Le pianiste Pierre de Bethmann invitait son ami saxophoniste David El Malek à se joindre à son trio dans le cadre des concerts "Jazz dans les Foyers" au Théâtre de Caen le 17 décembre.
> "Jazz dans les Foyers" - Théâtre de Caen, samedi 17 décembre 2016.
La mécanique des flux [1]
À l’origine, il y a Prysm, découvert à ses débuts dans un célèbre club parisien (Duc des Lombards ?) en compagnie de (et grâce à) notre vieille connaissance Christian Ducasse. Il y avait là toute l’énergie, la vitalité de la jeunesse et de son incarnation Pierre de Bethmann entouré du batteur Benjamin Henocq et du contrebassiste Christophe Wallemme. La naissance d’une formation ou d’un musicien demeure toujours -à nos yeux- une expérience émouvante. Et lorsque la musique est là...
Les années de Prysm passent et le leader crée son propre trio avec Sylvain Romano à la contrebasse et Tony Rabeson à la batterie : deux noms qui nous sont familiers..
Entendus à diverses reprises mais sans les avoir revus sur scène, le pianiste et ses musiciens invités dans le cadre de Jazz dans les foyers donnaient lieu à des retrouvailles attendues.
Deux temps à ce concert l’un en trio, le second en quartet.
Dans le premier, nous reconnaissons l’art du pianiste à improviser au gré de sa fantaisie, son plaisir de jouer et une indéniable virtuosité.
En outre, ses qualités se révèlent d’autant plus qu’il reprend des standards à son compte : un thème de Monk, une valse musette et une chanson de variété.
Tout cela séduit. Tout cela emporte la conviction. Beaucoup d’allant lié à beaucoup d’invention et une vraie générosité. On peut néanmoins penser que cet hommage au pianiste Monk par le biais de l’une de ses compositions, tout convaincant soit-il par sa vélocité, contrevient à la musique de celui qui n’aimait rien tant que les silences ! Reproche qui vaut moins pour les deux titres suivants, plus à même d’être l’objet d’une réinvention. On touche peut-être bien néanmoins -sinon les limites- du moins la systématicité de l’écriture pianistique du leader du trio.
L’invitation faite, dans un second temps, au saxophoniste David el Malek sur la base de compositions personnelles vient le confirmer. Là encore, tout cela fonctionne bien, la qualité des solistes n’est pas en cause mais la virtuosité technique et harmonique ne sauraient à elles seules tenir lieu d’écriture personnelle. De plus -mais c’est là une interrogation qui excède notre pianiste- il y a quelque chose d’étonnant à ce que d’excellents solistes de jazz s’érigent systématiquement tous -ou presque- en compositeurs. Tant de musiciens en compositeurs inspirés ?
Le pianiste-compositeur convainc moins en effet.
Le public quant à lui a surtout retenu le dynamisme, la générosité et la loquacité de l’ensemble à l’image de son leader décidément très en verve ce samedi après-midi là.
Pierre de Bethmann : piano / Sylvain Romano : contrebasse / Tony Rabeson : batterie /+/ David el Malek : saxophone ténor.
[1] Emprunt de l’intitulé d’un film récemment distribué dans les salles.