Quatre disques, quatre mondes
Hubro
Erland Dahlen : drums, drum machine, frame drum, steel drum, log drum, marching toms, xylophones, dulcimer, musical saw, Schulmerich handbells, blossombells, triangle, metal plates, and vocals
David Wallumrød : Minimoog, Prophet 5, Arp Pro Soloist and Juno 60
Sanskriti Sheresta : tablas and vocals
Mats Eilertsen : acoustic bass and vocals
Jo Berger Myhre : Fender VI and Moog Minitaur
Nils Petter Molvær : trumpet
Geir Sundstøll : pedal steel, National duolian, Shankar guitar, six string bass, timpani, optigan, harmonica, cümbüs, guitar banjo, mandolin, Prime Time loops, Lexicon organ, Moog Minitaur, marxophone and pianochordia.
Revoilà Geir Sundstøl et son univers musical atypique (ou typiquement nordique et hubrosien…). Avec ces alliages de timbres si particuliers, sa technique de copier / coller et son goût marqué pour les intrigues à connotations flottantes, il livre, accompagné par quelques cadors de la scène norvégienne, un magnifique disque offrant à l’auditeur des paysages aussi cinématographiques que musicaux, amples et toujours irisés. Totalement original dans les sonorités qu’il allie, la base de son cheminement créatif selon nous, il demeure hors de tout genre, inclassable, et doté d’une capacité à véhiculer des émotions (musicales) fortes et durables. Geir Sundstøl, presque plus qu’un musicien, est un monde en soi, fourmillant d’idées, éthéré et intense à la fois, nourri de mélodies toutes plus belles les unes que les autres, entre western crépusculaire et romantisme sombre à l’anglaise, à moins que ce ne soit que l’expression septentrionale de sa Norvège natale. Allez savoir. Ajoutez à cela une densité humaine palpable à tout moment (on dit communément « un supplément d’âme ») et vous obtenez le plus beau disque que nous ayons écouté cette année (et ce n’est pas faute d’en recevoir par paquets de douze). Au risque de nous répéter, on se demande bien pourquoi ces artistes ne sont jamais programmés (ou si rarement) en France. Absolument indispensable
https://sundstoel.bandcamp.com/album/sakte-film
Vision fugitive
Philippe Mouratoglou : guitare
Bruno Chevillon : contrebasse, voix
Ramon Lopez : batterie
Si vous aimez la poésie musicale, la précision et l’inspiration, l’interaction alchimique entre les musiciens, le nouveau disque de Philippe Mouratoglou est fait pour vous. Brillamment accompagné par le contrebassiste Bruno Chevillon et le batteur Ramon Lopez, le guitariste développe un univers fait de respiration intime et d’amplitude à la souplesse sinueuse posées sur une rythmique fine et exaltante. Pour reprendre la note d’intention, tout dans cet album est aérien et tellurique à la fois. Habitée par une pulsion essentielle, la musique du trio regorge de vitalité et peut, entre deux séquences en clair obscur, se laisser aller à une expressivité débridée et ouverte du plus bel effet. Bien qu’il se qualifie lui-même de guitariste classique (et c’est le cas), ses incursions dans la musique improvisée sont régulières et toujours remarquables. Ce trio virtuose le démontre parfaitement et l’on ne s’ennuie pas un instant. Recommandé.
https://www.philippe-mouratoglou.com/fr
Aztec Musique
Alain Jean Marie : piano
Mario Canonge : piano
Ce disque est une nouveauté qui date ! Enregistré en concert à l’Olympia en 2009, on se demande bien pourquoi il a pris la poussière dans un tiroir pendant un quinzaine d’année… Comprenne qui peut. Une chose est certaine, c’est de jazz caribéen qu’il s’agit puisque l’un est né en Martinique et l’autre en Guadeloupe. La rencontre est fructueuse, car au-delà des leurs origines respectives, l’amour du jazz les réunit et il est plus que prégnant dans disque. Tous deux emblématiques, même si Mario Canonge est moins cité dans les médias (à tort), ils mêlent leurs particularités et leur originalité et cela aboutit à un disque puissamment rythmique, mélodique en diable et parfaitement lumineux, la virtuosité musicale qui les unit faisant le reste. La connivence est bien réelle entre les deux pianistes et elle ravira l’auditeur d’un bout à l’autre de l’album.
DiscMakers
M. Alex Ramírez, Gideon Forbes : alto, flute
John Lowery, Nathan See : saxophone ténor, clarinette
Kenny Pexton : saxophone baryton, clarinette basse
Sam Hoyt, Bobby Spellman, Dave Smith, Joey Kendrick : trompette, bugle
Nick Grinder, Sam Blakeslee, Greg DeAngelis : trombone
Julie Dombroski-Jones : trombone basse
Andrew Boudreau : piano
Jacob Aviner : guitare, fx
Eduardo Belo : contrebasse
Jongkuk Kim : batterie
Catey Esler : chant sur This Is The Way Down
Jorge Esquinca : Spoken word
Poèmes extraits du livre Descripción de un brillo azul cobalto by Jorge Esquinca. Editorial Pre-Textos, 2008.
Description of a flash of cobalt blue. English translation by Dan Bellm. Unicorn Press, 2015.
Sortie le 6 juin
Nous aimons bien les musiciens qui rendent hommage aux poètes car par les temps qui courent la poésie est plus que nécessaire. Ce qui nous gène, c’est que les dits poètes sont morts et enterrés depuis longtemps. Dans cet album d’Ines Velasco, batteuse et cheffe d’orchestre mexicaine installée à Brooklyn, c’est le poète, lui aussi mexicain, Jorge Esquinca (1957) qui est mis à l’honneur et c’est lui qui dit six de ses textes. De la poésie plus que vivante donc, qui se lie à une compositrice et son orchestre et développe sa forme littéraire dans un espace musical créé pour elle. Le big band d’Ines Velasco est une belle machine, bien huilée, dans la tradition de Gil Evans et, plus près de nous, de Maria Schneider. Les interventions des solistes sont impeccables, les mélodies épousent le rythme poétique de Jorge Esquinca et l’ambiance générale est apaisante. Aucun excès, pas de brutalité, dans ces compositions qui privilégient la finesse et l’expressionnisme. Il est temps de découvrir le travail d’Ines Velasco.