéité et talent, souplesse et habileté, autant de qualificatifs auxquels nous pourrions en rajouter d’autres dans la même veine et qui décrivent notre plaisir à l’écoute de ce disque indispensable.


https://lalignededemarcation.com/


  GRAZZIA GIU . Fragments

Jazz-Quart

Grazzia Giu : chant
Guillaume Poncelet : piano
Daniel Yvinec : multi-instrumentiste

Sur ce coup-là, nous avons un bon mois de retard ! Mais peu importe. Voici donc un Cd volontiers défini comme étant à la croisée des genres mais qui selon nous tend plus vers une pop vintage, intime et élégante, finement travaillée, au plus proche de l’émotion native. La voix de Grazzia Giu à elle seule justifie l’écoute, ce qui ne signifie pas que les musiciens soient en deçà du talent de la chanteuse car ils créent autour d’elle un univers à la mesure des chansons de l’album. Tissé autour d’une forme mélancolique qui fleure l’underground, les lieux aussi obscurs qu’éclatants d’une époque libertaire (qu’il nous semble l’avoir rêvée tant elle paraît aujourd’hui dépassée), ce disque dans son entièreté touche à la fibre la plus intime avec une délicatesse aiguë et insiste paisiblement sur les émotions les plus vives d’une humanité buissonnière et créatrice (qui nous manque). Quant à la reprise du « Where are we now » testamentaire de David Bowie, elle est un bon exemple de réinterprétation réussie. 30 minutes et 11 secondes de voyage hors du temps « en suivant la grande ourse. »


https://www.grazzia-giu.net/