La 32ème édition de l’Europa Jazz Festival s’est terminée au Mans le dimanche 15 mai... Nous n’avons pas manqué le final. Alain Gauthier est arrivé le premier, le 11 mai... À suivre...
La 32ème édition de l’Europa Jazz festival s’est achevée en apothéose le dimanche 15 mai. Ce marathon du jazz et des musiques improvisées avait débuté le 22 mars par les désormais traditionnelles tournées régionales. Pour le final, il installe son camp de base à l’abbaye de l’Épau au milieu d’une oasis de verdure et propose deux rendez-vous en zône urbaine, à la Collégiale Saint Pierre La Cour le midi et dans la salle post-industrielle de la Fonderie à 17 heures.
Nous vous proposons de revenir sur cette très belle édition en croisant les écoutes et les regards : Alain Gauthier, arrivé le premier dès le 11 mai vous propose son point de vue. Je lui emboiterai le pas pour proposer un autre regard convergent ou divergent sur d’autres concerts aussi.
À suivre, donc !
.::Thierry GIARD: :.
__4__
Les Coups de Coeur du final
__2__
> À la Collégiale, le midi
Jean AUSSANAIRE-Bernard SANTACRUZ DUO
Ces deux compères, le premier au sax alto et soprano, le second à la contrebasse, particulièrement affûtés, véloces et volubiles, vont jouer l’un avec l’autre, l’un derrière l’autre, l’un devant l’autre, bref dans toutes les postures possibles et imaginables d’un Kamasutra sonore, le temps d’une conversation apéritive.
Pascal CONTET WU WEI DUO
La rencontre inouïe entre un accordéon ( instrument créé en 1829 ) et un sheng (orgue à bouche chinois noté sur des tablettes en 2700 avant JC ) nous laisse bouche bée [1]. Les yeux fermés, les distinguer l’un de l’autre est tout sauf évident. Le voyage est beau. Immensités d’Asie, paysages sans horizon, ciel immense, vue panoramique. Des caravanes convergent vers l’oasis. Les plus jeunes font la course, qui l’emportera : le plus valeureux ? Le plus hardi ?
Le Double Trio de Clarinettes
Formation rarissime et du coup, provoquant une grande curiosité. Alliance du trio déjà entendu au Mans : Jean-Marc FOLTZ, Armand ANGSTER, Sylvain KASSAP avec le trio voisin outre-Rhin : Gebhard ULLMANN, Jürgen KUPKE, Michaël THIEKE. Le projet de la rencontre tient dans l’écriture par chaque clarinettiste d’un morceau pour le double trio. C’est varié, inhabituel, enlevé, ludique.
Me reste en tête le premier morceau organisé comme un duel de trios : intense, sombre, tendu, exigeant, plein.
__2__
> À l’abbaye de l’Épau
Giovanni GUIDI Unknown Rebel Band
La scène est complétement occupée par ce big band formé d’un magistral pupitre de souffleurs : Daniele TITTARELLI, Dan KINZELMAN et David BRUTTI aux sax alto, ténor et basse, Fulvio SIGURTA et Mirco RIBEGNI aux trompettes, Mauro OTTOLONI au trombone, poussés fort au derrière par Joao LOBO à la batterie et Michele RABBIA aux percussions, Giovanni MAIER à la contrebasse, sous la houlette du pianiste Giovanni GUIDI.
Outre un hommage au Liberation Music Orchestra, il y a du Willem Breuker Kollectief dans ce groupe, et c’est hautement réjouissant. Du verbe Réjouir, c-à-d jouir deux fois.
Christophe MONNIOT/Vivaldi Universel
Du temps a passé depuis la première publique de ce programme en 2005 et quel plaisir de le ré-entendre !
La machine tourne rond. Pas de tension, un rythme tranquille, pas plus vite que l’enchaînement du temps des saisons qui passent et passent et repassent.
François CORNELOUP Trio
Emblématique des chercheurs de vérité musicale, ce trio nous ravit ( « au lit », ajoute mon voisin restaurateur italien ). CORNELOUP au sax baryton, Hélène LABARRIÈRE à la contrebasse et Simon GOUBERT à la batterie.
Peter EVANS Quartet
LA surprise du festival.
Quatre loulous américains plus vrais que nature ( on entend le craquement des céréales OGM au petit-déj) entrant à toute allure comme s’ils débarquaient de l’hélico à peine posé sur la pelouse de l’abbaye et démarrant leur programme au quart de tour pendant que le flop flop des pales s’éteint progressivement dans la nuit naissante. Zoom arrière puis traveling sur la scène.
__2__
Les énervements de 17h
Cette année, la Fonderie porte vraiment bien son nom. Les groupes qui s’y succèdent sont des groupes jeunes, très jeunes. On pourrait dire Bruts de fonderie ( cf définition dans le dico ).
Sauf à vérifier qu’il s’agit d’un parti pris, SIDONY BOX, trio formé de Élie DALIBERT au sax alto, Manuel ADNOT guitare et effets, Arthur NARCY à la batterie, nous dispense une musique dont le volume sonore, épatant pour un pupitre de quatre trompettes, quatre trombones, deux sax barytons, quatre sax ténor, un cor d’harmonie, est totalement disproportionné pour l’UNIQUE sax alto présent. Sax alto dont nous n’entendrons quelques envolées qu’au bout de 45 minutes, avant de disparaître dans un maëlstrom sonore qui tient presque de la représentation chaotique régnant dans le corium des réacteurs de Fukushima. Pfff !! Vivement les économies d’énergies.
Un autre trio, Metal-O-Phone, avec Benjamin FLAMENT au vibraphone, Joachim FLORENT à la contrebasse, Élie DURIS à la batterie souffre d’entrée d’un traitement du son du vibraphone via une console électro-numérico-bidouillante qui rend quasiment inaudible le propos de Flament. Même la pièce "Steve Reich à Babylone", clin d’œil à l’école minimaliste américaine, passe à travers. Dommage.
Mon voisin énervé développe une théorie pas sotte. Si accueillir la nouvelle vague du jazz relève d’une générosité bien placée et d’une curiosité fidèle à l’esprit du jazz, lui tresser des lauriers par avance, l’exposer à la lumière comme des petits génies nuit gravement au développement nécessaire de sa maturité musicienne. Par exemple, avoir quelque chose à dire qui ne relève pas seulement de la petite trouvaille éphémère ou du gadget électronique. Par exemple ne pas confondre énergie de la musique et du groupe et bruit assourdissant. Il y a des entreprises pour ça. Une fonderie par exemple.
__4__
Un autre regard, une autre écoute des concerts de ce final...
> Le Mans : EUROPA JAZZ FESTIVAL 2011 (2)
Une galerie-photo commentée... (par Thierry Giard)
__4__
> Lien :
[1] Lire la chronique de leur disque "Iceberg" publiée en décembre 2009 sur CultureJazz