Une paire d’AS

Enregistrement live à l’Atelier du Plateau par cette chaude journée de printemps estival. Il y en a qui vont regretter de ne pas s’être décollé les miches de la terrasse où ils sirotent un punch happy hours en matant la tendance déshabillée du jour. Comme le dit Monniot, nous sommes un peu plus qu’eux deux... L’offre culturelle du soir est telle que l’ubiquité va devenir une nécessité à moins qu’un hologramme mélenchonien ?
Aux sax alto et soprano Christophe MONNIOT, à l’accordéon Didier ITHURSARRY.

Christophe Monniot

Avec un genre d’Ouverture Sicilienne que pratique Ithursarry avec maestria, on perçoit des relents de la Czardas de Monti, mais non, rien que des échos. C’est tout simple, sans fioritures. Ils nous préparent le mental.
Et c’était bien nécessaire parce que, avec Biguine pour Sou Shi, Monniot lâche le monde de la variation ordinaire pour explorer les couches élevées de la stratosphère de l’improvisation. Ithursarry qui n’est rien moins que le plus magnifique des sidemen, celui qui fait penser à son acolyte qu’il aime chacune de ses phrases, se fend d’un solo qui non seulement renvoie des bribes du précédent mais l’amplifie.
Ils nous baladent de Duke Ellington à Georges Bizet et entre les deux, jouent un morceau d’Ithursarry, une musique pour danseurs bulgares expérimentés, musique qui boîte et invite à des sautillements particulièrement inaccoutumés. C’est carrément virtuose et casse-gueule.
Et puis, of course-bien sûr-entonces, comment jouer de la boite à frissons sans passer par une de ses valses emblématiques ? Ici, Passion de Tony Murena. Monniot narre l’histoire de ce musicien qui dédie cette œuvre à sa femme et, beaucoup plus tard dans leur vie, en écrira une autre, célébrissime, dédiée à la même femme : Indifférence... Tout est dit.

Didier Ithursarry

Donc Passion ou comment transformer une œuvre de musique du patrimoine en musique contemporaine. Ces incroyables interprètes la revisitent au point d’en faire une version d’anthologie. Ithursarry y va d’un immense solo qui laisse pantois et pantelant.
Ils ajouteront un vieux thème que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître et qui, lui aussi, s’est fait refaire le nez, les oreilles et les bajoues dans une version inouïe et unique : Espana Cani. Qui se souvient de ce paso-doble ? Qui l’a dansé ?
Entre musique de baluche et musique de salon, un périple qui passe de la simplicité à la plus absolue des libertés.
Vivement le CD dans les bacs pour des ré-écoutes jouissives.

Mercredi 17 mai 2017
Atelier du Plateau
Impasse du Plateau
Paris 19è