Au cœur de l’automne, de biens beaux disques aux univers très diversifiés. De quoi réchauffer les oreilles les plus exigeantes et amadouer celles des curieux.
Orenda Records
David Dominique : flugabone (trombone à valve comprimée le plus souvent utilisé dans les fanfares)
Brian Walsh : saxophone ténor, clarinettes
Joe Santa Maria : saxophone alto, flûte
Sam Robles : alto et flûte, saxophones barytons
Lauren Baba : alto
Alexander Noice : guitare et électronique
Michael Alvidrez : basses
Andrew Lessman : batterie et drumKAT
A peine une quarantaine de minutes d’un musicien inconnu (encore un) et dès le début de l’écoute, on sent qu’il se passe quelque chose d’inhabituel. Il y a là comme une épaisseur supplémentaire, une forme de densité assez rare. La nouvelle production discographique de David Dominique a été composée sur une durée de huit années. Elle trouve son fondement dans les différents lieux où il a vécu et les aléas (plus ou moins douloureux) de la vie qu’il a connus. Le CD dans son ensemble est une sorte de mix à l’esthétique multiculturelle combinant une vision musicale quelquefois proche d’un genre de surréalisme éclatant avec des passages psychodramatiques qui empruntent à plusieurs genres musicaux. Du rock à la musique classique contemporaine avec quelques influences bien senties de Mingus, Dolphy, Reich, entre autres, le tout est musicalement ficelé avec beaucoup de finesse et d’à propos. Cela donne au final, un enregistrement passionnant, décalé, où les surprises rythmiques et sonores ne manquent pas d’intéresser l’oreille. Bien que très actuel et pétri d’influences multiples trempées dans une pertinence créative du meilleur cru, l’on ne peut s’empêcher, par certains côtés, notamment structurels, de penser à Dame Carla, même si David Dominique est encore plus aventureux, du moins pour son époque. Ce n’est pas nous qui allons le lui reprocher !
Yves Dorison
Hubro
Hilde Marie Holsen : trompette, manipulation électronique
Héritière naturelle de Nils Petter Molvaer, c’est ainsi qu’a été baptisé mademoiselle Holsen à ses débuts. Bon, nous on n’a pas vraiment vu le rapport, hormis dans son de trompette plutôt calme (norvégien ?) et il nous a semblé qu’elle proposait tout autre chose, quelque chose de plus ardu, sinon radical, dans la démarche. De fait, autour de son instrument, elle crée des couches sonores, comme un palimpseste, d’une densité affirmée. Les dites couches n’accompagnent pas vraiment la trompette. Ce serait plutôt une sorte d’ambiance paysagère dans laquelle Hilde Marie Holsen laisse librement déambuler sa trompette. Cela forme une suite de quatre pièces dont les noms sont tirés de minéraux utilisés pour colorer la peinture (Orpiment, Eskolaite, Lapis, Lazuli). En littérature, on dirait de sa musique qu’elle est autofictionnelle tant elle semble repliée sur son univers propre. Si vous êtes fan de be bop, passez votre chemin. Si vous aimez perdre vous perdre dans les aléas de la temporalité et que la curiosité vous semble être une qualité, il est probable que cette musique vous convienne. Il est même possible qu’elle vous interroge.
Yves Dorison
Hubro
Geir Sundstøl : Pedal steel, guitare, basse 6 cordes, etc
Nils Peter Molvaer : trompette
Jo Berger Myrhe : fender VI & moog minotaur
Mats Eilersten : basse & voix
Sanskriti Sheresta : tablas & voix
David Wallumrod : minimoog, prophet 5, arp pro solist & juno
Erland Dahlen : Batterie et percussions
Le label Hubro propose pour l’essentiel de la musique expérimentale voire très expérimentale. En toute franchise, on n’adhère pas toujours. Mais il est bon que de tels labels existent et promeuvent tout un pan de cette musique actuelle qui a le mérite de réfléchir avant de produire et propose donc des projets musicaux exigeants. Vu par ce prisme, le disque de Geir Sundstoel est limpide comme de l’eau de roche. C’est une musique pour accompagner les pionniers dans la conquête de l’ouest norvégien, des pionniers temporellement décalés dans le temps par les sonorités actuelles qui brouillent et enrichissent la première impression auditive. Leur univers est symptomatique des interrogations qui les accompagnent dans leur quête. Sont-ils country, électro-pop ou encore folkeux suicidaires ? Un peu tout cela à la fois, ce qui ne pas les aider à bien vivre mais nous offre une musique étonnamment agréable à l’oreille. Elle résonne d’influences multiples pas nécessairement complémentaires. La langueur qui sous-tend l’ensemble évoque peut-être la seconde nature de ces aventuriers d’un monde à recréer qui peinent à aimer leur destin. Les images défilent dans la tête de l’auditeur avec un réalisme assez similaire à celui du western de Kelly Reichardt, « Meek’s Cutoff » (La dernière piste, 2010). La grande vertu de ce disque, sa force, est de nous obliger à attendre cet incontournable instant où tout changera. On n’est jamais sûr de rien et on y croit jusqu’au bout. C’est con comme la vie et c’est pour ça que c’est bon. Mais ça va mal finir pour les pionniers. Enfin on croit. A moins que....................................C’est donc un disque incontournable et vous n’êtes pas obligés d’attendre pour l’acheter.
