A l’approche du printemps, Daniel Humair a posé ses baguettes à Chorus, club dont il est le parrain, et invité des musiciens évoluant à sa hauteur. Réjouissant.
Vingt-sixième équipée
Dans la présentation du concert du 16 mars dernier à Chorus, il était indiqué je cite, « ¾ suisse – ¼ français. » Et c’était vrai ! Avec le quartet réuni ce soir-là, l’on trouvait sur scène, outre Daniel Humair (Genève) fêtant sa quatre-vingtième année de présence terrestre, le contrebassiste Heiri Känzig (suisse mais né à New York) et le tromboniste Samuel Blaser (La Chaux de Fonds,) faisant face à Louis Sclavis (Lyon). Une formation inédite et luxueuse de cette envergure, c’était bien évidemment immanquable. Et les amateurs adorent ça. Sera-ce une querelle d’égos au service de la stérilité créative ? Ou sera-ce une bonne et belle entente entre gens de belle compagnie et de bonne composition (c’est le cas de le dire) qui demeurera inscrite à jamais dans la mémoire de l’auditeur ? Chacun vit dès l’entrée des musiciens sur scène que la joie de vivre et de jouer serait de la partie (dans les cercles autorisés du jazz, on appelle cela « la bonne humair »). Dès lors, il n’y eut qu’à se laisser porter et profiter du bouquet garni. Musicalement, Louis Sclavis prit les choses en main avec vigueur. On est soliste où on ne l’est pas, hein ? Cela dépota donc avec virtuosité, technicité et musicalité. Samuel Blaser prit sa part sans chercher la bagarre à son collègue de pupitre et les deux derniers suisses du gang firent ce qu’il fallait pour que les soufflants soient à l’aise. Il en fut ainsi de tout le premier set et le public apprécia, notamment mon voisin de chaise dont les onomatopées d’approbation entre les morceaux frôlaient l’extatique et l’ultimesque jouissance au point que je pris peur pour l’intégrité de son pantalon. Le second set débuta par quatre soli. Clarinette, trombone, contrebasse et batterie, dans cet ordre-là. Manière intelligente de soigner les égos précités, n’est-ce pas, et retour à la case quartet pour une continuation de l’esprit festif et avantageusement musical de la soirée. Les quatre improvisateurs furent évidemment originaux (ou eux-mêmes, c’est vous qui voyez), mais un petit peu chacun de leur côté. La mayonnaise prit cependant et, à défaut d’une soirée totalement mémorable, il demeure dans mon esprit le souvenir d’un plaisir d’écoute réjouissant. Et dois-je à nouveau vous parler de mon voisin de chaise ? Allez, tout fut bien qui finit bien. La cotonnade pantalonnesque en sortit indemne et le pacemaker, héroïque (ta mère), survécut à l’engouement allègrement frénétique et jubilatoire, enthousiaste et presque débordant, du corps qu’il accompagnait.
A toutes fins utiles, et cela ne nous rajeunit pas, il est bon que vous sachiez que c’est un 16 mars de l’an de grâce 1534 que l’Angleterre rompit toutes ses relations avec l’église catholique (churchxit). Était-ce improvisé ? Les témoins manquent. L’on peut cependant affirmer que les anglais, finalement, ne font pas que des conneries et que leur indépendance d’esprit et leur fondamentale insularité ne sont pas nées de la dernière pluie (cela ne remonterait tout au plus qu’à quelques heures). Sur l’autoroute du retour, la route était sèche et j’écoutais Supertramp (ça mouille, non ?). It’s raining agaaaiinnn… Oh no, my love’s at an eennddd… Croyez-moi ou non, les paroles de ce sommet musical de la pop, calibré eighties, n’ont rien à envier aux bavardages alanguis de ce petit joueur de Baudelaire.
Dans nos oreilles
Sabine Meyer - Klarinetten Konzerte (Mozart, Stamitz, Weber, Rossini, Krommer)
Devant nos yeux
Jean De La Ville De Mirmont - Les dimanches de Jean Dézert