à l’ATELIER DU PLATEAU

Jeudi 6 septembre 2019

Under the radar, le meilleur endroit pour se planquer de l’état policier de La Répression En Marche ( La REM ) et précisément ce soir, à l’Atelier du Plateau, qui perpétue sa collaboration avec le festival Jazz à la Villette.

IKUI DOKI  : Sophie Bernardo au basson, Raphaëlle Rinaudo à la harpe et bidouilles électroniques, Hughes Mayot au sax ténor et clarinette sib, un instrumentarium rare et étrange qui pratique le free jazz de chambre. Donc un trio qu’il serait possible d’inviter pour des concerts en appartement ? L’intro ténor-harpe rejointe par le basson le laisse à penser. Ça goûte smooth, pas sirupeux non non, onctueux, une coulée douce. Le public nombreux peut se laisser aller, détendre ses épaules, relâcher ses abdos raffermis par une intense sportive estivale pratique. Erreur fatale : la harpe éclectro frappée à coups de mailloches produit un gros son funky, une dandinerie propice à un gros solo du ténor qui ne mâche pas ses gros mots. C’est envoyé et bien envoyé par dessus le binôme qui ostinate sans réserve et impulse du son à énerver les voisins de la petite sauterie en chambre. Voilà, on est prévenu : mieux vaut les inviter sur la friche derrière l’usine délocalisée.
Outre quelques pièces brèves et enlevées, une séquence parlée-chantée par Sophie Bernardo, il faut retenir un genre de raga post-voyage au Sikkim dont l’empilement des boucles à la harpe et l’harmonie inaccoutumée titillent l’ouîe, un solo incandescent de Mayot ( My taylor is Reich ) et des tourneries valseuses qui tournent et tournent et sonnent superbement.
Le rappel participatif, un jerk !!!, met en valeur la harpiste qui y va d’un solo digne d’un Hasse Poulsen énervé avant de finir en berceuse émolliente. Au lit !!

Vendredi 6 septembre 2019

L’arbre rouge, Hughes Mayot, aux sax ténor et clarinette siB, Sophie Bernardo au basson, Benjamin Flament à la contrebasse, Théo Ceccaldi au violon et Valentin Ceccaldi au violoncelle, déploie ses branches charpentières et nous invite sur sa canopée. La dernière pièce d’ailleurs, avant le rappel unanime, s’intitule La timidité des cimes et résume tout ce qui vient d’être joué : un morceau comme une nouvelle longue, pas un feuillet écrit distraitement, non non, cent pages avec les ingrédients qui vont bien : un thème en forme d’incipit joué par le duo violoncelle-basson, thème léger, chantant, peuplé de silences respirants, la contrebasse seule qui flashbacke sa petite anecdote, le thème de départ qui revient et s’incruste des fois qu’on l’aurait oublié déjà, puis les trois cordes qui installent un motif répétitif (ce gang a dû biberonner Phil Glas, Terry Riley et La Monte Young avec une tétine à gros trous) pendant que le ténor la raconte, son histoire, soutenu par le motif récurrent des cordistes alors le basson y va de sa grosse voix tenue étirée vibrante avant de soloïser à son tour, y’a pas que le ténor dans la vie, non mais. Ça sonne profond, intense, tissé serré, chaque fil de chaîne tassé contre le précédent pour donner une oeuvre commune collective d’où personne n’émerge avec un melon macronien. Un truc de mousquetaires : un pour tous, tous pour un.
La pièce Rouge pastel nous a valu une nappe de sons graves, épais, dodus, qui n’est pas sans ressembler à une oeuvre entendue ici même par WATT, le quartet de clarinettes.
Auparavant encore, ils nous ont emmené visiter « ce qui se passerait après la mort  », une intro grave, baveuse, rugueuse, avec des échardes le long du passage, jouée forte, rien à voir avec le Voyage de Pierre Henry, puis sur fond de pizz des Ceccaldi Brothers, un genre de calme pas désagréable mais pas au point de nous faire oublier qu’il y a une vie avant la mort, celle-ci présentement ici et maintenant.
Ce quintet de chambre, total acoustique, organisé autour de la contrebasse comme pivot entre les cordes et les vents, sonne beau, intense, classieux, du genre qu’on aimerait inviter chez soi pour une soirée entre amis.


Atelier du Plateau
Impasse du Plateau, 75019 Paris
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