Un trio classique, un duo et une autre trio aventureux, un quintet à six (?). De quoi attendre le printemps en confiance.
Savant Records
Lafayette Harris Jr : piano
Peter Washington : contrebasse
Lewis Nash : batterie
Sortie le 17 mars
Lafayette Harris jr a joué avec tout le monde ou presque (Max Roach, Ernestine Anderson, Archie Shepp, Houston Person, etc), histoire de préciser que le musicien ne sort pas de nulle part. Accompagné par une rythmique de luxe, Peter Washington et Lewis Nash, il est allé chez Van Gelder enregistrer ce disque produit par Houston Person lui-même. On se trouve donc dans un jazz moderne qui connaît ses classiques et sait leur donner de nouvelles couleurs au gré des envies du trio. Les standards s’enchaînent joyeusement et les musiciens (qui n’ont plus rien à prouver depuis longtemps) se font visiblement plaisir à déambuler parmi ces références d’un passé glorieux qui demeure vivace et que l’on écoute sans arrière-pensées (même si l’on se cantonne pas à ce jazz-là). Du swing bien élastique, une once de blues, une unité de style avec des pièces que l’on connaît toutes, c’est la recette de ce trio. Ils ne se targuent pas d’être originaux mais leur science est telle qu’ils arrivent encore à nous surprendre (Lafayette épate la galerie…). Allez quoi, en vieillissant l’intemporel soulage et ce jazz-là n’a pas d’âge. Alors faites-vous donc plaisir et faites découvrir aux plus jeunes le son d’une époque.
https://lafayetteharrisjr.com/
Emouvance
Sylvain Kassap : clarinettes, chalumeau
Hélène Labarrière : contrebasse
Sortie le 17 mars
Avec une trentaine d’années de compagnonnage musical derrière eux, Sylvain Kassap et Hélène Labarrière démontrent que la passion pour la musique improvisée qui les unit ne faiblit pas avec le temps. Dès les premières notes échangées, l’auditeur ressent clairement l’alchimie qui leur permet de développer leur dialogue. Faite de digressions, de moments paroxystiques et d’autres plus apaisés, comme toutes les conversations, leur musique peut également être joueuse, dense ou éthérée, vive aussi et toujours dans le mouvement. Il faut les suivre avec attention car ils sont en sus versatiles et prompts à prendre la tangente pour aborder d’un autre point de vue l’histoire en cours ou, qui sait, flirter avec la suivante. Leurs sonorités se croisent et s’additionnent si bien que l’on oublierait presque que ce duo est le fait de deux personnalités distinctes. Quoi qu’il en soit, la musique qu’ils donnent en partage s’écoute avec bonheur.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Sylvain_Kassap
https://helene-labarriere.com/
Parallel Records
Philippe Macé : vibraphone
Yoann Loustalot : trompette & bugle
Stéphane Kerecki : contrebasse
Sortie le 24 mars
Trois musiciens qui lient leurs sonorités et s’aventurent sur un terrain encore à défricher, c’est le concept même du KLM trio. Dans cet album où l’écoute est essentielle pour le trio, l’espace et les timbres définissent un univers à la rondeur pour le moins attrayante. Stéphane Kerecki tient la rythmique (mais pas que) sans faillir (le contraire eut été surprenant), Philippe Macé et Yoann Loustalot assure leurs parties avec un brio de grand standing et les trois font preuve d’une réelle liberté qui se base sur leur bagage musical personnel et qu’ils apportent au collectif à des fins nourricières et créatives. L’osmose est évidente et ce jazz de chambre, cette pépite, créé par des mélodistes hors pair tutoie des sommets de musicalité sur des tempi pouvant être vifs ou alanguis mais au grand jamais ennuyeux. En ces temps incertains, cet album est providentiel. Il vous fera découvrir un paysage original et harmonieux, dans un espace temps protégé et pétri d’une belle humanité où ne s’exprime que le meilleur de la musique. Une incontestable réussite, de celle qu’on écoute longtemps et régulièrement, sans aucune lassitude. La classe.
sortie le 24 mars
Stunt Records
Stephen Riley : saxophone ténor (1.5.7.10)
Michael Blicher : saxophone alto et tenor (1.4.8.9)
Magnus Hjorth : piano
Mads Kjolby : guitare
Anders Fjeldsted : contrebasse
Snorre Kirk : batterie
Si les norvégiens et autres finlandais du jazz ont une propension marquée pour la frappadinguerie (quoi ?), il existe un peu plus bas, au Danemark, une école du jazz classique et voire plus encore si possible. Le batteur Snorre Kirk appartient à cette chapelle et on ne lui reproche absolument pas. Il est très bien entouré et la musique coule de source. Elle évoque bien évidemment Ellington et Basie, celui qui dit le contraire n’a pas d’oreilles, et il y a pire comme référence. C’est paisible à écouter et une forme agréable de coolitude se dégage de l’ensemble. Les musiciens font leur boulot avec entrain et justesse. Un vrai roulement à bille ce disque. Ça carbure et ça ronronne, cela fait défiler les images de temps révolus où l’espoir avait encore sa chance. Old fashioned et quasi désuet, ce jazz-là arrive encore à vous faire gigoter le pied, balloter la tête. Dans un club, il donne soif et n’empêche pas de regarder autour de soi comment sont (vont) les gens. De facto, c’est un jazz rassurant et Snorre Kirk possède une qualité rare chez les batteurs : il ne nous assomme pas avec des soli tonitruants. Rien pour cela, on l’aime bien.