Un aperçu du festival qui vient de clore sa 24ème édition. Un bon cru, c’est le moins que l’on puisse dire, même si l’on n’a pas pu assister à toutes les soirées.
Pas de photographies autorisées, pas de chronique !
Sangoma Everett Oriental Project
Anne Ducros : voix / Majid Bekkas : guembri, oud,vocal / Papson : danse / Laurent de Wilde : piano / Reggie Johnson : contrebasse / Abdelfettah El Houssaini : percussions / Jacques Schwarz-Bart : saxophone / Sangoma Everett : batterie
Présent sur la scène d’A Vaulx Jazz lors de sa première édition avec Barney Wilen, Sangoma Everett est un habitué du festival pour lequel il a concocté, au fil des années, quelques créations de qualité. Habile à définir des castings improbables, il nous a encore étonné cette année en réunissant des artistes d’horizons divers pour un projet épicé comme il les affectionne. En chantre du brassage culturel, il a donné à écouter une musique dans laquelle les personnalités fortes l’entourant ont pu faire vivre leurs singularités plurielles au service d’une musique ancrée dans la transversalité. Notons également, et c’est une constante chez Sangoma Everett, que sur la scène la convivialité et le plaisir de jouer était bien là.
Tony Malaby "Apparitions" quartet
Tony Malaby : saxophones / John Hollenbeck : percussions / Drew Gress : contrebasse / Tom Rainey : batterie
Le très inspiré saxophoniste de Tucson, accompagné de John Hollenbeck aux percussions et vibraphone, de l’impeccable paire rythmique Tom Rainey / Drew Gress , a livré un set absolument superbe. Avec de nouvelles compositions fortement structurées mais comme toujours ouvertes sur l’inconnu, Tony Malaby a laissé parler sa science harmonique autant que son lyrisme instinctif. Par vagues successives, en enchaînant les morceaux sans pause, il a varié les climats, développé la prise de risque et offert à ses partenaires des territoires d’expression à leur mesure. C’est bien la musique d’un groupe que nous avons entendu, avec une écoute sans faille, un art du brio éminemment cultivé et une créativité débridée.
Philip Catherine Trio invite Enrico Pieranunzi
Philip Catherine : guitare / Enrico Pieranunzi : piano / Philippe Aerts : contrebasse / Antoine Pierre : batterie
Le guitariste anglo-belge et le pianiste romain se côtoient depuis longtemps. Point n’était besoin d’être devin ce mardi soir pour comprendre que l’échange serait fructueux. Hormis une composition personnelle de Philip Catherine en début de concert, le quartet s’est concentré sur des standards, notamment de l’excellent Richie Beirach, et a produit un concert de qualité où la sérénité à clairement affiché ses vertus. Pas d’effets de manche outranciers, un dialogue constant avec Enrico Pieranunzi, notamment un duo que l’on pourrait classer "hors catégorie", une rythmique solide avec Philippe Aerts à la contrebasse (il joue avec Philip Catherine depuis 1985) et le très jeune Antoine Pierre, 18 ans, qui accomplissait à Vaulx son troisième concert seulement avec le guitariste. À l’aise derrière ses fûts, il ne s’est pas tout à fait lâché, tout occupé qu’il était à surveiller du coin de l’œil ses maîtres. Il n’en demeure pas moins qu’une belle carrière s’annonce pour lui, placée sous d’excellents augures.
Paolo Angeli solo
Paolo Angeli : guitare
Encore inconnu pour nous, Paolo Angeli a su les intéresser par surprise. La surprise d’un instrument savamment suréquipé d’abord ; une sorte d’ovni guitaristique au nombre improbable de cordes, de barrettes, de ressorts et autres petits moteurs actionnant des marteaux. Celle ensuite d’une proposition musicale assez originale. Qu’il joue Bill Frisell, Fred Frith, Bjork ou ses propres compositions, le guitariste sarde ne manque pas d’aplomb, de technique et d’inventivité. On est cependant loin de crier au génie et, par certaine tournure, il nous a semblé que l’on se rapprochait parfois un peu plus du phénomène que du musicien totalement inspiré. Un peu gênée par des sonorités "ferrailleuses", notre oreille a fini par se lasser de cet exercice de style original, nous en convenons, mais qui a peiné à nous tenir vraiment en haleine une fois la première surprise passée.
