Le tromboniste Samuel Blaser et le DJ Mathieu Ogier revisite le grand Duke Ellington.
Vendredi 17 septembre 2021
Je ne connaissais pas le DJ Mathieu Ogier avant cette soirée au Périscope. Tout le contraire du tromboniste Samuel blaser que j’ai toujours plaisir à écouter. Toujours est-il que les deux réunis avaient décidé de prendre au pied de la lettre une déclaration d’Ellington qui avait répondu à la question « qu’emmèneriez-vous sur une ile déserte » par un laconique « un trombone et ma collection de 78 tours ». Ne me demandez pas si c’est véridique mais c’est ainsi que le petit Edward Kennedy se retrouva sur la scène de derrière la gare de Perrache par sa musique. D’un côté un synthétiseur vintage, de l’autre un trombone et une collection de sourdine. Au milieu, une musique toute fraîche, à peine sortie du four (admirez le contrepoint) et le désir, au sortir d’une résidence, de montrer le travail accompli et plus encore, l’ensemble des possibles que cette formule duale contient. Et si j’en crois ce que j’entendis ce jeudi 16 septembre, de quoi faire il y a. D’abord très expérimental, le duo s’engagea ensuite dans une direction plus aisément lisible par le commun des mortels auditeurs (si j’en crois le nombre minable de personnes présentes dans la salle, le virus en a tué des paquets). Les absents ayant toujours tort, les petits malins qui avait fait le bon détour se régalèrent devant l’inventivité de l’helvète et du français pas vraiment on the ground mais ludiques en diable, bien assez cependant pour que la virtuosité du propos demeure digeste. Alors pendant que le DJ tripatouillait les fils (les doigts dans les Pathé Marconi), le tromboniste attrapait au vol la ligne de passage avant de l’habiter, quitte à la détourner pour mieux l’explorer. Chemin faisant, les échos du Duke résonnèrent dans le périscope (le lieu pas l’objet) et il me fut agréable d’appréhender ces réminiscences ressuscitées d’entre les murs de l’oubli car, ne nous voilons pas la face, Ellington et ses compères sont en voie de disparition. Et oui, l’avenir appartient à ceux qui ont du passé une image claire et nette. Les autres, ceux qui prennent le train en marche, laisse gicler du jazz trop souvent insipide et sans fondement qui, lui, sautent du train en marche ; il rate le coche, prend la mouche et sèche et se dessèche. Poussière, poussière… Un beau gâchis. Surtout pour nos oreilles. Mais comme j’eus tout le contraire avec Samuel Blaser et Mathieu Ogier, je fus satisfait de ma soirée bien qu’au même moment, de l’autre côté de l’Atlantique, Georges Mraz passât l’arme à gauche à seulement 77 ans. Je ne saurais dénombrer les disques dans ma discothèque sur lesquels sa contrebasse résonne tant ils sont partout. Sympa le tchèque, il nous a laissé des provisions de musique à s’en faire péter les esgourdes. Merci bien George. On s’appelle.