SYLVIE COURVOISIER & MARY HALVORSON . Bone Bells

Pyroclastic Records

Sylvie Courvoisier : piano
Mary Halvorson : guitare

Ces deux musiciennes se connaissent, se comprennent mieux que bien et cela s’entend dès les premières notes. Leur musique est organique, dissonante et furieusement mélodique. Elle claque autant qu’elle caresse mais, gare à vous, elle a la caresse souvent rugueuse. Elle s’immisce dans les tréfonds du cerveau de l’auditeur avant même qu’il s’en soit rendu compte. Magiciennes ou sorcières (ou les deux), Sylvie Courvoisier et Mary Halvorson capte, capture, l’attention grâce à un univers pondéreux qui ne dissimule aucunement la finesse de leur travail. Leurs compositions, quatre chacune, ont l’audace des avant-gardistes. Elles sont complexes et singulières et toujours inventives. Bien qu’elles viennent d’univers différents, les deux artistes se retrouvent dans des intersections communes qu’elles explorent jusqu’à former un duo à une voix tant la fusion entre elles est patente. Ce disque est une expérience artistique au sens large de l’expression. On n’est pas toujours sûr de ce que l’on écoute ni pourquoi on l’aime et il est plus que probable qu’on le vive un peu malgré nous, mais grâce à elles. C’est pourquoi on les remercie. Et sachez qu’on a exactement une impression similaire en concert. Jouissif et vivement recommandé.


https://www.sylviecourvoisier.com/
https://www.maryhalvorson.com/


  F.TOULLEC + LA BANQUISE . Le bateleur, parades & variations

Gazul Records

Françoise Toullec, composition, Piano, piano préparé, objets
Claudia Solal : voix
Louis michel Marion : contrebasse
michel Deltruc : batterie, objets
Antoine Arlot, saxophones alto & baryton, électroniques, objets

Poèmes extrait des Bégaiements de Fabrice Villard

Françoise Toullec appartient à la catégorie des sans catégorie, les inclassables qui vivent d’audace et d’air frais, celles et ceux qui se consacrent à leur art comme un enfant à son jeu : hors du monde sans effort, entièrement livré à l’imaginaire. En l’occurrence, ce disque donne à ouïr un monde de rêveurs invétérés qui aiment construire dans le fragmentaire et l’insoupçonné puis vont réunir les pièces éparses et leurs variations afin de bâtir une structure qui, par nature, s’ouvre à tous les éléments. Grattements et grincements, ligne mélodiques inopinément ébauchées, quelquefois liquides, mélange des tons, des sons, des humeurs, cela s’arrange d’un regard, d’une envie. Certes l’auditeur doit être concentré pour entrer dans (et accepter) ce monde musical qui s’oppose à la normalité en épousant l’imprévisible et le fortuit, mais il a tout à y gagner, notamment un moment d’apesanteur salvateur, hors du temps et, qui sait, un réconfort aussi providentiel que des éclats de chocolat sur une tartine beurrée.


http://francoisetoullec.free.fr/


  JOHN ELLIS . Heroes

Blue Room Music

John Ellis : saxophone ténor
Mike Rodriguez : trompette
Gary Versace : piano
Reuben Rogers : contrebasse
Kush Abadey : batterie

Quand dans un line-up vous avez Gary Versace, Reuben Rogers et Kush Abadey, vous vous dites que ça va le faire, surtout si le leader est John Ellis dont on avait apprécié grandement le projet sur la Carmen de Bizet. Il nous restait donc à découvrir Mike Rodriguez (SF Jazz Collective) et l’on n’a pas été déçu. Le quintet développe un jazz très orchestral, faussement classique, qui swinguer quand il le faut. On retiendra prioritairement que les cinq individualités du quintet s’entendent parfaitement et renforcent, de solo en solo, le propos compositionnel du leader. C’est de la belle musique, plutôt écrit, et le dernier morceau sonne très New Orleans, avec un petit côté caribéen, quand ailleurs elle évolue entre swing et jazz plus contemporain. Le titre de l’album fait référence à quelques grands anciens auxquels John Ellis a eu envie de rendre hommage, John Coltrane, Ornette Coleman et Bill Evans entres autres. Un beau disque, très musical, fait par des musiciens de grand talent.


www.johnaxsonellis.com


  THOMAS NAÏM . may this be love

Rootless Blues

Thomas Naïm : guitare acoustique

Avec un petit grain de folie et beaucoup d’idées, de la technique et de l’inspiration, Thomas Naïm s’est attaqué au répertoire de Jimi Hendrix avec une guitare acoustique ; notez qu’il l’avait déjà fait par le passé en groupe (2020). Le résultat est superbe. On ne s’ennuie jamais ; le guitariste met sa virtuosité au service de la musique et celle d’Hendrix est si typique qu’on l’entend toujours quels que soient les chemins empruntés par le musicien, d’ailleurs, au-delà des digressions qu’il produit avec un goût sûr, il sait ne perdre la trame du morceau original. C’est donc mélodique, rythmé et minimaliste à la fois sans pour autant manquer de profondeur. Comme c’est en outre magnifiquement enregistré, les auditeurs amateurs de guitare se régaleront, les fans de Jimi Hendrix aussi.


https://www.thomasnaim.com/