Mercredi 19 mars 2025

Tony Malaby : saxophone ténor
Jozef Dumoulin : piano et claviers
Samuel Ber : batterie

Hier soir, sur la scène du Périscope, Tony Malaby, Jozef Dumoulin et Samuel Ber étaient en suspension. Au dessus de quoi ? Des vicissitudes d’un monde brinquebalant ayant perdu de vue son intelligence humaine native. Eux, ils évoluèrent au fil d’une onde sonore riche de petites et douces surprises. Le saxophoniste s’occupa du flot, le claviériste et le batteur se consacrèrent aux miroitements. Sur des compositions du batteur liées à des moments d’improvisations collectives parfaitement équilibrés, ils développèrent un ensemble de sensations musicales organiques propices sinon au recueillement, à coup sur à la méditation mélodieuse. Ainsi surgirent des paysages liés à la rivière, à l’infinitésimal écoulement d’un temps comme libéré de ses contraintes ; la discrète densité de leur musique n’empêcha pas que je ressente avec une quiétude limpide les scintillements multiples qui sublimèrent leur propos. De facto, ils allégèrent le poids du monde sur les épaules endolories d’un public pas aussi nombreux que je l’eusse espéré. Tant pis pour les absents. Samuel Ber, tout en légèreté et en souplesse sur ses fûts comme sur ses cymbales raconta des histoires changeantes, ondoyantes, que le silence aima. Jozef Dumoulin, d’un clavier l’autre, instaura de ces climats marquetés dont il détient le secret. Entre les deux, Tony Malaby avança sur le fil des histoires, les nourrissant de sa vision, fruit d’un talent (immense) nourri au fil du temps, et d’une créativité aussi lumineuse que fédératrice. Je ne vous parle même pas de l’écoute mutuelle qui leur permit d’assembler avec une habileté déconcertante les phrases du discours car, aussi évident fut-il, il n’en demeura pas moins d’une profondeur et d’une substance quintessenciées à l’abondance raffinée. Des concerts comme celui-ci s’assimilent à un don, un geste gratuit entre humains résilients, heureux de l’être quelles que soient les secousses (et autres tremblements) abîmant l’horizon ; à cette aune, se décaler par la musique demeure une aventure et un engagement : une résistance. C’était un mercredi 19 mars, jour qui vit en 1919 la publication à Paris du premier numéro de la revue Littérature, créée par Louis Aragon, André Breton et Philippe Soupault. Ces trois-là, terme d’engagement et de pas de côté, ils étaient plutôt bons, non ?


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