Quelques réflexions sur les pochettes des albums de jazz
En parcourant, sur le site Culture-Jazz, les pochettes des "albums en ribambelle" du mois, les bras m’en tombent ou plutôt… les yeux ! M"enfin ! Vous qui passez des heures sur vos thèmes, des journées à peaufiner vos compositions, des semaines à choisir vos musiciens, des mois à faire la balance de vos disques, des années à trouver des financements, vos vies sur vos instruments et, pour finir, vous confiez les pochettes de vos disques chéris à des élèves de 3ème, vous choisissez des photos à peine dignes de banques d’images ! Pour l’auditeur passionné et attentif, la pochette est le menu du restaurant, l’affiche du film, la couverture du livre, la photo de l’aimé(e) ou la promesse d’un voyage. Elle doit donner envie d’ouvrir l’album, l’introduire, le présenter.
Nous, les fans de jazz, nous revoyons les pochettes de Miles qui les choisissait avec le même soin qu’il accordait à ses costumes. En prenant en main l’album « Tutu » avec le merveilleux portrait réalisé par Irving Penn (excusez du peu) nous sentions que quelque chose allait se passer à l’intérieur ! Les portraits de Bill Evans sur ses disques disaient son élégance, sa distance mais ils décrivaient aussi sa musique.
Il fut un temps où les maisons de disque avaient leurs artistes chargés des pochettes : Jim FLORA pour Colombia Records, David Stone MARTIN pour Verve, Reis MILES chez Blue note qui utilisera ces photos en 2 couleurs pour les albums de Coltrane. On pouvait, dans une pile de disques, reconnaître les albums ECM par le minimalisme de leurs pochettes. Ce design soulignait le caractère avant-gardiste des musiciens du Label : Jan Garbarek, Pat Metheny, Louis Scavis, Nana Vasconcelos, Keith Jarrett…
Andy Warhol, Basquiat, Robert Mapplethorpe n’ont pas trouvé dégradant de réaliser des pochettes.
Je veux bien que les ressources soient limitées et que l’argent manque. Que, quand on a payé les artistes, le studio d’enregistrement, les techniciens, les frais divers il ne reste plus grand-chose et qu’il faille comme disent les politiques « faire des arbitrages » mais quand même ! Je veux bien admettre qu’on soit passé de l’équivalent d’un tableau en surface pour le 33 tours au CD de 10cmX10cm puis au téléchargement en ligne mais c’est bien une pochette, même virtuelle, qui est le drapeau d’un album ! Il faut aussi donner à voir la musique.
Au nom de tous les amateurs (quel joli mot) de musique, je vous le demande, à vous qui nous faites rêver, vous qui nous montrez des pays inconnus, allez dans les expositions, sur internet et trouvez des œuvres, des artistes (peintres, graphistes, designers ou photographes) qui vont traduire un peu de ce que vous avez créé, pour nos yeux qui souffrent… Il y a des artistes talentueux et pour toutes les bourses…