La rentrée est là et ça commence fort, notamment avec Fiona Grond, la Velvet Revolution de Daniel Erdmann, Théo Ceccaldi et Jim Hart, James Brandon Lewis en quintet et Micah Thomas en trio
Act
Fiona Grond : chant
Moritz Stahl : saxophone
Philipp Schiepek : guitare
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Fiona Grond est une jeune chanteuse suisse allemande qui, avec ce deuxième disque, prend un bel envol. Sur un mode intimiste et dans un genre inclassable, elle et ces deux accompagnateurs, délivre un moment musical, fait de douceur et d’intériorité, exprimé avec une indubitable sensibilité. La conversation que la chanteuse mène avec ses musiciens prend des tours qui vont de l’obsédant au chaleureux, de la transparence à la profondeur. Quelques surprises auditives surviennent ici et là ; on entend par exemple sur un titre des brides de folklore régional. Un titre offre plus de densité et d’âpreté (et nous avons pensé à PJ Harvey, ne nous demandez pas pourquoi). La voix, avec une articulation claire et précise, toute en modulations pertinentes et inspirées donne à ces textes l’écrin car, outre son talent de musicienne, Fiona Grond possède un réel talent d’écriture. L’atmosphère générale du disque possède un charme mystérieux qui tend peut-être vers une forme douce de mysticisme. Une chose est sûre et certaine, le trio propose à l’auditeur un voyage, une calme déambulation dans un espace suspendu, loin de toute contingence. Laissez-vous porter par cet univers original, vous ne le regretterez pas.
- sortie le 8 septembre
BMC
Daniel Erdmann : saxophone ténor
Théo Ceccaldi : violon
Jim Hart : vibraphone
Troisième album du trio après une décennie d’existence, Message in a bubble (référence à peine voilée au groupe Police que la phonétique écarte prestement !) est composé des neuf titres originaux composés à parts égales par les trois musiciens. Leur musique est, comme toujours, assez ouverte pour permettre l’exploration de tous les possibles, d’ailleurs ils ne s’en privent pas et les atmosphères qu’ils créent varient au gré des compositions. Enjouée ici, évanescente là, introspective ou rugueuse ailleurs, leur musique est une somme d’états d’âme, ou encore d’états d’être, qui suit son cheminement organique entre originalité pure et influences assumées. Tout est neuf dans cet enregistrement où l’écho lointain de leurs héritages respectifs résonne et ne pèse que pour le meilleur. L’humanité saxophonesque de Daniel Erdmann tutoie les sommets, enchâssée entre les lignes serpentines et évocatrices du vibraphone et du violon qui, quand ils prennent leurs soli, n’hésitent pas à amplifier cette impression de musique purement « humaine » qui touche au cœur l’auditeur. La somme des instruments et de leurs timbres est quant à elle la mise en scène idéale d’une musique libre qui affirme, au fil des enregistrements, une identité forte, une véritable originalité, de celle qui positionne une formation dans un espace réservé à ceux qui ont quelque chose à dire (que l’on n’oublie pas après l’avoir écouté).
http://www.daniel-erdmann.com/
– sortie le 8 septembre
TAO Forms
James Brandon Lewis : saxophone ténor
Krk Knuffke : cornet
Chris Hoffman : violoncelle
William Pa rker : contrebasse
Chad Taylor : batterie
La grand-mère de James Brandon Lewis avait reçu la musique de Mahalia Jackson 1911-1972) comme un don du ciel. Après son magnifique « Jesup Wagon » qui mettait en lumière George Washington Carver (1860-1943), le saxophoniste originaire de Buffalo (N.Y) rend hommage à cette musique comme à sa grand-mère. Accompagné par la crème de la crème des musiciens créatifs de la grosse pomme, il donne à écouter une somme musicale aussi respectueuse qu’inventive des titres interprétés. Le quintet sait tirer vers des contrées libres cette musique qui a marqué plusieurs générations (et qui demeurent encore aujourd’hui une référence) et dont le mysticisme, et même le religieux, ne manquent pas d’affleurer en permanence à la surface de bien des thèmes. Quoi qu’il soit, l’harmonie qui se dégage de la musique du quintet est absolument admirable et chaque musicien apporte une présence d’une rare densité. Ainsi le collectif n’en n’est que plus beau et de bout en bout simplement époustouflant. Ignorer James Brandon Lewis est un crime de lèse majesté ! D’ailleurs Sonny Rollins lui-même a dit : « When I listen to you, I listen to Buddha, I listen to Confucius … I listen to the deeper meaning of life. You are keeping the world in balance. »
- sortie le 8 septembre
Artwork Records
Micaha Thomas : piano
Dean Torrey : contrebasse
Kayvon Gordon : batterie
Micah Thomas (1997) : « Je le considère déjà comme quelqu’un qui possède un style unique ainsi que tous les outils nécessaires pour apporter une contribution majeure au monde du piano jazz ». Ce n’est pas nous le disons, c’est Fred Hersch. Le cadre est ainsi posé et il n’est pas seul à encenser le jeune pianiste. Notre esprit de contradiction ne le contredira pas non plus ; c’est vous dire si Micah Thomas possède un truc bien à lui. De fait, il semble ne rien ignorer de l’histoire du piano jazz mais utilise ses connaissances pour créer quelque chose de personnel, de particulièrement inventif et frais, ce que nous avions remarqué dans son précédent album en solo sorti en 2022 et ce que nous avons vu cet été en concert avec Immanuel Wilkins, l’autre sensation de la scène new-yorkaise ces temps-ci. Le trio est immergé dans l’interplay, à l’évidence ils connaissent bien, et affirmer que cet interplay est caractérisé par une créativité fine de tous les instants ne relève pas du mensonge, bien au contraire. Nous vous laissons découvrir ce nouveau talent sans tarder.