Yves Dorison
Jellymould Jazz
Sam Leak : piano
Dan Tepfer : piano
Adrift est une suite pour deux pianos découpée en huit morceaux. Sa particularité est qu’elle est pensée pour être écouter en une seule pièce musicale. Dan Tepfer et Sam Leak l’ont enregistrée en 2017 et nous dirons ici que la réussite de cet opus vient assurément de la connivence entre les deux pianistes qui délaissent leurs égos respectifs et parviennent de la sorte à ne pas se monter dessus. Au gré de la musique, c’est tour à tour chaleureux, désarticulé, éclectique, énergique et toujours d’une finesse bienvenue. Les lignes mélodiques se croisent et s’entrecroisent avec bonheur, les variations harmoniques sont légion et servent parfaitement le propos de Sam Leak Leak et Dan Tepfer dont on peine à définir ce qui en lui est improvisé ou non. Il ressort de ce continuum une impression d’espace musical où les deux pianistes expriment leur créativité avec un talent remarquable L’on ne se demande jamais si cette musique est jazz ou non. Elle est là et nous fait voyager dans son univers sonore riche et à la clarté d’écoute impeccable. Ces deux-là devraient reprendre le chemin du studio rapidement, nous le souhaitons, histoire de nous faire saliver un peu plus encore.
Yves Dorison
https://www.samleak.com/
http://www.dantepfer.com/
Solid Jackson Records
Javon Jackson : saxophone tenor
Jeremy Manasia : piano
David Williams : contrebasse
McClenty Hunter : batterie
Si vous voulez un sax ténor précis et soyeux, avec une sorte d’élégance sinueuse issue d’une virtuosité placide et d’une musicalité évidente, alors vous écoutez le nouveau disque en quartet de Javon Jackson. Bon d’accord, on est là dans ce que certains estampillent de cette étiquette « in the tradition » dénotant le passéisme, pour le meilleur et pour le pire. Mais ce n’est grave en soi. L’ensemble est solide car l’harmonie entre les musiciens n’est pas un leurre. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cela tourne. C’est même aux petits oignons. L’ambiance est globalement très « Jazztet », ce qui est compréhensible, étant entendu que Jackson a beaucoup collaboré avec Cedar Walton (il a également fait partie des Jazz messengers). C’est donc un disque élégant fait par des gentlemen du jazz à l’ancienne (qui de ci de là font dans la citation maline) où chacun livre sa part de swing avec une aisance et un brio indéniable. Le cinquantenaire du Missouri se place donc naturellement et sans timidité dans la lignée des grands saxophonistes ténor d’une époque bénie où le jazz tenait le haut du pavé. Et il est sûr que s’il avait été leur acolyte il y a quelques décennies, il aurait fait partie des grands. Hélas pour lui, nous sommes en 2018 et il représente une minorité musicale que peu prennent encore en compte. Il ne faudrait pas que cela vous empêche de l’écouter. Il n’y a pas que Booba dans la vie. Seul bémol de l’affaire, le fade out sur nombre de titres.
