Deux soirées marquantes...

Mercredi 29 juin 2016

Erik Truffaz
© Marceau Brayard - 2016

Sur Lyon nous connaissons le trompettiste Erik Truffaz depuis longtemps. Peut-être que sa naissance en Suisse a été déterminante pour une adoption de cœur chez nous avec cette proximité frontalière. En fait ses présences dans notre localité furent souvent marquantes au Festival Fort en Jazz de Francheville. Il aura juste fallu l’arrivée d’une toute nouvelle municipalité sans états d’âmes et peu scrupuleuse à l’endroit de la culture pour supprimer sans vergogne cette manifestation, à la manière d’un chien qu’on abandonne sur le bord de l’autoroute à la veille des grandes vacances.
C’est dire le plaisir que l’on peut ressentir à l’approche de la capitale de la résistance, que cette perpétuation de la tradition soit reconduite pour permettre au Jazz d’exister ailleurs malgré cette exclusion locale stupide.
Avec toutes ces motivations nous retrouvions Erik Truffaz comptant sur lui pour nous faire voguer sur un statut d’extraterritorialité où l’évasion allait ostensiblement s’ouvrir à l’imagination sans limite.
Sa musique fut une véritable contamination pour le pacte sensoriel. A elle seule elle endiablait l’habillage atmosphérique, même si dans le même temps un déluge s’organisait dans une continuité résolue sur les spectateurs. Le personnage dispose d’une telle facilité d’accès, qu’il transportait son dispositif dans un partage glorieux. Il se rapprochait des esprits, en quête d’un ailleurs situé entre la clef des songes et le parcours onirique. Sans entrave il se propageait dans cette justesse de ton ou l’embrasement vous transportait avec lui, aux confins du soulèvement des délivrances pulsatiles.
Ce soir, une fois encore sa trompette prit la tangente pour ne pas tomber dans les formules aux continuels ronflements. Son instrument nous lançait au contraire des signes lumineux aux scintillements bruissant pour mieux venir épier notre résistance au silence.
Benoit Corboz nous inondait de sa conception fulgurante, nous le suivions lui et ses claviers électriques aux lueurs vibrantes.
La batterie d’Arthur Hnatek se saturait d’éclats, pour se débattre au rythme de l’exploit de ne pas sombrer dans le chaos rythmique ombrageux.
La basse de Marcello Giuliani restait à elle seule un réservoir incontournable pour propulser une quantité de formulation remplie d’agitations sédimentaires.
Oxmo Puccino pouvait faire irruption dans ce dédale en y incorporant des proclamations digne d’un lanceur d’alerte. Sa voix s’éclairait pour ranimer la parole d’une cité imaginaire. Les mots jaillissaient outrageusement dans une externalisation semblant résulter d’une expulsion issue du ventre de la terre.
Le cadre de cette musique nous démontrait qu’elle ne pouvait se laisser encager dans une formule d’étiquetage. Il ne valait mieux pas sous-estimer l’impact que recelait le corps de ce volume pour le goût des errances à la noblesse stellaire.
Il pleuvait ce soir-là mais qu’importe. Grâce à cet aspect tempétueux de dame nature nous avons pu traverser les rivages avec des allures de sans domicile fixe. Ce caractère donnera aux musiciens une appétence à suivre ardemment cette grande transhumance cosmique.

Mercredi 13 juillet 2016

Rémi Fox
© Marceau Brayard - 2016

Il nous arrive quelquefois de nous retourner dans la rue pour vérifier la première impression croisée. Il en va de même pour ce que l’on entend, quand le spectacle vous fait face et que vous n’avez aucune raison de vous retourner, qui plus est lorsque vous êtes à cet endroit muni d’un boîtier à la main et de son objectif idoine.
La partie nocturne du festival consacre son ouverture à un groupe. Celui-ci dispose d’un passage réussi devant un jury pour recevoir ensuite un prix. En fait ce n’est pas cela qui nous a poussé jusqu’ici. Simplement une curiosité de plus devant l’inattendu, plutôt qu’une attirance pour ce genre de scénario avec son bon point à la clef de la réussite. Le seul avantage notoire consistera ici de permettre aux musiciens d’enregistrer un album. La victoire de ce Tremplin ouvre donc la perspective de débuter la soirée devant un théâtre antique en plein brassage avec l’arrivage de spectateurs. Il faut bien savoir que cet exercice n’est pas forcément une réussite à juger certaines éditions.

Nicolas Fox
© Marceau Brayard - 2016

En cet instant avec le recul nécessaire nous savions que nous croiserions un groupe à part compte tenu de toutes les inepties entendues l’année précédente. En toute objectivité nous foncions droit devant pour aller vérifier une fois de plus les divers préjugés légendaires de certains spécialistes du style. Autant vous dire à présent que l’envie de se retourner sur nOx.3, après leur passage, ne devrait pas juste s’opérer pour éviter les rayons d’un soleil couchant.
On se laissait facilement ensevelir sous l’ensemble des éruptions où nous devenions à partir de là les destinataires attentifs. Nous attrapions les notes comme bon nous semble, puisqu’elles nous étaient formulées par moment selon une vraie cadence authentiquement puissante de conviction. Nous les suivions accoudé à la scène en observance de ce paysage musical accompli. Celui-ci venait migrer dans nos esprits avec cette donnée évocatrice. Elle nous plongeait dans des enfouissements enchevêtrés, que la libération instrumentale se chargeait de faire émerger. Ils savaient faire parler les instruments selon la méthode combinatoire propre au trio, en y réalisant un récit échappé d’un rouage non consensuel, qu’ils parvenaient à faire insinuer sur des démarrages fictionnels fructueux. Ils alternaient différents rythmes pour approfondir l’aboutissement des phases conclusives.

Matthieu Naulleau
© Marceau Brayard - 2016

L’attelage en question déclinait maintes déductions pour venir s’arrimer à notre perception. Pour cela ils s’enfuyaient vers toutes les occasions dans lesquelles aucune limitation n’intervenait. Ils s’évertuèrent à équilibrer tous les effets de la continuité dans une action effective.
Si d’ordinaire la créativité a besoin de temps pour se décaler du réel, ce Jazz-là n’attendait pas le nombre des journées nécessaires. Ils représentaient à trois, Matthieu Naulleau au piano, Rémi Fox aux saxophones, Nicolas Fox à la batterie, un bloc solidement cohérent et lucide.
Le Jazz a de beaux jours devant lui parcouru d’une telle soif incorruptible.

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