Le collectif du Lion, son big band, ses trente-cinq années d’itinérance musicale : oui, la musique durable existe.
Ils sont venus, ils sont tous là, un bande transgénérationnelle belgico-française nommée L’orchestre du Lion. Au ras de la scène, les vocalistes : Thierry DEVILLERS, David HERNANDEZ, Adrien SEZUBA et François LAURENT.
Derrière eux, une ligne arrondie pour l’octuor à vents : Pierre BERNARD flûte et piccolo, Laurent DEHORS ( le français de l’étape ) clar, sax, bagpipe, guimbarde, Clément DECHAMBRE sax alto et ténor, Véronique DELMELLE, sax soprano, baryton et violon, Antoine DAWANS trompette, Adrien LAMBINET trombone et électronique, Véronique LAURENT euphonium, Michel MASSOT soubassophone, euphonium et trombone.
Au fond, la rythmique avec trois batteurs : Étienne PLUMER, Stephan POUGIN, Michel DEBRULLE et Nicolas DECHÊNE aux guitares.
Sans oublier aux manettes du son : Christine VERSCHORREN.
Les trente-cinq ans de vie de ce collectif, narrés dans l’épastrouillant livre Sur la piste du Collectif du Lion, sont résumés dans le vagabondage du programme : spectacle de rue, rap, chanson de crooner, fest noz, blues roots. Que n’osent-ils pas dans leur itinérance musicale et que retenir de ce concert historique ?
Un mix de morceaux instrumentaux superbement arrangés, l’octuor sonne voluptueux, passant de l’horizontalité de sa position à la verticalité des accords, un seul son multiple, rond, plein qui sonne chambriste et déchire le coeur et de morceaux chantés : Devillers chante comme s’il nous racontait une histoire entre deux verres ( pas les premiers de la série ) et un big band derrière un chanteur, c’est juste classieux, surtout quand ses solistes se lâchent. Avec Intoxicated man (de Gainsbourg), les Bublé, Bennett et autres Sinatra peuvent aller se rhabiller : Devillers est grand !!! Son partenaire, Hernandez, avec sa voix lyrique ( un ténor peut-être ? ) crée une étonnante disruption complémentaire.
Le flow de Sezuba dans « Here I am » (je suis un étrange étranger) est d’une actualité brûlante comme dit le mec qui regarde cramer une voiture et Reprends, tiré d’un spectacle de rue et chanté par Laurent invite à la randonnée urbaine tous-ensemble. La période est aux jacqueries !!
Quand Dehors ose le bagpipe dans À la campagne, c’est le monde celtique qui s’invite devant nous : les bagads en majesté avec cette musique populaire qui, nantie d’une basse électrique et de batteurs rock pulse, groove et secoue les galoches. Quand il ose la guimbarde, son ostinato simple et poignant hypnotise.
Écouter ce collectif, c’est rassembler Frank Zappa, le Willem Breuker Kollektif, la Marmite Infernale, le Grand Orchestre du Tricot, autant dire ce qui se fait de plus excitant, culotté, jubilatoire et surprenant dans le jazz de toutes les époques. Enfin et ce n’est sans doute pas la dernière fois, les belges nous font la leçon : ils mettent en musique la théorie du ruissellement qui, comme le savent les honnêtes gens, s’épanche de haut en bas : ici, un flot de jubilation des musiciens vers le public.
Merci les lionnes et les lions.
NB : Préférer s’offrir le livre Sur la piste du collectif du Lion plutôt qu’un objet connecté ( à la société de contrôle et de surveillance ), obsolescent à peine acheté, relève d’une saine lucidité.
Mardi 27 novembre 2018
Centre Wallonie-Bruxelles
46 rue Quincampoix
75004 Paris