Yves Dorison
Vision fugitive
Jean-Marc foltz : clarinettes
Philippe Mouratoglou : guitares
Henri-Charles Caget : percussions, waterphone, psaltérion
Ramon Lopez : batterie, tabla
Articulé autour de Nowaten, chamane du Haut Michigan, découvert par le biais du film « Les gardiens de la terre », le disque de Jean Marc Foltz propose un voyage en terre méditative. Soutenu par un livret constitué des peintures du batteur Ramon Lopez, cet album conceptuel ne peut qu’avoir une place particulière dans le paysage musical actuel. L’introspection s’exprime ici dans l’espace ouvert par une musique entièrement vouée à la subtilité. Spirituelle dans l’approche, elle se conjugue aux quatre éléments, base naturelle du chamanisme et de ses variantes à travers le monde. Cela peut être obscur pour certains ou extrêmement limpide pour d’autres, mais cela ne laisse pas indifférent. Gracile et profonde, la musique ici respire autant que les musiciens l’inspirent. Mystérieuse et donc interrogative, elle parcourt un spectre musical qui définit mieux les ombres des couleurs que les couleurs elles-mêmes, suscitant ainsi une écoute affûtée, de peur de perdre ne serait-ce qu’une ponctuation dans cet ensemble architecturalement empreint d’une complétude plus ressentie que visible. Mais à l’invisible, nul n’est tenu. Que serait le mystère sinon ? L’essentiel demeure le voyage et le disque « Nowaten, celui qui écoute) » est là pour cela.
Yves Dorison
http://www.visionfugitive.fr/accueil.html
Artist share
Chad Willis, Dave Richards, Wayne Bergeron, Anne King, Mike Cottone, Josh Aguiar, Blake Martin : trompette
Dave Ryan, Erik Hughes, Sean Shackelford, Dennis Rollins, Juliane Gralle, Jake Kraft : trombone
Doug Webb, Geoff Nudell, Aaron Heick, Michael Czaja, Noah Preminger, Dave Thomasson, John Mitchell, Kyle O’Donnell, Brian Clancy, Stephen Taylor : saxophones et autres vents
Brandon Covelli, Jordan Seigel, Bill Fulton : piano
Will Brahm, Matt Hornbeck, Grant Geissman, James Leibow : guitare
David Ricard : basse
Sammy K : batterie
Billy Hulting : vibraphone, percussions
Et voilà le big band oublié par Th.G. dans sa dernière revue de grands ensembles (ici) ! Encore une belle machine qui carbure avec une précision affolante. On jurerait même que c’est écrit sur du papier à musique… Sérieusement, le big band de David Ricard est un orchestre qui n’a rien à envier à aucune autre formation. Ca se promène entre les influences avec bonheur. Chaque musicien (ils sont tous majoritairement issus de la scène californienne) tient son rang avec une érudition et une maîtrise impeccables. La musique de Davis Ricard, comme au bon vieux temps des grands orchestres, coule de source. Ca swingue méchamment sans être daté car capable d’exploration sonore contemporaine (de belles guitares bien électriques entre autre). Ce se boit sans soif, ca s’écoute en toute circonstance avec joie. C’est revigorant et ensoleillé. Il est dit dans la présentation que ce disque explore les parallèles entre la vie du bassiste, l’art, la musique mais aussi le processus créatif avec ceux de son père (Jack Rickard, illustrateur bien connu outre atlantique). Nous, cela ne nous dérange pas. David Ricard et son orchestre pourrait faire un concept album sur les choux fleurs, on l’écouterait sans blêmir. Recommandé aux amateurs de Lexomil qui veulent changer de vie et à tous les autres également.
Yves Dorison
https://www.davidricard.com/
https://www.davidricardbigband.com/
Jazz&people
Paul Jarret : guitare
Maxence Ravelomanantsoa : saxophone tenor
Léo Pellet : trombone
Alexandre Perrot : contrebasse
Ariel Tessier : batterie
+ Isabel Sörling, voix, & Jozef Dumoulin, fender rhodes
Avec ce disque Paul Jarret et son groupe amalgament les paysages sonores comme autant d’entités interdépendantes. Le tout est un univers musical particulier qui intègre les contradictions de son époque. C’est personnel et hors des sentiers battus. Mais comme de nos jours chacun souhaite sortir des dits sentiers, une pléthore d’opportunités musicales s’offre à l’auditeur. Dans ce contexte, ce fouillis, la difficulté à sortir du lot est un obstacle majeur. Paul Jarret et les siens (invités compris) y parviennent grâce à un sens de la dramaturgie aiguisé et un vrai travail de groupe. Outrepassant avec allégresse les codes, il passe de l’introspectif à la brutalité primitive sans nuire à une forme musicale dont la construction globale semble conçue pour résister à tous les écarts. Adeptes des changements de sonorité climatique, Paul Jarret compose avec l’atmosphérique et nous impose avec un genre de romantisme expérimental au sein duquel se mêlent nombre de courants musicaux dans une sorte de maelstrom dont les points d’acmé réguliers rappelle à l’auditeur qu’il est bon d’être bousculé.
