L’américaine Stacey Kent en concert racontée par Jean Louis Libois.
STACEY KENT - Théâtre de Caen - 18 octobre 2021 - 20 h 00
Attendue la saison dernière mais indisponible pour cause de Covid, la chanteuse Stacey Kent a trouvé in extremis ce créneau du lundi, dans le cadre de sa nouvelle tournée européenne, pour venir à la rencontre du public caennais qui l’attendait en grand nombre.
Tant il est vrai qu’elle est une chanteuse populaire et que cela dure déjà depuis près de deux décennies, après plus d’une dizaine de disques enregistrés.
Elle appartient à cette mouvance –très prolifique ces dernières années- des chanteuses de jazz.
Certes, ce n’est pas Ella Fitzgerald, ni même Dee Dee Brigdewater, elle ne scat pas davantage, elle ne swingue pas vraiment, son répertoire comporte peu de compositions originales et enfin, elle ne révolutionne pas le jazz. Pour ces différentes raisons (et peut-être d’autres encore) cette américaine de naissance, passée par Oxford, n’est pas la tasse de thé de tous les amateurs de jazz. Comment dès lors expliquer l’engouement pour cette “fille américaine en Europe qui chante du jazz”, ainsi qu’elle aime par ailleurs se définir ?
Alors, il y a bien dans les derniers enregistrements des compositions originales de l’écrivain anglais d’origine japonaise Kazuo Ishiguro et de son saxophoniste Jim Tomlinson qui viennent émailler le répertoire mais elle reste une chanteuse de standards, puisant dans la chanson populaire, la bossa nova et aussi dans le jazz ; sa voix faisant le reste. Ou si on préfère son interprétation, toujours précise, stylée et inspirée.
Ce soir là, outre Michel Legrand (“La valse des lilas”), Pierre Barouh ( “Samba Saravah”), elle a repris à son compte le titre internationalement connu “Ne me quitte pas” de Jacques Brel. Le hasard a fait que le samedi précédent, Laurent Valero (France Musique) consacrait son heure d’émission ”Repassez moi l’standard “ à différentes versions de ce “If you go away”. Mieux que Barbara (à ses débuts, il est vrai) et moins bien que Nina Simone et son pathos émouvant, la version entendue, de cette complainte du chanteur belge, au théâtre de Caen s’est révélée d’une grande justesse, d’une grande mesure et d’une sensiblité retenue.
Crooneuse ? Peut-être. En effet, là encore son interprétation de cette belle composition, pas très facile, à vrai dire, ”Les eaux de mars,” sublimée par Regina Elis et Carlos Jobim (chantée, sans relief, en son temps par G.Moustaki) était d’une belle subtilité musicale et vocale.
Pourquoi d’ailleurs, chercher des définitions pour une chanteuse qui se désignait elle même, d’entrée de jeu, en martelant chaque mot :”Je suis une chanteuse intimiste”et qui sait l’être pour des centaines de spectateurs réunis ?