Membre du collectif lyonnais Pince-Oreilles, la pianiste Anne Quillier fait partie des musicien(ne)s que nous avons remarqué(e)s au cours des derniers mois. Elle était sur la scène du Triton le 22 janvier.
Un double trio, on peut dire ça du Anne QUILLIER sextet : elle-même au piano, Fender et compos, Michel MOLINES à la contrebasse et Guillaume BERTRAND à la batterie avec un trio de souffleurs : Grégory SALLET aux saxes alto et soprano, Aurélien JOLY à la trompette, Pierre HORCKMANS aux clarinettes basse et sib.
En hommage à Manu Larcenet ( vous souvenez-vous d’avoir lu Le combat ordinaire puis Blast, c’est le minimum minimal.... ?), ils entament le set par Chanson épique pour les superhéros injustement méconnnus. Là, tu te dis : cultivé le sextet, excellente référence bédéiste, titre qui n’est pas sans faire un clin d’œil à ces chapitres débutant par « Où vous découvrirez que notre héros est détourné de son but par ….. ». Une solide intro, un chouette solo à l’alto, du genre je prends mon temps, je ne dévoile pas en deux coups les gros l’étendue de mes capacités et le sommaire de l’histoire, je raconte, je narre, je développe, je flash back, j’ironise avant que mes petits camarades ne me rejoignent.
Mind in the street ( ? ) lui succède. À nouveau, belle intro qui nous guide jusqu’au solo du trompettiste. Avec sa trompinette au pavillon détourné, il n’est pas sans rappeler Ibrahim Maalouf. En mieux. C’est son tour de choruser. Lui non plus ne fait pas étalage de son talent façon hop hop hop écoutez-moi ça. Pas d’esbrouffe : une histoire avec des prémisses, un début, des mises en attente et le reste qui en découle. De facture classique et belle à écouter. Ce gars-là, même quand il joue out, il est dedans.
Anne Quillier y va aussi de son solo. Une histoire tendre, tout en douceur. Avant que les choses ne se gâtent et que le clavier n’en prenne pour son grade : martèlement sauvage, elle cogne la fille, il doit bien y avoir une raison. Ou deux.
Chacune des pièces est introduite par un dialogue instrumental mystérieux à effet de « il était une fois » ou de teasing sexy, on salive, on se dit bon d’accord et après, quand vous aurez fini de décrire le paysage, vous nous racontez quoi ? Personne ne mégote sur la durée de son solo, sachant qu’il dispose de tout le temps du monde pendant la durée d’icelui.
Tout ça respire la cohésion, l’écriture équilibrée, les soli assumés. Comme un mix heureux de fraîcheur enjouée et d’aisance de vieux routiers.
Au second set, ils jouent comme si la partie n’était pas gagnée et en remettent dans le genre pièce longue tu crois que ce morceau touche à sa fin, non non, écoute, y’a une suite. La simplicité apparente des thèmes la joue poupée gigogne : un premier mouvement qui sonne comme un tout en cache un second qui lui-même.
Le pupitre de souffleurs est mis à contribution dans un usage malin de ses timbres : les trois ensemble bien sûr et aussi les différents duos possibles. Magnifiques couleurs !!!
Et ils osent pousser le bouchon jusqu’au bord du lâcher prise, au ras de la corniche : encore un pas et ils sautent. Dans l’inconnu.
La prochaine fois ?
Pas impossible qu’on ait écouté Lignes troubles. Sûr qu’ils terminent par Ondes de choc. Avant qu’on ne les rappelle.
Plaisir partagé.
Post Concertum : De quelles œuvres accouchera-t-elle, Anne Quillier, lorsqu’elle aura lu, relu et re relu Les Vieux Fourneaux ( les 3 tomes... ) ?
La photo est signée Yves Dorison / CultureJazz (www.yvesdorison.net)
Vendredi 22 janvier
Le Triton
11bis rue du Coq Français
93260 Les Lilas
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