Bill Frisell - Disfarmer
Repoussé à une trentaine de mètres de la scène, on devrait pouvoir écrire une chronique d’une trentaine de mots, au moins. Cette dernière phrase devrait amplement suffire, je crois.
Soirée Blues
Shakura S’Aida
Shakura S’Aida : chant / Donna Grantis : guitare / Andrew Stewart : basse / Lance Anderson : claviers / Kenny Neal Jr : batterie
En première partie de soirée, la chanteuse installée à Toronto a su mettre le feu avec une classe certaine. Nettement moins brut de décoffrage que bien des combos chicagoans vus sur cette scène par le passé, elle a propulsé par une présence vocale énergique l’essentiel du show à un niveau de qualité intéressant. On regrette juste que la jeune guitariste qui l’accompagnait ait plus donné dans la posture guitaristique que dans le riff acéré.
Roy Gaines orchestra
Roy Gaines : guitare, chant / George Pandis : trompette / Dan Heffernan : saxo Tenor / Don Roberts : saxo baryton / Bill Fulton : piano / Shane Harry : basse / Kenny Elliott : batterie)
Roy Gaines, 75 ans, l’a joué plus jazzy, si l’on peut dire. Avec trois cuivres pour soutenir sa guitare, trop en avant à notre goût pour l’usage qu’il en fait, il a déroulé un set assez uniforme qui a, il faut bien l’avouer, vidé la salle avec une régularité métronomique. On a senti le vieux briscard un peu moins concerné que par le passé. Ceci explique peut-être cela.
SAMEDI 26 MARS 2011
Moutin réunion quartet
Rick Margitza : saxophone / Pierre Alain Goualch : claviers / François Moutin : contrebasse / Louis Moutin : batterie
Pierre de Bethmann ayant un bras dans le plâtre, c’est Pierre Alain Goualch qui est venu prêter main forte aux frères Moutin et à Rick Margitza pour cette soirée de clôture du festival. Dans une salle bien pleine, ils ont su, avec leur énergie coutumière, produire un jazz actuel de très bonne facture. Un excellent duo a permis à ceux qui ne les connaissaient pas encore de comprendre à quelle point leur complicité gémellaire est étonnante.
Ron Carter Golden Stricker Trio
Ron Carter : contrebasse / Mulgrew Miller : piano / Russell Malone : guitare
Dans la catégorie des « super trios », les trois musiciens nommés ci-dessus ont rempli leur contrat haut la main. Qu’ils dialoguent à deux ou à trois, qu’ils prennent les solis à l’envi ou qu’ils s’unissent au plus juste par le thème, ces trois-là laissent planer au-dessus d’eux la musique qu’ils jouent comme un témoignage de l’art jazzistique porté à un degré suprême d’élégance, de technicité maîtrisée, d’empathie musicale qui nous font accroire qu’une telle science, délivrée avec les apparences de la simplicité et du naturel, relève pour ainsi dire de la sorcellerie. Aucune note de trop, aucune posture, pas d’emphase. De la musique, rien que de la musique. Du jazz qui pare les standards d’une aura de discrète audace, des musiciens qui assument leur statut sans affectation (sur scène comme dans les coulisses), un plaisir à parcourir et agrémenter ensemble les méandres mélodiques des thèmes, voilà qui fut suffisant pour marquer durablement les spectateurs. Standing ovation, bien sûr, pour achever A Vaulx Jazz 2011 en beauté.
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Retrouvez Yves Dorison, photographe sur son site "Jazz Photographies" :
(Un problème informatique passager nous prive de ses photos pour le moment... Tout va rentrer dans l’ordre très vite !!)
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On ne pouvait pas vous priver de l’animation vidéo de présentation du festival : plutôt sympathique !
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