Samedi 19 août 2023

Un concert au farinier de l’abbaye de Cluny avec Laurent Dehors et Céline Bonacina ? Un duo déhanché pour débuter un Jazz Campus en Clunisois, version 2023, à tendance caniculaire ? Cela me convint fort bien, mieux que je ne l’aurais cru d’ailleurs (allez savoir pourquoi), tant au plan musical que météorologique. En cette journée mondiale de l’humanitaire, ce fut un mano à mano, jamais à bout de souffle, une histoire de vents contraires et complémentaires dont je pus penser un instant qu’ils s’agaçaient et s’enlaçaient dans le seul but de servir la musique amie, comme seuls le font ceux qui se connaissent sur le bout des anches. L’une et l’autre partagèrent donc le moment dans un bain de complicité plus que plaisant à ouïr, dans un espace temps où la jovialité le disputa à la virtuosité. Devant une salle comble et conquise avec aisance défilèrent des paysages musicaux aux saveurs variées, entre saxophones et clarinette, cornemuse et voix, sans omettre une once d’électronique et quelques mains propres à asseoir les rythmes nécessaires à l’exposé des entrelacs (allez, viens par ici que je te loop !). Ce fut chantant et jouissif. Ce fut chatoyant et Valéry aurait dit : « … plein de ces vents et de ces coruscantes vagues qui hennissent ». Il l’a d’ailleurs écrit à Gide, ce dernier étant parfaitement antinomique avec notre duo du soir, soit dit en passant. Céline Bonacina et Laurent Dehors, s’ils ne firent pas dans la demi-mesure, ne firent pas non plus dans la démesure, trop gourmands de détails pour verser dans le déclamatoire et l’emphatique, trop épris de beauté pour ne pas laisser leur musique communicative et leur désir de finesse habile aller se fondre dans l’auditoire. L’échange eut lieu et deux rappels furent requis pour achever le concert dans un sourire commun. Après quoi, parti pour boire un coup avec Nicole et Bernard, je pensai en chemin (une fois de plus) que Jazz Campus en Clunisois cultive depuis toujours son identité en programmant ce genre d’artistes, des musiciens exigeants faisant les choses sérieusement sans jamais se prendre au sérieux et ce, depuis presque un demi-siècle, contre vents et marées. Pendant ce temps-là, les grands festivals de jazz la jouent Amoco Cadiz, mais ça, c’est une autre histoire. Et si elle m’énerve franchement, elle ne m’intéresse pas.


https://www.jazzcampus.fr/