Yves Dorison
http://pauljarret.wixsite.com/pj5f
Musicbox publishing
Daniel Goyone : piano
Thierry Bonneaux : vibraphone, percussions
La musique de Daniel Goyone est inclassable et ce n’est pas un reproche. Elle est exécutée avec une maestria qui pourrait faire croire qu’elle est facile. De fait, elle est simple sans jamais être simpliste. Elle accroche l’auditeur sans même qu’il s’en aperçoive. Après quoi, il est trop tard et il l’écoute encore et encore. A tout moment elle est extrêmement lisible et, quelle que soit sa complexité, elle ne sa cache pas derrière cette dernière. Daniel Goyone, dans sa conception de la musique, privilégie le partage avec l’auditeur. C’est assez rare pour être signalé. C’est de la vraie musique de musicien mais ce n’est pas de la musique pour musiciens seulement. Cette vision de la musique prônant l’empathie sans sacrifier l’exigence fondamentale que nécessite le travail d’artiste (dans tous les domaines) est un exemple que beaucoup devrait suivre. Après tout, les rêves sont faits pour être partagés. et Daniel Goyone sait parfaitement mutualiser l’émotion musicale.
Yves Dorison
Neuklang
Quentin Ghomari : trompetta
Marc Benham : piano
Si vous aimez l’inventif pour ce qu’il est, un goût prononcé pour la surprise, vous êtes au bon endroit dans le disque de Marc Benham et Quentin Ghomari. Les deux musiciens s’entendent bien et s’y entendent pour nous faire adhérer à leur univers. Le pianiste joue sur un instrument comportant 102 notes, ce qui lui permet d’élargir le champ pianistique des possibles sonores et donnent à l’enregistrement une coloration particulière. C’est un duo aventureux qui ne se lasse pas de nous surprendre, notamment avec quelques reprises de standards qu’il sait réinterpréter en renouvelant leur approche avec un sens de la fantaisie notable. C’est suffisamment original pour être convaincant et l’ensemble, qui s’alimente à bien des sources, marque un moment de complicité musicale que l’on souhaite voir perdurer.
Yves Dorison
Une autre avis du même CD...avec un OUI en plus
Gonam City c’est le résultat d’une rencontre comme la musique et le jazz en particulier en aime tant. Un sens du dialogue si l’on ose dire, une complicité entre un piano et une trompette.
Au cœur de ce banquet deux musiciens rompus aux musiques d’hier et d’aujourd’hui : du stride, du Mingus (Pithecanthropus Erectus), du Monk, des compos, de la variation (Misterioso), de l’improvisation, de l’interprétation (Petite Fleur) et de la liberté contrôlée. On aime ça, en plus quand ça s’accompagne d’un travail sur la matière sonore autant poétique que technique, nous nous pensons que l’un ne va pas sans l’autre. On saura donc admirer l’immense savoir pianistique de Marc Benham, sa connaissance à la fois de l’histoire et de la musique au sens le plus large, un swing infaillible, une science de l’harmonie comme on reconnaitra en Quentin Ghomari, outre son sens de la phrase, un alchimiste du son. Cet enregistrement passe donc des compositions personnelles à l’interprétation de standards savamment retravaillés. Mais on le sait pour les maitres dont nous parlions plus haut comme pour les musiciens d’aujourd’hui, le fil de l’histoire et le moment présent, intimement tressé ne font qu’un. C’est le résultat condensé de ce passionnant CD.
A noter le piano de Stephen Paulello utilisé lors de cet enregistrement, un instrument de 102 notes en lieu et place des 88 notes traditionnelles, une conception originale du cadre et des cordes qui participe à l’identité sonore de cet album.
