Quatre disques de jazz aux saveurs variées
Jazz Family
Julien Ndiaye : saxophone ténor
Frédéric D’Oelsnitz : piano
Gabriel Pierre : contrebasse
Laurent Sarrien : batterie
Tout est dans le titre ! Julien Ndiaye ne s’en cache pas, son maître spirituel n’est autre que Coltrane, le gars que tous les saxophonistes ténor essayent d’égaler depuis 1967. Il y en a même qui rêvent de le dépasser, on les appelle les incorrigibles optimistes. Ce qui est bien avec Jultrane, c’est qu’il donne l’impression de jouer les compositions du maître comme il l’aime, passionnément. Le quartet ne manque donc jamais d’intensité et donne à ouïr ce jazz des hautes sphères marqué d’intemporalité qui propulsa le ténor de Detroit là où il vit depuis, dans un espace interdit au commun des mortels. On se laisse donc prendre sans effort et avec contentement par la musique initiée par le quartet ; les plus aventureux (à l’aune du rêve) pourront même oublier ou presque l’incontournable ancêtre et maître des cieux musicaux à l’origine du projet. C’est un disque empreint d’une admiration sincère qui ne tombe pas dans le bigotisme niais. A écouter.
Unit Records
Yonglee : piano, claviers, compositions
Youngwoo Lee : synthétiseur, électronique
Yechan Jo : guitares
Hwansu Kang : basse
Dayeon Seck : batterie
Oops ! Une faille temporelle nous a ramenés dans un passé jazz rock progressif. On a croisé Al Di Meola en elegant gypsy, Larry Coryell et bien d’autres : un retour à l’éternité lors d’un bulletin météo ou presque. Et si l’on convient volontiers que ce quintet coréen ne manque pas d’idées et qu’il les exprime musicalement avec un bel aplomb, on ne peut s’empêcher d’entendre de grands anciens dont la présence en filigrane est un peu trop prégnante à notre goût, ce qui n’ôte rien aux qualités intrinsèques de l’album mais l’inscrit dans un espace stylistique quelque peu passée de mode aujourd’hui. Ceci dit, les musiciens œuvrant sur cet enregistrement vont au turbin avec audace et crânerie et prennent à l’évidence grand plaisir à explorer hardiment les bordures entre deux lignes mélodiques imparables et une rythmique fine mais très présente. Avec quatre décennies de moins et une méconnaissance complète du jazz rock, nous aurions été étonnés. Pour le coup, nous avons sans honte vécu un bon moment de nostalgie, celui d’une époque où les lendemains avaient encore un peu d’avenir. Peace and love.
https://www.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_nQKKJFcQWBaMNyy-ioJdkKmjn1wWhS8LI
Buddham Jazz
Gregory Privat : piano
Jacques Schwarz-bart : saxophone ténor
Tous deux natifs des Antilles, tous deux nés un 22 décembre à 22 ans d’écart, ils ont naturellement intitulé leur album en duo 22. Passés ces détails anecdotiques et amusants, l’essentiel de ce disque est dans sa musique. On peut écouter là deux artistes dialoguant en symbiose autour de thèmes originaux qu’ils sont à même de magnifier par la justesse de leur jeu et l’inspiration qui les porte. Tous deux en accord sur les lignes aiment à enrichir leur propos de digressions on ne peut plus jazz alors que leur musique est riche d’influences, notamment celles de leurs terres originelles. Cela offre à l’auditeur une sorte de panorama musical à la vastitude et à la richesse non feintes au sein desquelles s’exprime avec ardeur et chaleur une passion commune (vous devinez laquelle). Le métissage possède en propre une vertu cardinale, c’est la tolérance. Quand elle est musicalement sublimer par des artistes de haut niveau, cela donne un duo comme celui-ci. Évitez de passer à côté.
https://www.instagram.com/jacques_schwarzbart/
https://www.gregoryprivat.com/
Jazz Family
Katerina Pipili : Voix, compositions
Tommy Scott : Piano, Rhodes
Gabriel Pierre : Contrebasse
Pierre-Alain Tocanier : Batterie
Adriano Tenorio : Percussions
Joël Chausse, Roman Reidid : Trompette
Louis Chevé-Melzer : Saxophone ténor
Cyril Galamini : Trombone
Née en Grèce, passée par les États-Unis avec de s’installer en France, Katerina Pipili a beaucoup étudié et c’est fort de ses acquis qu’elle propose ce disque de jazz flirtant avec les genres. Les morceaux de l’album, tous écrits de sa main, délivrent des mélodies fort agréables. Comme en sus elle est bien accompagnée et que le groupe et les invités la jouent très carré, rien n’empêche l’auditeur de prendre un plaisir auditif conséquent. C’est un peu jazz et swing ici, funk et groovy là, mais toujours parfaitement mené. La voix de la leader est claire et ronde à la fois, précise et dotée d’une énergie intrinsèque qu’elle gère parfaitement (autrement dit, elle n’en fait jamais trop). Au final, c’est enregistrement qui évite l’écueil du « easy listening » grâce à un travail de fond évident et une cohésion de groupe de la même veine. Faites-vous une idée.