Samedi 29 mars 2025

Paul Jarret : guitare
Philipp Gropper : saxophone
Etienne Renard : contrebasse
Sun-Mi Hong : batterie


Adrien Sanchez : saxophone
Maxime Sanchez : piano
Florent Nisse : contrebasse
Gautier Garrigue : batterie


L’autre jour au Crescent, même si les programmateurs nous offrirent deux plats de résistance le même soir, ce ne fut toutefois pas une soirée cochonnaille ! Mais j’aime écrire des conneries, d’où le titre de cette chronique. Pourquoi se priver ? Il y eut donc d’abord le quartet défini comme européen de Paul Jarret. Je connais ce dernier et je sais qu’il évolue dans un univers musical qui n’appartient qu’à lui, ce qui est plus que méritoire, d’autant qu’il se contrefiche des codes. De facto, ce fut « prenez ce que je vous donne et débrouillez-vous avec ». Les concessions, c’est pour les autres. La musique s’étira comme le voulut le quartet. Dans des ondes plus ou moins accessibles aux auditeurs, elle eut toujours le mérite de surprendre, d’interroger, voire de déstabiliser les moins aguerris. Mais qui oserait se plaindre d’une exigence musicale réellement originale quand l’industrie du secteur se vautre dans un conformisme insipide ? Pas moi. Entre plages tirant sur le free et clins d’œil mélodiques itératifs, entre soli et brisures rythmiques (avec quelques onces éphémères de rock un tantinet progressif), les quatre musiciens initièrent des climats protéiformes, largement ouverts sur des espaces structurellement fluctueux. De quoi se perdre dans l’attente d’un signe qui ne venait que travesti par l’art musical du groupe. Chacun prit sa part dans cette élaboration processussuelle et à ce jeu, la batteuse sud-coréenne fit montre d’une capacité à varier les angles, à cheminer entre les ombres, tout à fait convaincante. Les autres étant à son niveau, je passai donc un excellent moment quand une partie du public m’apparut, elle, un peu plus rétive à l’univers exposé. Un petit conseil : arrêtez de vous de vous posez des questions sans réponses, fermez les yeux et laissez-vous aller. La musique, quand elle est intelligente, fera le reste.

Puis vint, le tour du quartet déjà ancien dénommé Flash Pig qui joua principalement les titres de son dernier album In the mood for love, album qui reprend la bande originale (et même un peu plus) du film éponyme de Wong Kar-wai. Là, je vous l’avoue, je tique un peu quant à cette mode qui voit nombre de jazzmen s’appuyer sur la musique des autres pour en donner leur version afin d’asseoir leur originalité. Quelques classiques y passent très souvent, Jean Sébastien en tête, quelques pop stars aussi, Joni Mitchell tient la rampe, et même si c’est toujours goûteusement réalisé, je m’interroge sur la créativité native de l’artiste qui devrait en premier lieu s’exprimer. Ceci dit, Flash Pig est un quartet soudé par le temps et leur travail sur les thèmes choisis par le cinéaste ne souffrit aucune critique. Finesse et profondeur furent au rendez-vous dans une ambiance quelque peu jarrettienne et cela convint à toutes et tous. Ne manquant pas d’humour, ils donnèrent en rappel le I’m in a mood for love de McHugh et Fields (1935), histoire de rester dans leur thématique. Je vous conseille d’ailleurs la belle version enregistrée par Julie London en 1955 [1]. C’était un 29 mars, jour qui vit en 1871 l’inauguration du londonien Royal Abert Hall. Ce même jour naquit en 1902 Marcel aymé ; j’ai malgré tout pris mon carrosse pour rentrer et non sa jument verte. Faut pas déconner non plus ; avec le changement d’heure, quand m’aurait-elle ramené au bercail ?


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[1Sur l’album Julie is her name avec Berney Kessel et Ray Leatherwood - https://www.youtube.com/watch?v=-Oulb9k6lmw&list=PLJ-ViTZrvg2x3LP09xnCihYMYhzODayA-&index=3