Cent dix-septième étape

Rémy Poulakis

Le 17 juillet a vu naître Berenice Abbott en 1898. Des photographes comme elle, il y en a eu peu. Le 17 juillet a également vu disparaître Billie Holiday en 1959. Dans chanteuses comme elle…. Ah oui, le 17 juillet a vu, et ce n’est pas mémorable, le Pérégrin au Péristyle de l’opéra écouter le Trio Barolo ( Francesco Castellani, trombone : chant, Philippe Euvrard  : contrebasse, Rémy Poulakis : accordéon & chant lyrique) avec en invités Carjez Gerretsen à la clarinette et Antony Gatta aux percussions. Le programme du jour s’intitulait « Casa Nostra  ». Ambiance méditerranéenne, valse et mélodies italianisantes ne suffirent pas à accrocher notre oreille dans la durée. La chaleur ? Le son un peu brouillon ? La différence d’énergie patente entre l’accordéoniste et les autres musiciens ? Un peu tout cela à la fois. Nous bûmes donc un coup, causâmes avec les voisins et notre pote de Jazz Rhône Alpes. Puis nous réintégrâmes nos pénates et envoyâmes un email au Crescent de Mâcon pour leur signaler notre venue à leur beau festival.


Cent dix-huitième étape

Donny McCaslin

Là, à Mâcon, il y avait le jazzeux que tout le monde veut voir. Écouter aussi, qui sait. Le gars s’appelle Donny McCaslin et il a fait du chemin depuis la parution en 1998 de son premier disque, « Exile and Discovery ». Mais cela, le public du jour, dans son immense majorité, ne la sait pas et le pérégrin que nous sommes ne leur reproche pas, entendons-nous bien. Simplement, ils viennent voir le gars qui a bossé avec l’icône sur Blackstar. Après tout, merde, il a touché la légende, quoi ! Son dernier CD, « Beyond Now  », est imprégné de sa collaboration avec le londonien et il ne s’en cache pas. Sur l’esplanade Lamartine, en quartet (avec Jason Linder aux claviers, Jonathan Maron à la basse & Nate Wood à la batterie) il laissa parler sa générosité et les watts aussi. Ce qui signifie que la fonte, c’est bien pour la cuisine, mais pas que. Cela fonctionne plutôt pas mal avec les rythmiques à caractère urbain, noircies au charbon, habitées de sentiments partagées et de poubelles débordantes, pétries de sensations dont on ne sait vraiment ce qu’elles déclenchent effectivement tant elles paraissent incompatibles avec ce qui nous semble être la nature humaine ; peut-être sont-elles une poésie âpre et sans retour née dans les éclats violents d’une fusion industrielle malodorante. Hypothèse fumeuse ? Elles sont néanmoins, et indéniablement, porteuses d’un souffle qui, avec des compositions accessibles sur le plan harmonique et mélodique, font leur effet sans coup férir. Surtout si les idées rythmiques sont bonnes et qu’elles s’appuient sur des textures et des motifs originaux. Sur ce point, croyez-nous, Jason Lindner et le ténor de Santa Clara possèdent le talent requis pour explorer le filon du post modernisme jazzy sans lasser l’auditoire ni le perdre. Étant aussi un instrumentiste d’exception naturellement généreux, un musicien pétri d’empathie pour le public et sincèrement heureux de jouer avec ses potes, Donny McCaslin n’eut à l’évidence aucun mal à emballer un public plus ou moins acquis, mais assurément curieux de découvrir la musique du type qui a œuvré avec Ziggy Major Stardust Tom. Parfaitement épaulé, que dis-je, cerné, il lança dans l’air humide du bord de Saône de beaux et longs soli, laissant un large et nécessaire champ d’expression à ses acolytes afin de propulser une musique de groupe (pop) intense marquée d’une empreinte assez originale pour qu’on lui en attribue la paternité sous l’ombre tutélaire de feu le Thin white Duke.

Baptiste Poulin

En première partie de soirée, le Crescent septet ( Eric Prost  : saxophone, Baptiste Poulin  : saxophone, Christophe Metra  : trompetta, Christian Brun : guitar, Romain Nassini : claviers, Greg Theveniau  : basse, Stéphane Foucher : batterie) rendit un bel hommage à John Coltrane dont on « célèbre » le cinquantenaire de la disparition. Pas passéiste pour deux sous, ils plongèrent les chefs d’œuvre du seigneur des ténors dans un bain actuel sans pour autant les défigurer. D’ailleurs, à l’issue du concert, Donny le sincère félicita chaleureusement Super Rico ténor du Crescent. Ce qu’il fallait faire car, comme toujours, les compères mâconnais n’avaient pas oublié de bosser avant de monter sur scène ce 20 juillet 2017 où l’eau qui tombe en gouttes des nuages sur la terre nous évita presque. Notez au passage qu’en 1304, un autre 20 juillet, Pétrarque vint au monde sans savoir qu’il serait poète. Mais Donny savait-il que D.R. Jones changerait sa vie ?


Dans nos oreilles

Dominique Eade + Jed Wilson - Open


Devant nos yeux

Bret Easton Ellis - Moins que Zéro