Samedi 27 août 2022

Un jour, une ou plusieurs personnes du festival se posèrent une question ; dans la verdure méridienne, que pourrait-on bien faire ? Compter les écureuils ? Chercher les ailes d’un moulin caché par la luxuriance des frondaisons ? Pester contre les gamins qui braillent en s’agitant ? Mater les touristes vaguement égarés ? Faire écouter du jazz et des musiques improvisées ? C’est l’option qu’elles retinrent bien que cette heure fut plus propice au casse-dalle qu’à la musique. Les deux n’étant néanmoins pas incompatibles, le concert pique-nique naquit. En ce 27 août, un an après le doux concert vespéral de Susanne Abbuehl qui clôtura l’édition 2021, acoustique et à jardin, la musique duale de Franck Tortiller et Misja Fitzgerald-Michel offrit aux spectateurs ayant momentanément délaissé abbaye, terrasses et musées, un monde mélodique mêlant la délicatesse et la rugosité primale, un bercement tout à tour quiet ou musclé, une respiration rythmique ample. Tournant autour du jazz et du folk, leur musique projeta entre les cèdres des éclats vifs, des étincelles sereines, entre arabesques volatiles et points d’écriture ancrés dans la limpidité du mouvement musical comme dans les abysses de notre mémoire sonore. Passant de standard en standard, du jazz à la pop ou à une composition personnelle ne dépareillant pas, elle s’échafauda au cœur de la complicité patente entre les deux musiciens. C’est peu dire qu’elle fut douce à l’oreille et chaude à nos palpitants ventricules. Je constatai spontanément, et ce n’est hélas pas nouveau, que le dialogue possède des vertus que notre triste époque ignore, toute assoiffée qu’elle est de vanité et de gloriole nombriliste. Ce jour-là, comme en toute occasion, il fut empathique et humainement engagé. Franck Tortiller et Misja Fitzgerald-Michel ne firent qu’un, pour la bonne cause. Comme quoi, et sans vouloir emmerder les matheux (d’ailleurs c’est pour moi un domaine abscons), l’unique est multiple de deux. Je vous signale pour finir que le 27 août 1890 vit naître Man Ray, grand expérimentateur de la photographie en compagnie de sa muse, Lee Miller, et compagnon de route du surréalisme. Tout deux redécouvrirent le procédé de la solarisation à la fin des années 20 ; il demeure aujourd’hui quelques clichés iconiques de cette période d’intense création.


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