Bloom fait la fête aux tristes figures. Le printemps avant l’heure.
Samedi 19 février
Un trio vocal, c’est moitié moins que les Double Six car ces derniers usurpaient leur nom. Ils n’étaient pas douze, mais six. Ce qui me permet d’affirmer sans faillir que Bloom n’est pas le quart des Double Six, quoi qu’en disent les férus d’arithmétique et autres matheux. Pourtant ils étaient cinq plus un sur scène, ce qui constitue un double trio. Enfin passons… Une soirée filgoude (feelgood pour les puristes), cela ne se refuse pas et cela n’arrive pas si souvent, et moins encore en ces temps électoraux pourris jusqu’à la moelle. Trois voix (Melina Tobiana, Léa Castro et Laurence Ilous), un contrebassiste (Arthur Henn) et un batteur (Ariel Tessier), c’est bien assez pour remplir une soirée. Ajoutez un invité surprise au piano sur quelques morceaux (Bruno Ruder) et pour les voix des urnes, vous repasserez au printemps (bon courage). Ceci écrit, si l’on mettait les bureaux de votes dans des lieux de musique, qui sait si la participation ne grimperait pas (un peu). Enfin passons… Avec une playlist éclectique entre compositions originales et reprises allant de Sting à Abbey Lincoln en passant par le Cap Vert, Bloom fit dans la dentelle haut de gamme, ce qui ne signifie pas s’emmerder à mourir au Puy en Velay. Virtuosité harmonique, arrangements léchés et énergie communicative furent les piliers sur lesquelles s’appuyèrent les chanteuses pour faire passer leur message, message qui pourrait se traduire en toute simplicité ainsi : nous ne sommes pas là pour vous faire chier. Complices en diable, elles occupèrent pleinement le front de scène sans omettre de laisser des ouvertures conséquentes aux autres musiciens du groupe car, de fait, c’est bien d’un groupe dont je vous parle, un combo dont l’équilibre fut revigorant à bien des égards. Dans un style personnel d’une redoutable efficacité, avec un plaisir évident de chanter et de partager le moment, face à une salle comble (vous avez bien lu), Bloom emporta la mise avec aisance et fit presque oublier à son public d’un soir que le talent est peu de chose sans travail et qu’il faut bien tout cela pour aligner les planètes ; ce qui tombait plutôt bien puisque le 19 février, jour du concert, est également le jour de naissance de Nicolas Copernic (1473) et que la baffe qu’il mit au géocentrisme en son temps, au profit de l’héliocentrisme, sema une belle zizanie dans le landernau moyenâgeux. Mais qui s’en préoccupe encore aujourd’hui ? Telle est la question que je me posai (pas trop) en traversant la nuit clunisienne sur la route du retour.