Message in a bubble

Ambiance chambriste ce soir à l’Atelier du Plateau avec le trio de Daniel Erdmann, lui-même au sax ténor, Théo Ceccaldi au violon et Jim Hart au vibraphone pour la sortie de leur CD Message in a bubble.
Chacun des membres du trio en a composé les morceaux qui ne manquent pas de saveur. Retenons que Velvet signifie le velours, ce qui décrit assez finement la couleur générale de leur musique : rien de tonitruant, rien de décousu, pas de trou aux genoux ou au cul, un tissage serré et dense ( 20 fils au centimètre ).
Il y a ces morceaux où la musique flue de l’un à l’autre dans une continuité incessante, l’idée du premier attrapée à la volée par le second qui l’enrichit avant que le troisième ne la développe à son tour et où personne ne semble avoir une place particulière comme on l’attendrait d’un trio piano-basse-batterie.
Il y a ce Drunk with Happiness (qui n’a absolument rien à voir avec le Dry January ) qu’on pourrait traduire par Bourré Bienheureux, qui nous emporte au rythme pesant et lent du mec pété, à l’allure bluesy roots au groove irrésistible avec, de temps en temps une fulgurance, un hoquet au moment où le mec, gesticulant, tente de rassurer son entourage ( on l‘entend bredouiller « t’inquièteuuu, je gèèèère »). Chacun soloïse à son tour, les deux autres tenant le motif répétitif : pas d’esbrouffe, l’essentiel qui vient du plus profond d’eux-mêmes, au coeur du soi, genre «  in trop de vino veritas ».
Il y a Danke, wirklich danke, morceau de bravoure qui s’ouvre avec le violon filant un motif simple resserré comme du Bach, rejoint par le ténor qui l’imite, le développe, lui donne de l’envergure, de l’amplitude, la musique coule à flot de ses doigts comme d’un robinet veuf de son joint, puis le vibra s’empare du motif répétitif et, s’appuyant sur ses acolytes se faisant bassiste et batteur, s’envole dans un solo virtuose : on pense Red Norvo, Lionel Hampton, Milt Jackson, et plus près de nous Franck Tortiller. Avant de laisser la parole au violon : solo d’abord minimaliste, à l’économie de moyen dans un intervalle de sons resserré mais porteur d’une forte émotion, suivi d’un développement original, surprenant, intense, sans exubérance et très très beau.
Il y a In my song there is a secret dont le thème, aux accents marqués, sonne comme un faux blues où le vibraphoniste se lance, au risque d’un claquage des mailloches, dans un solo étourdissant avant celui du ténor, a capella s’il vous plaît : un long solo poignant, habité, d’une absolue sincérité.
Magnifique concert où la musique ronde, soyeuse, émotionnante qui semble si simple, si facile, est servie par trois musiciens impeccables.
On les rappelle bien sûr.


Atelier du Plateau
Rue du Plateau, 75020 PARIS


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