Lenny Popkin, héritier de Lennie Tristano, en concert à Paris en septembre 2012 et sur un disque tout juste paru...
Dans les arts éphémères, l’apprentissage se fait par imitation et le public espère que les fils reprennent le style familial pour continuer d’en profiter.
En jazz, les écoles n’enseignent que des moyens techniques et les musiciens qui en font des manières de jeu disparaissent vite ; il n’y a d’école stylistique que sous la plume des critiques. Les styles artistiques sont créés par des individus et ne se transmettent pas tels quels. Si des “fils de” réussissent, c’est à leur propre compte, comme Ravi Coltrane ou Joshua Redman. Il y a pourtant une exception.
Lennie Tristano (1919-1978) a effectivement formé des musiciens comme Lee Konitz, Warne Marsh ou Lenny Popkin. Ce dernier s’est produit récemment à Paris, avec Carol Tristano, fille de Lennie, qui joue de la batterie, dans un style au fond assez peu tristanien ; on sait que le maître souhaitait que les batteurs et les bassistes se contentent de marquer le tempo, d’une manière quasi-métronomique ; sa fille, tout en ayant un jeu discret et impeccable rythmiquement, ne se prive pas d’user des possibilités de marquer les rythmes de son instrument et délivre également des solos, qui ne tombent pas dans les travers expressionnistes des batteurs, conservant toujours la marque du rythme.
Gilles Naturel marque le tempo imperturbablement en pizzicati et occasionnellement joue de l’archet parfaitement pour exposer des thèmes ou improviser -trop brièvement- en contrepoint avec Lenny Popkin. La contrainte du trio fait que ces deux instrumentistes prennent des solos à chaque pièce, ne serait-ce que pour permettre au souffleur de se reposer.
Lenny Popkin (1941) joue essentiellement un répertoire de standards, les thèmes ne sont que brièvement présentés -seul “After you’ve gone” a été joué intégralement-, puis le soliste laisse libre court à son imagination harmonique, avec un son rond dans l’aigu de l’instrument, improvisation qui s’interrompt soudainement quand la grille est terminée, sans rien qui l’annonce, provoquant un effet déconcertant pour l’auditeur.
C’est une musique sereine où soudain quelques sauts d’octave ou une sonorité plus dure, rappellent tout l’effort accompli vers la paix intérieure.
On pourra la retrouver dans le disque récemment paru de Lenny Popkin, “Time Set” (Paris Jazz Corner/Lifeline), une fois passées les quatre pièces classiques (Bach et Ockeghem) en re-recording, bien empesées.
Sunside, samedi 21 septembre 2012 : Lenny Popkin (saxophone ténor), Gilles Naturel (contrebasse), Carol Tristano (batterie).
À écouter :
Lenny POPKIN : "Times set" Paris Jazz Corner / Lifeline Records LR 103 CD Lenny Popkin : saxophone ténor / Gilles Naturel : contrebasse / Carol Tristano : batterie 01. Fuga a 4 in C Minor (JS Bach) / 02. Gloria from the Missa Mi-Mi (J Ocheghem) / 03. Paeludium in C-Major BWV846 (J-S Bach) / 04. Circular Logic / 05. Call / 06. Andromeda / 07. Play / 08. Time Set / 09. Salon / 10. Danse > Liens : |
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