Vendredi 5 juin, au Triton (93 Les Lilas), le saxophoniste Christophe Monniot et Ozone rendaient hommage au goupe Weather Report.
Des gouttes grosses comme des promesses électorales s’écrasent sur le trottoir. Des épaules nues courent vers des abris, des vestes trempent du dos et des manches, des chemises se pustulent de flic-floc. On nous l’avait dit : orages probables après ce pic de chaleur pas encore caniculaire mais quand même. Et cette météo avant le concert dédié aux musiques de Weather Report, ça ne s’invente pas !!!
Au Triton, une poignée d’aficicionados se prépare à jouir de OZONE : Christophe MONNIOT aux sax et mini clavier, Emil SPANYI aux claviers, David CHEVALLIER à la guitare augmentée, John QUITZKE à la batterie et Maghib SHANBEZADEH aux percussions.
Ils commencent en mode prenons nos marques y’a pas le feu au lac, une nappe de clavier se déploie, un ceci par ci un cela par là et BLAM !!!! Servez c’est-prêt !!!
Thème puissant, gros son, intelligence collective instantanée : on n’est pas là que pour rigoler.
Autant dire tout de suite que pour revisiter les musiques de Weather Report, Monniot, comme d’hab’, fait dans le genre casse-gueules et prise de risque à écoeurer un spécialiste des cyndiniques.
On entend des thèmes qui nécessitent une attention totale ( c’est pas le moment de mater le corsage de cette fille penchée en avant et de se poser des questions existentielles genre bonnet C ? ), des entre-deux dont on ignore s’il s’agit de flottement ( oucékon nen né ? ) ou de respiration avant un solo inattendu imprévu ( pourquoi pas toi ? Si si, zyva !! ). À ce jeu, Spanyi derrière ses claviers, se montre un furieux relanceur : il fait écho, il ostinatote un accord patient, il complète une idée qui passe, il tient la baraque à frites ( « j’ai perdu au moins 5kg » dira-t-il ) et semble avoir avalé un métronome : une lame d’acier japonais qui tient la pulse avec une poigne en uranium appauvri.
La seconde pièce au tempo de chameau qui entame sa traversée du désert débute par un joli duo sax-écho-clavier, on sent que ces deux là ont des heures de vol sans bloquer la porte de la cabine, avant que Monniot ne s’envole dans un monstrueux solo monniotesque, suivi du zarb et de la batterie qui fricotent des volutes avec les claviers.
Thèmes serrés, patientes séquences planantes, soli tendus : on est soumis à rude épreuve, rien n’est pareil et tout est différent. Il est conseillé de ne s’attendre qu’à des surprises.
Au retour de la pause, c’est Chevallier qui se pousse du médiator et envoie un gros solo de guitare : on se croirait revenu aux seventies ; il y a ce passage à un tempo déraisonnable qui met le feu sur la scène. Vont-ils se casser la gueule ou pas ?
Ou pas.
Maghib qui voltige sur son zarb, seul Quitzke, impérial derrière ses fûts, n’a pas fait entendre sa peite musique soliste. Le plaisir circule entre eux jusqu’à nous aussi fort que la montée des eaux d’une marée d’équinoxe autour du Mont.
Oubliés, Joé Zawinul, Wayne Shorter et Jaco Pastorius : leurs petits-enfants prennent les commandes et ça le fait grandement !!!
Vendredi 5 juin - Le Triton, 11 bis, rue du Coq Français - 93260 Les Lilas