Jeudi 06 mars 2025

Concert du trio AKA MOON à savoir Fabrizio CASSOL sax alto, Michel HATZIGEORGIOU guitare basse et et Stéphane GALLAND batterie.

Mené sur un train d’enfer quasiment à l’américaine ( on a à peine le temps d’applaudir entre deux morceaux qu’ils remettent le couvert direct ), le concert s’avère sans concession aucune à la facilité et pas plus à un répertoire connu, mémorisé et disponible sur les clouds individuels des présents. Donc ils font dans l’inouï. Ce qui saute aux oreilles dès l’entame, c’est qu’ils se connaissent comme les doigts de la même main qui jouerait d’une implacable mécanique humaine. Après l’intro a capella du sax, le thème, ou à tout le moins, la « phrase » commune, est jouée à l’unisson par le sax et la basse. On pourra remarquer que faire galoper les doigts sur le manche d’une basse, à la même vitesse que les doigts sur un sax alto, nécessite une agilité peu commune. Et le choc, oui, le choc, c’est l’arrivée des polyrythmies, polyrythmies qui glissent comme une coulée de caramel au beurre demi-sel : le bassiste tient la maison d’une poigne en fer augmenté pendant que le batteur fabrique des figures hallucinantes de virtuosité, de précision, d’inventivité et que le sax volute au-dessus de la mêlée si bien que chacun semble vivre sa vie rythmique de son côté quand le tout des trois, empilé, laisse sans voix. Comment font-ils pour ne pas se vautrer au milieu de cette complexité rythmique ?
La suite est du même acabit : ils semblent bénéficier d’une source d’énergie inépuisable et constante voire même en augmentation, sans doute un plutonium bio de la meilleure qualité ; le « thème » joué à l’unisson par les trois (oui, même le batteur ), des retours millimétrés à ce même « thème » après les soli : mais comment savent-ils que c’est pile poil là maintenant qu’il faut revenir à cette « phrase » commune ? C’est tordu au niveau rythmique, original, excitant, à peine croyable et il n’y en a pas un pour refroidir le mélange et temporiser. Le batteur et le bassiste se marrent comme des garnements qui se font des niches tout en jouant des figures hallucinées, chaque morceau sonne comme un morceau de bravoure, reléguant aussitôt le précédent aux oubliettes.
Le rappel pourrait servir de résumé au concert tout entier : un sax aérien, facile, au-dessus de la mêlée et une formidable battle entre le bassiste et le batteur, le premier façon guitar bass hero emporté dans un solo propre à altérer durablement la santé de ses mains, le second en dieu shiva avec des bras innombrables qui tentent d’expérimenter tous les possibles sur ses futs et cymbales. Moment héroïque où ces lascars qui fricotent ensemble depuis plus de trente ans arborent de mines de gamins ravis comme à leur première date.
Hénaurme concert, ambiance de feu, très grand plaisir.


Le Triton - 11 bis rue du Coq Français, 93260 Les Lilas
https://www.letriton.com/