Dimanche 14 mai 2023

Au Chien à 3 pattes l’autre jour, avec Edmundo Carneiro invité aux percussions, il y avait Milton Daud, Edinho Godoy et Aguinaldo Pereira, le trio Cor Das Cordas, trois guitaristes brésiliens au service d’une musique qui a conquis le jazz en 1964 quand sortit le disque de Stan Getz, avec le couple Gilberto et Antonio Carlos Jobim, disque enregistré en mars 1963 en deux jours. Depuis, d’autres ont approfondi le sillon, l’ont diversifié et les amateurs mélomanes du genre sont légion. De passage dans la niche du chien à trois pattes avec la complicité du Lavoir de Jasseron, association dédiée à l’art contemporain, le trio Cor Das Cordas paya de sa triple personne en animant une master-class avant le concert de fin de journée. Voyez-vous, un dimanche du mois de mai, j’aime que l’insouciance soit une délicieuse obligation et l’agrémenter d’un concert ajoute un je ne sais quoi de coruscant aux charmes vernaux. Sauf qu’il faisait un temps de merde, pas assez chaud pour un printemps décent, assurément trop humide, et comme ne le dit pas l’adage : « au mois de mai, fais ce qu’il te pluie… » Il ne faisait donc pas chaud dans la grange et cela m’incita à partir avant la fin après tout de même une heure trente de concert, ce qui m’autorise à en parler, d’autant qu’une coupure intempestive de courant obligeait les quatre musiciens à jouer sans amplification (cette dernière étant d’ailleurs un peu faiblarde à mon goût). Pour tout dire, je ne les connaissais pas et j’eus plaisir à les découvrir. Des mélodies imparables exécutées avec une grande finesse, les trois guitaristes entretenant chacun une ligne constitutive de l’ensemble prirent grand soin de ne jamais déborder dans la virtuosité inutile, ce qui me fut agréable. Rien de pire qu’un technicien zélé qui s’évertue à boucher tous les silences en additionnant, que dis-je, en multipliant les farandoles de notes toujours plus vite que son ombre. Non, ces trois-là et le percussionniste furent clairvoyants et firent dans la délicatesse, le précis et l’inspiré. Ce n’était pas Sunday afternoon in Jasseron et cela ne manqua pas d’enthousiasmer le public, beaucoup plus nombreux que d’habitude, à tel point qu’il fallut en dernière minute rajouter des bancs. Eh oui, le Brésil fait de meilleures recettes que le jazz… Mais bon, je m’en satisfais une fois en passant, à condition que la musique soit bonne et ce fut le cas. L’exposition au Lavoir était elle intéressante et je préférai nettement les peintures aux sculptures. Les goûts et les couleurs n’est-ce pas. C’était un 14 mai, jour où naquit la comédienne et autrice de théâtre Loleh Bellon (1925-1999), une femme de caractère qui sut écrire des textes au charme paisiblement vénéneux, toujours empreints de pondération, et qui sut faire passer ses messages dans le demi-ton, dans l’entredeux. Ce n’est pas donné à tout le monde. Elle écrivit quelque part la phrase suivante : « il n’y a pas de doute, après un certain âge, on a trop de peau ! » Et merde, pourquoi donc faut-il qu’elle ait raison ?


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