CECI N’EST PAS DU JAZZ ! Nom d’une pipe !

I

l y a quelques années, lors d’un entretien publié sur le site de Jazz-Magazine, Jérôme Sabbagh, saxophoniste, disait craindre que le jazz deviennent une grande tente sous laquelle viendraient se réfugier toutes sortes de musiques, le regrettant fort et souhaitant plus de rigueur ; il se demandait modestement s’il aurait sa place dans le jazz.
Un vieil amateur comme je suis, qui fréquente le jazz depuis 56 ans, a vu le jazz évoluer, revenir en arrière, faire des bonds en avant, du sur-place, il l’a vu s’assimiler d’autres genres (Bossa nova, Bach, salsa, Chopin etc.), puis être assimilé à son tour aujourd’hui.
D’où cette chronique motivée par la réception de disques CD, ce dont je remercie les envoyeurs et les félicite pour leur défense d’un produit en voie de disparition, avant sa renaissance quand le vinyle aura fait son temps, sera devenu aussi fin, moche que dans les années 80 du siècle passé.

Que Dieu me garde des chanteuses de jazz, je me garde de mes ennemis” [Harry Tolv]

Do Montebello- Birdy Heart (AxolOtl-2018). Jolie voix bien placée, polyglottisme (brésilien, anglais, français ; les textes sont données dans le livret). C’est une musique agréable pour l’été, sans âpreté, sur tempos medium lents (56 mn).
Ricky Lee Jones - Kicks (Osod-2019). Une voix vulgaire, qui cherche la laideur, un orchestre fort bruyant, rythme majoritaire de rock, mais quelques incursions dans le passé. Elle est, me dit-on connue dans un autre milieu musical (38 mn).
Marianne Feder - L’Hiver des poètes (Les Musiterriens/Modulor-2019). Une voix bien incertaine qui s’amoindrit dans le haut médium pour servir les textes de la chanteuse auteur-compositrice de la plupart des chansons, dont certaines musiques ont été écrite par Romane, le guitariste. Cela ne suffit pas à en faire du jazz. Django a bien accompagné Jean Sablon ou Charles Trénet et l’on a appris récemment (France-Musique / Etonnez-moi, Benoît ! 8 juin 2019) que le batteur de “Capri, c’est fini” du sympathique Hervé Villard, était Kenny Clarke, ce dont il était fier sans revendication. En conclusion, un joli disque avec de gentilles paroles, de la chanson de qualité française.(46 mn)

Orient-express

Park Jiha - Philos (Tak : Til-2019). Elle est seule avec beaucoup de matériel, elle parle longuement, ce qui est pénible à la deuxième écoute. Sinon, on aurait pu conseiller ce disque pour méditer ou se relaxer (37 mn).

Širom - A universe that roasts blossoms for a horse (Tak : Til-2019). Le nom du groupe est simple mais les titres bien compliqués. Au bout du compte, on entends une sorte de musique orientale indéfinie, plaisante par son exotisme voyageur (48 mn).

Faut-il s’en occuper ?
Les Oignons - Anthologie : After you’ve gone ; La Confiture ; New Diversité (Frémeaux- 2019 ; trois disques). On écoute le premier disque avec une certaine sympathie : un groupe de musiciens joue du jazz New-Orleans informel, comme font beaucoup de musiciens amateurs -mais ceux-ci sont des pros-, mélangeant les esthétiques, prenant les tics du NO. Le deuxième disque est mauvais, parce que c’est essentiellement un disque de chansons mal chantées et de trucs de jazz. Le troisième est le mieux travaillé, mais il perd en spontanéité. Un petit retour en arrière (Louis Armstrong 1927) est dévastateur. Ce groupe n’est pas “historiquement informé”, comme on dit dans la musique baroque jouée sur des instruments modernes -contrairement à Umlaut Big Band, par exemple. Ce n’est finalement qu’une imitation à ranger avec les “Haricots rouges”. Cuisine pour les copains. (56+71 +47)

Philippe Paschel

P.S. Je remercie encore les courageux éditeurs qui m’envoient des vrais disques, et pas ces fichiers que l’on oublie et perd dans les entrailles d’un ordinateur, mais il leur faudrait remanier un peu l’algorithme de choix de leurs envois : juste ajouter une dose de jazz américain.