Où Jazz Campus en Clunisois fête son quarantième anniversaire, envers et contre tout (et tous).
Cent vingt et unième étape
Au temps de sa splendeur, le pérégrin que nous sommes et ses ami(e)s écoutaient déjà John Abercrombie, notamment le disque « Night » (1984) et le tube ultime « Ethereggae » qui résonna alors (souvent en boucle) dans bien des soirées. Le natif de Port Chester (N.Y) a lâché son manche ce mardi 22 août à l’âge de soixante-douze ans. On ne vous fera pas le coup d’énumérer tout ceux qu’il croisa en chemin, on n’est pas dans le bottin. Il était, et est toujours, une figure majeure du Jazz. Ceci dit, n’est-ce pas un peu tôt pour un Class trip John ? Franchement ? Bon, là où tu es maintenant, tu pourras entre autre parler horticulture et écriture avec John Abercrombie (1726-1806) ou encore médecine et physique avec John Abercrombie (1780-1844). Et file-leur des leçons de guitare, le temps passera plus vite, voire moins lentement.
Ce même 22 août, nous étions à Jazz Campus en Clunisois pour écouter le trio de Claude Barthélémy avec Antonin Rayon (Hammond B3) et Philippe Gleizes (batterie). Mais vint d’abord sur scène Joachim Florent qui tentait là le périlleux exercice du solo de contrebasse, exercice dont la nature a changé au vu des possibilités aujourd’hui offertes par la technique. Contrairement à d’autres soli de contrebassistes écoutés dans la douleur ici et là ces dernières années, Joachim Florent n’utilisa pas, hier soir, les effets à disposition pour s’engouffrer dans une sorte de chaos sonore « post machin indus, post truc urbano, vouais-tu-vois-la-transe… ». Il fit de la musique, mêla les genres sans s’emmêler, juxtaposa savamment les textures et au final proposa un concert savant (au bon sens du terme) qui mit en valeur son instrument et convainquit aisément la nombreuse assemblée du théâtre de Cluny. Mais peut-être aurait-il pu éviter le passage « bidouillage de boutons » qui nous remémora, allez savoir pourquoi, les séries Sci-fi des années soixante et qui selon nous n’apporta rien de concluant à l’affaire. Mais ce n’est que notre avis, bien évidemment.
Puis Claude Barthélémy et ses acolytes vinrent sur scène. Claude Barthélémy, quand il s’invite dans votre univers, ce n’est pas le genre à sonner à la porte et à attendre que l’on vienne ouvrir. Ce serait plutôt un bon coup de latte dans la porte et « salut la compagnie », sourire en bandoulière, on va bien se marrer et tutti quanti. Ayant fait mine d’être bienséant avec une intro virtuose à l’oud durant quelques minutes, il se tourna vite vers sa guitare, plutôt « loud », et poussa ses compères dans leurs retranchements et quelques auditeurs aussi… Les pauvres, ils ne savaient pas que le guitariste est plus chaud que la Fournaise et que ses éruptions hyperboliques claquent aux oreilles comme autant d’irrépressibles envies que seuls les jouissifs peuvent avoir. Sur un répertoire varié propre à satisfaire les plus exigeants, l’intranquille de la six cordes dynamita quelques poncifs, réinventa l’inventif, fusionna les courants, joua vite et plus vite sans démonstration aucune, fut musical en diable et content d’être là avec cet orgue et cette batterie qui alourdirent de manière bienvenue les gros nuages propices au déclenchement de l’orage et le firent durer assez longtemps pour nous assommer de plaisir. Bref et comme à son habitude, il fut salvateur (Saint Barthélémy, massacrez-nous !) car il est notoire qu’après le déluge, les pavillons sont frais comme un gardon aux ouïes rafraîchies par la violence des remous. Et tant pis pour les pisse-froid.
Dans nos oreilles
Charlélie Couture - Solo boy
Devant nos yeux
Michel Deguy - Oui dire