ça glisse comme une gorgée de coteaux de l’Aubance...

Ça y est enfin : les permanents du spectacle de l’UMP en ont terminé ( semble-t-il … ) avec leur concurrence déloyale à l’égard des intermittents du spectacle qui, eux, nous ravissent l’âme, l’esprit, le corps et nous les rendent à la fin de leurs concerts, performances, interventions...

Au Triton, fin de semaine réservée trois jours de suite à Verlaine Les Airs, un quelque chose inclassable issu de deux géniteurs (oui : deux hommes, sans Procréation Médicale Assistée), Emmanuel TUGNY pour le livret et John
GREAVES
pour les musiques.

John Greaves & Eve Risser - Verlaine - Le Triton
© Julien Vivante - Le Triton

Sur scène, huit musiciens au service de cette œuvre. Je répète : au service de.
Dans un oubli de soi qui frôle l’absence et magnifie le concert.
Mon voisin, DRH tueur de coûts, se demande mezzo voce : « y’en a pas un ou deux dont on pourrait se passer ? Merdalors, huit sur scène ? On frôle la gabegie. »
Eh bien non. Tous et chacun se montrent nécessaires et indispensables.

Au fond, sa guitare basse et ses cordes vocales à portée de main, John GREAVES.
Devant lui, le trio vocal enfin réuni ( merci du peu !!! ) : Madame Élise CARON, Madame Jeanne ADDED, Monsieur Thomas de POURQUERY. Là, le John fait dans le casting de luxe qui ne louche pas vers la Belgique. À eux trois, ils réunissent une somme d’influences et de talents ahurissants. The best : ce qui se fait de mieux ; tout est bon dans ce trio comme dans le cochon, l’oie, le canard : y’a rien à jeter. Écoutez-les !!

Les acolytes (pas anonymes) autour de ce trio : Eve RISSER au piano ( mais avec qui elle ne se produit pas celle-là hein ? ), une poigne de fer pleine de délicatesse derrière ses partoches joliment collées à la tranche du couvercle du piano, Léon MILO aux percussions et machines, une genre de Shiva œuvrant au fond là-bas, de face, de dos, en biais, jamais au repos, Olivier MELLANO à la guitare qu’il porte au bout de bras aussi longs qu’une peine de prison incompressible, Guillaume ROY à l’alto ( la mèche fièrement intériorisée ) et un quatuor vocal, discrètement installé autour d’une table dans la salle, qui se lèvera à deux reprises pour créer un volume genre les chœurs du Philharmonique de Vienne ( Autriche ).

Élise Caron & Thomas de Pourquery - Verlaine - Le Triton
© Julien Vivante - Le Triton

Verlaine Les Airs. Verlaine Gisant, Verlaine et sa pompe à morphine, Verlaine et ses hallus, Verlaine en soins palliatifs, Verlaine va mourir. Voilà. Ça pourrait s’installer dans le lourd-sombre-débilitant-présentation du corps-hymnes doucereux-componction de l’officiant-voix sussurantes-passez-la-monnaie.

Non, rien de cela. Un truc qui nous attrape au creux du cœur, des reins, des mains et qui nous nettoie la tête de tout ce qui y tourne en boucle : « qu’est-ce que je vais offrir à Caroline pour Noël ? Un livre ? Elle en a déjà un … », qui, de ballade cristalline et simplette en texte intense, de cris gueules ouvertes sur glottes agitées en textes poétiques ( cf. le teaser du Triton ci-dessous « Moi, je suis de la Lune... » ) nous laisse presque deux heures plus tard le cul sur la chaise avec un grand silence jaune d’or entre les oreilles.

Équilibre des arrangements, ici et là des chorus instrumentaux, des voix en veux-tu en voix-là seules, duelles, trielles, quatrielles et même octuelles, la variété des styles, pfff, oulala oulala, ben dis donc... : du grand art.
Merci John : magnifique hommage à Verlaine.

De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l’Impair
Plus vague et plus soluble dans l’air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose [1].


Teaser vidéo (Le Triton) :


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[1Verlaine - l’Art Poétique (1874) - NDLR