Soizic Lebrat, Anouck Genthon, Patricia Bosshard & Marie Schwab au Périscope le Mercredi 4 octobre 2023
Depuis une année nous attendions une nouvelle programmation puisque la précédente avait été annulée le matin même. Notre patience a bien été récompensée, la promesse d’une date ultérieure fut respectée selon notre souhait.
Le Quatuor LGBS est composé de deux violons Anouck Genthon, Patricia Bosshard, dont un alto Marie Schwab et un violoncelle Soizic Lebrat.
Comment vous expliquer une musique qui n’est pas paresseuse, ça prend du temps, mais nous l’avons fait rempli du doute et de l’incertitude à reproduire en terminologie ce que nous venions de vivre. La circulation d’idées immédiates donne le vertige créatif lorsqu’elles organisent ce mode de production inventif, mis à l’épreuve dans la suite des secondes enchainées.
Rapidement l’accoutumance débute chez nous à la première émanation des valeurs inédites, en ruptures complètes face à tout compromis préalable convenu à l’avance. Ici le monopole du rythme n’est pas imposé par une quelconque autorité infantilisante. Ce terrorisme culturel n’y a pas sa place, avec ses éternelles répétitions machinales. Elles viennent brusquer les temporalités relationnelles du jazz avec son swing traditionnel inhérent.
La rampe de lancement se situe très logiquement sur des modalités de principes éclairées, par cette dynamique au prestige transgressif. Sur cette base les instruments circulent sur des représentations occasionnelles de réciprocités, qu’elles doivent démêler à l’instinct quasiment au pied levé afin d’en définir les impacts une fois la réalisation accomplie. C’est une forme d’intranquillité qu’elles savent gérer et qu’elles se répartissent collectivement par une énorme force de conviction. Fernando Pessoa décrivait cette volonté puissante à ne pas se laisser envahir par la routine : « Vivre c’est être un autre. Et sentir n’est pas possible si l’on sent aujourd’hui comme l’on a senti hier : sentir aujourd’hui la même chose qu’hier, cela n’est pas sentir … ».
Elles vont surenchérir sur cette logique sans exploiter la formalisation esthétique racoleuse au style bien trop banal. Cela leur permet de faire un saut de la quantité à la qualité par ce choix élaboré de brouiller les pistes par différentes tonalités de caractère avec ce noyau de fulgurances imprévisibles. Les quatre instruments deviennent des ilots d’opiniâtreté, la ponctualité de chacune conserve sa place pour proclamer la subversion requise à ne pas venir mimer la copie conforme. Elles peuvent ainsi laisser échapper un réquisitoire troublant pour la clarté des diverses déclarations expressives accomplies dans sa pureté. Le Quatuor LGBS est la meilleure radiographie de la musique improvisée.
Elles investissent une mise en place apte à répondre aux actes du raisonnement qu’individuellement elles répandent, sous la pensée organisatrice que véhicule cet échange par l’émergence d’une conscience partagée. Dans cet ensemble il ne règne aucun chahut mais une présence de mouvements bien dosés. Les cordes ruminent se jouant du silence pour accentuer les effets de surprises.
Cet enclos à quatre regorge de nuances pour traverser ce labyrinthe intelligent capable de surmonter les impasses et les angles morts. Elles poussent ce chariot imaginatif rempli de trouvailles, sur des rails contemplatifs organisés à l’image de l’instinctuelle maitrise, matière première de cette croisade à la démarche tangiblement subreptice sans en demander la permission à quiconque.
L’ensemble évolue de la manière la plus flexible dans son tracé parfois sinusoïdal bien éloigné de l’uniformité rébarbative. Ce mécanisme s’adapte facilement à l’éprouvé extemporané que suscite une perception investie par sa potentialité absorbante, nouée aux diverses incursions révélatrices de cette infaillible aventure.
Un extraordinaire parcours de richesses se dégage de cette trame dans laquelle nous avons pu nous plonger. Il n’y avait pas un nuage d’incompréhension devant cette conscience bouillonnante d’aspects profonds. Avec la sensation d’être entrainé au centre d’un tourbillon que rien ne vient contrarier. Aucune entrave pour mieux nous démontrer qu’on peut ne rien prévoir et tout organiser avec l’espace préparatoire en veille.
www.soiziclebrat.eu
www.anouckgenthon.com
www.patriciabosshard.com
www.marieschwab.wordpress.com