joue son CD Singular Insularity

2 septembre 2020

Premier concert live depuis six mois, six mois pires qu’une cure de désintox aux addictions ordinaires de la vie ordinaire. Réjouissons-nous, il s’agit d’un virus et pas d’une catastrophe nucléaire. Pas encore. Ce n’est pas carnaval mais tout le monde entre masqué dans la salle et une accorte créature invite les solitaires à user des chaises, les petits groupes à user des tables avec la distance qui va bien.

Le quintet de Olivier Ker Ourio, harmonica et compositions, réunit Grégory Privat au piano, Gino Chantoiseau à la guitare basse, Arnaud Dolmen à la batterie et Inor Sotolongo aux percussions pour présenter ce soir son nouvel album "Singular Insularity".
On pourrait lire le concert comme un voyage aller-retour. L’aller met en valeur Ker Ourio bien sûr mais aussi Gregory Privat avec des solos solides, structurés, originaux et Arnaud Dolmen qui tricote avec discrétion et finesse un soutien rythmique tout à fait réjouissant. Il joue devant et à côté, souligne, surligne, reformule, devance. Pas de vantardise, pas de regardez-écoutez-moi mais une discrétion de bon aloi qui fait feu de tout le bois des baguettes avec une inventivité dont ne sont pas dotés les conseillers de nos gouvernants.
Par ses dialogues soutenus, le duo batterie-percus instille une ambiance sudistîlienne et fait monter la tension d’un morceau à l’autre jusqu’à l’acmé qui sent sa séquence de santeria : il y a du vaudou dans l’air, pas besoin de substance pour se sentir possédé. Le combo a trouvé son allure de croisière, intense et débridée, on frôle la folie rythmique et remplacer le gel hydroalcoolique par du rhum s’impose.
Ensuite, le retour, avec un morceau tonique et survitaminé qui fait ressembler la Chenille à une marche militaire pour handicapés moteur et le percussionniste qui se fend d’une magnifique impro manuelle-oui, le retour à l’artisanat est tendance- il dispose même d’une collection de clés d’appartements qui ruisselle quand il la frôle, puis ça se calme avec un hommage aux enfants de la Creuse, ces 2000 enfants réunionnais déportés par Michel Debré vers la Creuse pour en combler le trou des naissances-la Creuse, le trou, oui- et le bassiste entre enfin dans le jeu des impros. Entre l’Océan indien et la Caraïbe, une balade sensuelle sans frontières, sans attestation de voyage, au gré des vents affranchis de toute limite, eux.
On les rappelle sans hésiter.


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