Under the radar, variante hors site du Festival Jazz à la Villette, réunit les quatorze musiciens du Paul JARRET Acoustic Large Ensemble à l’Atelier du Plateau. Installés en cercles concentriques les unes vers les autres, le public alentour. Et pas n’importe comment : vu d’un drone-moustique, on voit des diamètres relier un tuba à l’autre, les deux contrebasses, le trombone et la trompette, le sax ténor et la clarinette basse, autour du noyau, le coeur du mandala : l’harmonium et la guitare, lui-même cerné par le quartet des cordes violons-cello. Sans oublier les serpents lumineux sur le sol.
Qui sont-ils ?
Paul JARRET, guitare et compositions, Thibault GOMEZ harmonium, Fabien DEBELLEFONTAINE et Brice PERDA tuba, Jules BOITTIN trombone, Hector LÉNA-SCHROLL trompette, Alexandre PERROT et Étienne RENARD contrebasse, Fabiana STRIFFLER violon, Maëlle DESBROSSES violon alto, BRUNO DUCRET violoncelle, Maxence RAVELOMANANTSOA sax ténor et Élodie PASQUIER clarinette basse.
L’alto ouvre par une poignée de notes conjointes à peine audibles, un motif simple, tout simple repris peu à peu et à l’unisson par le ténor, le trombone, la clarinette et les autres. Ce n’est pas un canon, ça se décale, se recale, un motif répété ad libitum qui s’empile, se dépile. C’est très beau, prenant. La clarinette basse virevolte au-dessus de cette nappe sonore, les grosses voix des contrebasses et tubas s’en mêlent avant que le convoi ne s’éloigne peu à peu du côté des Steppes de l’Asie Centrale. S’interroger sur un possible cousinage avec quelque râga du soir est-il impertinent ? Pour ceux qui auraient pensé échapper aux manigances de l’économie forcenée de l’attention, c’est raté : on est comme des rats derrière Hamelin, attirés par et vers cet éphémère et sonore nombril du monde, là, au milieu de nous.
Histoire de ratifier notre attention totale, c’est le violon qui s’y colle, avec la guitare à l’archet et la trompette. Pour un son tenu. Qui remet en mémoire le quatuor de clarinettes WATT dans ce même lieu. Bien sûr, des évènements viennent troubler-enrichir ce son tenu : l’harmonium, les cordes dans un bref bruissement d’essaim furieux, un riff venteux, un semblant de choeur d’anges où Lucifer s’emploie à mettre le brol, Il y a dans le son de l’harmonium quelque chose du Terry Ryley de 1972 au Centre Pompidou ( Persian Surgery Dervishes ) ; on s’agite du côté des archets quand bien même ce son tenu perdure, perdure, perdure. Après l’attention captive de l’intro, on plane. On ne peut qu’admirer la maîtrise de cet ensemble qui parvient à faire cohabiter autour d’un même son ténu-tenu, tuba, trombone ou contrebasse et violon, des instruments puissants et des instruments qui le sont moins.
Si le recours à des motifs répétés est avéré, si l’opposition complémentaire puissance-frêlitude embarque l’ensemble, on entend aussi l’harmonium triloguer avec les deux contrebasses, on subit une séquence râpeuse bruitiste qui met nos petits nerfs en queue de singe : tenues, pêches, clapements de becs et d’embouchures, grommèlements avant, récompense appréciée, une résolution harmonieuse et mélodique à la guitare, un air tout simple qu’on pourrait garder en mémoire et siffloter ici ou là.
Il manquait un quelque chose avec du rythme, c’est maintenant : une pièce dont le rythme varie du simple au double, passant plusieurs fois du ralenti à la vie réelle, comme un dahu rythmique ; des masses sonores, le couple trombone trompette qui s’emploie. C’est étrange et beau. Pas de traits virtuoses, pas d’envolées exubérantes, juste la mise en place rythmique au pied à coulisse.
Musique répétitive, musique planante, musique lancinante, musique addictive. Pur plaisir.


Atelier du Plateau
Rue du Plateau, 75020 PARIS
samedi 07 septembre à 20h


https://atelierduplateau.org/