Marion Rampal, "L’Île aux chants mêlés" - Théâtre de Coutances, vendredi 20 mai 2022 (festival Jazz sous les pommiers).

Marion Rampal : voix, guitare
Pierre-François Blanchard : piano droit, mélodica, clavier MIDI, voix
Sébastien Llado : trombone, soubassophone, conques et voix
Production de la Compagnie Les Rivières Souterraines.

Quand on a Marseille comme port d’attaches affectives, on rêve du large et d’aventures. Quand on a vécu et grandi à Marseille, on a baigné dans une diversité culturelle effervescente qui ouvre grand l’esprit et le cœur. Voilà pourquoi Marion Rampal, enfant de la Cité Phocéenne, est aujourd’hui une musicienne gourmande de musiques épicées, de saveurs sucrées et imprégnées du sel de la vie qui n’ignorent ni la rudesse du blues, ni les couleurs des Caraïbes. C’est pour cela que Marion Rampal, belle voix du jazz et des musiques vagabondes, nous embarque dans un rêve d’aventures à la manière d’un Peter Pan qui se ferait passer pour le Capitaine Crochet.

Pierre-François Blanchard, Marion Rampal, Sébastien Llado
L’île aux chants mêlés...

L’île aux Chants Mêlés, c’est la quête d’un paradis imaginaire que trois marins loufoques et musiciens aguerris vont tenter de découvrir. Sous la conduite imprévisible et poétique de la Capitaine Rampal, les hommes d’équipage, Pierre-François Blanchard et Sébastien Llado tentent de tenir le cap au gré des vents, des airs et des chants. Ils jouent la comédie en musique, chantent et nous enchantent comme des mômes écoutant bouche bée des histoires improbables. Leur polyvalence nous épate. Ce voyage s’adresse surtout au jeune public mais, on le sait, la jeunesse est une question d’état d’esprit et, ce soir, l’assemblée est multi-générationnelle, plutôt dans la fourchette haute d’ailleurs (les enfants ont eu leurs séances un peu plus tôt dans la journée). Le public se se laisse facilement amadouer quand il s’agit de réveiller son âme d’enfant en éveillant des émotions justes.
On connaît depuis belle lurette les qualités de musicienne de Marion Rampal, sa voix qui sait moduler les mélodies les plus simples (À la Claire Fontaine, ce soir), fait résonner les fibres rugueuses du blues (avec Archie Shepp ou Raphaël Imbert) et donne vie à sa propre poésie musicale (écoutez Tissé, son dernier album). À travers ce spectacle, elle donne une jolie leçon d’ethnomusicologie initiatique car ce voyage de la France à la Louisiane, de la Jamaïque à la Réunion, de New-Orleans à Hawaï est l’occasion de démontrer que les musiques du monde puisent aux mêmes sources, naturellement. Quelques éléments de décor, un piano droit au centre définissent l’espace de jeu dans lequel les trois protagonistes évoluent avec une aisance théâtrale qu’on ne leur connaissait pas. Évidemment complétée et étayée par leurs compétences musicales qui ne sont plus à démontrer.

Marion Rampal
© Sombrero & C°

Et puis, il y a ces toiles sublimes que la capitaine Rampal fait coulisser en fond de scène comme on hisse les voiles pour voguer d’une terre à l’autre. Elles sont signées Cécile McLorin Salvant. Oui, la vocaliste désormais célèbre est aussi une remarquable plasticienne. Elle a grandi musicalement sur le même territoire provençal que Marion Rampal... Ceci explique cela.
Ces chants mêlés renvoient explicitement au métissage musical. Seulement, là où la world-music s’arrête au mixage de formes exotiques, Marion Rampal s’intéresse au fond. Pourquoi et comment ces musiques se sont imbriquées, combinées, mélangées. Au fil du voyage, on croise Harry Belafonte, les musiciens réunionnais et, évidemment des ombres du jazz dans de chaudes ambiances, des chansons colorées et des danses endiablées ! Et puis, il y a ce moment d’une grande intensité où les trois musiciens-acteurs nouent un dialogue fictif avec la voix d’Alma Barthélémy, chanteuse créole louisianaise, mémoire de chants anciens qui ont vogué de la France au Canada, de l’Afrique aux Caraïbes. À elle seule, elle représente l’aboutissement de la quête impossible de cette île aux chants mêlés. C’est aussi un bel hommage aux travaux des ethnomusicologues initiés par Alan Lomax (1915-2002), le pionnier des collecteurs de sons précieux du blues et d’ailleurs et prolongé par Raphaël Imbert acteur-chercheur du jazz, si atypique.
Attendri, rajeuni, on applaudit et ils reviennent, exceptionnellement... parce que c’est Coutances !


Enregistrement de ce spectacle à Coutances sur France.TV / Culturebox :
(disponible jusqu’au 20/05/2023)


Écouter et plus si affinités !