Pour le 29ème épisode de la série des concerts "Jazz Fabric", le Grand Ensemble KOA était sur la scène du Carreau du Temple (Paris).
Neuf mecs. Neuf mecs distribués en un quartet de souffleurs : Armel COURRÉE sax alto, Matthieu CHÉDEVILLE sax soprano, Jérôme DUFOUR sax ténor et Pascal BOUVIER trombone et un quintet avec un trio au centre du nonet et de la scène : Samuel MASTORAKIS vibraphone et Daniel MOREAU claviers, Alfred VILAYLECK guitare basse, compositions et une paire : Matia LEVRÉRO guitare et Julien GRÉGOIRE batterie. Comment vont-ils se sortir de cette redondance vibra-clavier-guitare ?
Histoire de situer là où ils s’installent, ils débutent par Over the top. Une belle opposition entre les souffleurs et les travailleurs des mains, la voix grave du trombone qui magnifie le son des sax, un équilibre subtil qui fait la place à une incursion oune poco électro au Fender (et bidouilles) et à la basse ( Marcus Miller en référence ? ). Ça balance, ça riffe, c’est en place, relâchez-vous les mecs, tout va bien.
La première partie du Pardon Infini met en valeur le vibraphoniste : intro et long solo qui ne sont pas sans évoquer Milt Jackson et son Pyramid ( 1960 ? déjà ? ).
L’accorte créature du bar ( un voisin de picole la dit « étonnante » ) a fait la promotion de la bière artisanale et survendu la pression du jour en parlant de son amertume contrôlée. Et, jusqu’à cet instant, KOA donne cette impression de contrôler sa musique : contrôler, c-à-d s’appliquer, bien jouer, faire là où on dit de faire et ne pas sauter dans la flaque pour éclabousser ses voisins.
Avec la seconde partie du Pardon Infini, ah ah ah, ils ont entendu la remarque subliminale : les vents ventent et les autres clapent clapent clapclapent avec mains et bouches. Une histoire se développe devant nous, une histoire avec au moins deux entrées ( une promesse/des qui-y-croient), une histoire glauque qu’il va bien falloir éclaircir. En cours de route, le trio batterie-fender-basse s’offre une relecture du classique trio acoustique ( en mieux ). Il semble que l’histoire se résume à : qui a volé le pin’s de Gattaz « 1 million d’emplois » ? Où sont passés les emplois promis ?
Ils persévèrent dans leur enquête avec La danse de l’insoumis. Le ténor et l’alto lancent les hostilités avant une incursion dans la cacophonie du hors piste, ordre et désordre, contrainte et liberté, insoumis-un soumis. Ils prennent leur temps, explorent, tentent, s’éloignent, reviennent. Les mains vides.
Et puis, Ahimsâ, titre éponyme du CD du jour, se développe sur un ostinato implacable des piano-vibra-guitare. La remarquable mise en place rythmique donne toute liberté aux solistes selon le vieil adage policier, plus tu te sens en sécurité, plus tu te sens libre ( d’obéir ). Ahimsâ, (ndlr : la non-violence ), clôt cette histoire sordide de promesse non tenue : on n’a arrêté personne, on ne saura jamais, c’est comme ça Lucette, les riches niquent toujours les pauvres.
On les rappelle of course. Histoire de goûter encore une fois l’écriture et les arrangements soignés.
Demain, on fêtera le 5è anniversaire de la catastrophe de Fukushima, ce fraternel partage de nucléides dans l’atmosphère et les mers ( sauf en France, bien sûr, grâce à nos frontières étanches ).
KOA ? KOA ? Qu’essses-tu dis ?
Jeudi 10 mars 2016
Le Carreau du Temple
2 rue Perrée
75003 Paris