Under the radar, one more time

Jeudi 8 septembre 2022

Nouvelle soirée Under the radar dans le cadre du Festival de Jazz à la Villette, à l’Atelier du Plateau qui, pour sa vingt-et-unième rentrée, accueille Clément JANINET et son programme O.U.R.S. Le public est au rendez-vous, avec une sociologie éclectique qui va des minots d’un an aux XXX-agénaires amoureux du live plutôt que des écrans. Que du bonheur partagé dans cette salle qui reste, soirée après soirée, « the place to be ».
O.U.R.S., c’est JANINET au violon et (petite) guitare électrique, Hughes MAYOT au sax ténor, Joachim FLORENT à la contrebasse et Emmanuel SCARPA aux vibraphone et batterie.
Le premier morceau débute par un ostinato entêté qui mène au thème exprimé par le ténor et le violon, lui-même s’emportant dans un solo presque rageur qui s’inscrit dans les sillons tracés par Huby et Pifarély (électrifiés ). Le violon et la contrebasse s’attellent à une cellule répétitive à deux voix avant une séquence a capella du violon. Ça fleure bon son Terry Riley, son Philip Glas et autre La Monte Young. Il n’est pas inintéressant de remarquer que ces jeunots perpétuent les apports de l’école minimaliste américaine qui ne date pas d’avant-hier. Ils font ensuite dans un genre de millefeuilles polyrythmique : le violon et la batterie en tempo élevé, le sax et la contrebasse en tempo moyen lent. Juste à même de créer les conditions du lâcher-prise chez le public et le début d’une transe légère. Cette pièce assez longue prend le temps nécessaire, ni plus ni moins.
Ensuite, ils nous emmènent, toujours avec une base répétitive, du côté du chachacha (si si si), donc de l’Amérique du Sud, un truc qu’on pourrait danser à l’économie, en bougeant à peine les pieds. Il y a cet hommage à Alice Coltrane qui, d’une forme de raga, au son continu monocorde et planant, absence de pulsation rythmique, avec aux petites percus vibrantes posées à même le sol, Arnaud LAPRÊT, passe d’un seul coup à un récit au rythme martelé par la contrebasse et la batterie et développé par le ténor solo puis le violon solo. Un morceau intense qui « déboîte et déchire », pour parler djeun’. Après ce détour indien, il y a cet épisode furieusement free (là, se rappeler que O.U.R.S. signifie Ornette Under The Répetitives Skies importe) qui fricote avec l’Afrique avec l’arrivée du vocaliste ZE JAM AFANE qui vient narrer (en français) l’histoire du bonheur quand le dictateur chute. Il chante aussi.
Il y a cette intro au vibraphone, un motif incantatoire, imperturbable, stakhanoviste (dans quel état de tension les muscles du bras du maillocheur ?) qui va tenir la baraque pendant que les autres s’engagent dans une musique échevelée, planante et bruyante (oui, ça existe le planant bruyant qui sature l’écoute, crée la confusion qui ouvre à la transe) avec un seul mot d’ordre : rendez-vous au point d’orgue. Lequel apparaît au loin, là-bas, au bout d’un diminuendo infini.
Le public chaud bouillant, les rappelle, une fois, puis encore une autre.


Atelier du Plateau
75019 Paris