Où le pérégrin découvre l’Arrosoir, un club sympathique à la programmation variée, à Chalon sur Saône.
Dimanche 05 février 2023
Pour ma première incursion à l’Arrosoir, lieu associatif âgé d’une cinquantaine d’années sis à Chalon sur Saône, j’allai à la rencontre d’Aki Rissanen, pianiste finlandais très présent sur la scène jazz française, dont le concert solo occupa fort agréablement ma fin d’après-midi dominicale. Qui plus est, la route fut agréable et offrit de beaux paysages : idéal pour écouter paisiblement quelques vieux folkeux vintage de derrière les fagots. C’était un 05 février venteux, jour qui vit la création d’Othello, de Verdi, à la Scala de Milan (1887) et la disparition de Lou Andreas-Salomé (1937), figure intellectuelle majeure de l’entre-deux guerre. Dans la cave, le piano avait quitté la scène. Il trônait au milieu de la salle, entouré par deux rangs de chaises, de quoi accueillir une cinquantaine de personnes. Quelques ampoules définissaient l’ambiance du lieu. Trois projecteurs discrets s’ajoutèrent quand le pianiste vint. L’entame fut d’une couleur septentrionale, avec un flux musical continu entièrement basé sur de subtiles variations. Le deuxième morceau fut clairement marqué par la musique baroque. Jean Sébastien n’était pas loin. La suite s’attacha au développement de contours paysagers qui alternèrent les climats actuels avec bonheur, approchant par moment des mélodies proches de l’idiome jazz classique mais qui ne résistèrent jamais longtemps à la verve contemporaine du musicien. Assis à un mètre de l’instrument, je profitai (plus qu’il n’eut fallu) de la danse des mains sur les quatre-vingt-huit touches, des nuances qu’elle s’appliqua à créer, entre minimalisme et expressionisme modéré, pour articuler un discours fertile d’une grande intelligence musicale. Le rappel octroyé à l’auditoire conquis aborda une facette différente du pianiste, issue du folklore, une histoire de trolls, qui acheva sur une note souriante le concert. Ceci écrit, et je le sais depuis belle lurette, les fins d’après-midi dominicales peuvent être fécondes. Les clubs qui l’ont compris touchent un public de connaisseurs, capables de drainer avec eux quelques néophytes, à un moment de la semaine où l’offre culturelle est réduite : le dimanche, soit on mange chez mamie, soit on applaudit les morveux, au stade ou dans un gymnase… Alors vu depuis ma cervelle de jazzeux avide, c’est une aubaine que je ne peux ignorer, surtout quand je suis bien accueilli et ce fut le cas à l’Arrosoir. Pourquoi se priver, n’est-ce pas ?