Pierre Gros
http://www.marcbenham.com/
http://www.pegazz.com/musiciens/quentin-ghomari/
Stunt
Nous ne présenterons pas Enrico Pieranunzi car tout le monde le connait et, en sus, ce serait long comme un jour sans pain. Quant au danois Thomas Fonnesbaek, on l’a déjà écouté avec bonheur au côté de Sinne Eeg, Christian Sand, Ole Kock Hansen, Aaron Parks et j’en passe. Avec un jeu aussi technique que lyrique et véloce, Il est le digne héritier des Niels-Henning Ørsted Pedersen, Mads Vinding et Jesper Lundgaard, pour ne citer qu’eux. Dès lors que vous savez cela, vous savez également que cet enregistrement en public propose du jazz « jazz », si vous voyez ce que je veux dire. Ce n’est d’ailleurs pas honteux car les deux musiciens appartiennent à la crème de la crème et leur entente est rayonnante. Pieranunzi, toujours lui-même, narre les histoires avec une aisance et une créativité déconcertantes et Thomas Fonnesbaek lui apporte plus qu’un un soutien tant sa musicalité rayonne d’une présence affirmée. Les deux réunis dégage une énergie très communicative et leur dialogue constant (au jeu du chat et de la souris, ils sont très forts) est une aubaine pour les oreilles en mal d’intelligence musicale et de mélodies impressionnistes. C’est le genre de disque que vous pouvez offrir aux pavillons auditifs néophytes pour les fêtes à venir en étant sûrs de ne pas les dégouter du jazz.
Yves Dorison
https://www.enricopieranunzi.it/
Sunnyside Records
Aaron Goldberg : piano
Matt Penman : contrebasse
Leon Parker : batterie, voix, percussion & percussion corporelle
Sur cet album le pianiste new-yorkais retrouve son vieux complice, le batteur Leon Parker et l’excellent contrebassiste Matt Penman. Si parker teste les percussions corporelles et le chant, c’est bien là la seule nouveauté de cet enregistrement classico-classique qui ne s’écoute pas sans déplaisir mais qui ne nous fait pas grimper au plafond non plus. On y retrouve le sens marqué de la mélodie chère à Aaron Goldberg, appuyé par un Matt Penman toujours pertinent. L’ensemble possède, à certain moment, une verve qu’il n’arrive pas à garder tout au long de l’enregistrement. C’est dommage, d’autant que ces artistes sont dans le haut du panier et mérite nos éloges. Pour le coup, nous passons notre tour. A part ça tout va bien.
Yves Dorison
Universal South Africa 2017
Nduduzo Makhathini : piano, kalimba, voix, compositions
Magne Thormodsaeter : contrebasse
Ayanda Sikade : batterie
Sophie Ribstein : harpe
Eddie Parker : flûtes
James Allsopp : saxophone ténor
James Mainwaring : saxophone alto
Dennis Rollins : trombone
Thebe Lipere, El Hadj Ngari Ndong, Michael Ohene, Gola Gorbi, Ronan Skillen : percussions
Omagugu (1), Sakhile Moleshe (1, 6, 13), Sthembele Nguse (5), Smilindile Mdlazi (5), Clarance Gungu (5) : voix, chant
Où en est la musique sud-africaine en cette époque post-Mandela ? Nous avons un élément de réponse tout à fait positive avec ce disque du pianiste-compositeur Nduduzo Makhathini, un musicien qui, à l’image d’un Abdullah Ibrahim, pense sa musique dans une démarche humaniste et spirituelle. Avec Ikhambi, disque publié en 2017 en Afrique du Sud, il nous entraîne dans un univers poétique et sensible où le jazz se marie harmonieusement avec les mélodies et les rythmes de ce vaste pays multi-culturel. Le pianiste s’entoure ici des membres du Cure Collective, association de musiciens noirs et blancs qui pourra rappeler évidemment le Brotherhood of Breath de Chris McGregor sauf qu’à l’époque ceux-ci avaient dû s’exiler pour exister. Les temps ont heureusement changé.
Dans la musique de Nduduzo Makhathini, on trouve ses influences familiales avec un père guitariste et chanteur dans le folklore zulu et une mère pianiste et cheffe d’une chorale religieuse. Très intéressé par l’herboristerie médicinale et les liens avec la nature, la musique garde effectivement un aspect très naturel et déroule tranquillement ses mélodies à travers des compositions qui laissent transparaître une forme de sagesse très positive. On pensera à John Coltrane dans l’emploi du saxophone ténor (le pianiste évoque parfois McCoy Tyner) mais aussi à Abdullah Ibrahim et indirectement à travers ce dernier à Duke Ellington avec une influence marquée des traditions sud-africaines.
Un disque captivant de bout en bout qui méritera amplement qu’on s’y intéresse même s’il ne sera pas forcément facile de se le procurer... (Sur iTunes ici...)
NB : L’agence "Joburg is Now" organise une tournée pour 2019... Avis aux diffuseurs curieux !
Thierry Giard
nduduzomakhathini.co.za . www.joburgisnow.org/artists