Cerise sur deux pianos

Théâtre de Caen 26 février 2022

Quarante ans d’existence, des musiciens invités d’envergure nationale voire plus, des centaines de spectateurs par concert… le compte est bon. Pari tenu par son instigateur M. Dubourg, il y a donc 40 ans de cela avec la complicité certes du public mais aussi avec le soutien financier des autorités successives du Théâtre de Caen.
Paradoxalement, c’est la grande salle du théâtre qui a accueilli, ce samedi, les deux pianistes de renom et non les habituels foyers. Deux Steinway sur une estrade, en guise de scène, était inenvisageable, et tant mieux, car le lieu des rendez-vous du samedi n’aurait pu davantage contenir les 500 spectateurs venus assister à ce concert-anniversaire.
Laurent de Wilde et Ray Lema, deux pianistes, deux jazz, deux continents, deux traditions, deux techniques ; pour leur dernier disque Wheels enregistré l‘an passé, ils ont eu à cœur de mélanger, combiner, arranger tout cela en un univers musical inédit, varié et pétillant comme un menu de jour de fête. La comparaison s’impose tant l’un et l’autre, à tour de rôle ont insisté sur la composition (au sens culinaire) des morceaux aussi bien que sur leurs traditions gastronomiques respectives. C’est ainsi que la salsa cubaine initiée par le franco-américain reçoit pour réponse « à la sauce africaine » du pianiste congolais. Ainsi, à un rythme africain donné, à l’afro beat répondent le blues voire le ragtime (à moins qu’il ne s’agisse du « cakewalk », à la référence plus appropriée). Et tout cela s’emboite très naturellement, le fruit d’une complicité de quatre ans, à quatre mains et deux claviers. Pas question de hors piste ici, ni de bataille des pianos, ni de guerre des ego ; il s’agit plutôt de mise en commun de deux mondes musicaux, de deux histoires (trajectoires) personnelles donnés, en partage, avec brio, à des spectateurs comme cadeau d’anniversaire.

Jean-Louis Libois, texte et Gérard Boisnel, photographie